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28/01/2013 | FRANCE | N°357272

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 28 janvier 2013, 357272


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er mars et 31 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la commune de Tullins, représentée par son maire ; la commune de Tullins demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0905126 du 27 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, après avoir mis hors de cause les Mutuelles du Mans assurances, rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Quatrem assurances collectives à lui verser la somme de 8 475,93 euros, avec intérêts

au taux légal et capitalisation, correspondant aux prestations versées ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er mars et 31 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la commune de Tullins, représentée par son maire ; la commune de Tullins demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0905126 du 27 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, après avoir mis hors de cause les Mutuelles du Mans assurances, rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Quatrem assurances collectives à lui verser la somme de 8 475,93 euros, avec intérêts au taux légal et capitalisation, correspondant aux prestations versées à M. Bessoud, son agent, que l'assureur a refusé de prendre en charge à la suite d'un nouvel arrêt de travail à compter du 19 février 2008 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions présentées devant le tribunal administratif de Grenoble ;

3°) de mettre à la charge de la société Quatrem assurances collectives la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Natacha Chicot, Auditeur,

- les observations de la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de la commune de Tullins, et de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société Quatrem assurances collectives,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de la commune de Tullins, et à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société Quatrem assurances collectives ;

1. Considérant que la commune de Tullins a souscrit auprès de la société Quatrem assurances collectives un contrat d'assurance ayant pour objet le remboursement, à compter du 1er janvier 2004, des prestations mises à sa charge en cas de décès, d'incapacité de travail, d'invalidité, de maternité, d'accident ou de maladie imputable au service, de ses agents, conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur ; que ce contrat a été résilié le 31 décembre 2007 ; que M. Bessoud, agent de la commune de Tullins, a été victime d'un accident de service le 30 janvier 2007 ; que si la société Quatrem assurances collectives a pris en charge les prestations consécutives à cet accident de service jusqu'au 3 août 2007, date de la reprise d'activité à temps plein de l'agent, elle a refusé le remboursement des prestations versées à M. Bessoud à la suite d'un arrêt de travail directement lié à l'accident de service mais postérieur à la résiliation du contrat ; que, saisi par la commune d'une demande tendant à la condamnation de l'assureur au remboursement de ces prestations, le tribunal administratif de Grenoble, faisant application des stipulations du contrat relatives à la prise en charge des rechutes d'accident du travail postérieures à une résiliation du contrat, a rejeté cette demande par un jugement contre lequel la commune de Tullins se pourvoit en cassation ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques : " Lorsque des assurés ou des adhérents sont garantis collectivement contre les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, le risque décès ou les risques d'incapacité ou d'invalidité, la résiliation ou le non-renouvellement du contrat ou de la convention est sans effet sur le versement des prestations immédiates ou différées, acquises ou nées durant son exécution. Le versement des prestations de toute nature se poursuit à un niveau au moins égal à celui de la dernière prestation due ou payée avant la résiliation ou le

non-renouvellement, sans préjudice des révisions prévues dans le contrat ou la convention. De telles révisions ne peuvent être prévues à raison de la seule résiliation ou du seul

non-renouvellement. / L'engagement doit être couvert à tout moment, pour tous les contrats ou conventions souscrits, par des provisions représentées par des actifs équivalents " ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, ces dispositions ayant pour objet de garantir collectivement et directement des assurés ou des adhérents contre certains risques personnels ne sont pas applicables aux contrats qui, comme en l'espèce, sont souscrits par les collectivités territoriales pour que leur soit garanti le versement ou le remboursement des prestations qu'elles doivent à leurs agents en vertu de dispositions législatives ou réglementaires figurant dans le statut de ces derniers ; que c'est, par suite, sans commettre d'erreur de droit ni dénaturer les pièces du dossier que le tribunal administratif de Grenoble a jugé que les dispositions de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1989 n'étaient pas applicables au litige ;

3. Considérant que les principes applicables aux contrats administratifs passés en matière d'assurance impliquent que les prestations liées à la réalisation d'un sinistre survenu pendant la période de validité d'un contrat d'assurance de la nature de celui en litige ne peuvent être remises en cause par la résiliation ultérieure de celui-ci ; que doivent, par suite, être réputées non écrites les clauses prévoyant l'interruption des prestations en cours à la date de résiliation du contrat ; que ces principes n'impliquent pas, en revanche, que soit réputée non écrite une clause comme celle convenue par les parties à l'article 3.6 des conditions générales du contrat litigieux et selon laquelle les rechutes d'arrêt de travail intervenues postérieurement à la date de la résiliation du contrat ne sont pas prises en charge par l'assureur ; que c'est, dès lors, sans commettre d'erreur de droit que le tribunal administratif de Grenoble a fait application de l'article 3.6 des conditions générales du contrat ;

4. Considérant que le tribunal administratif de Grenoble, qui a suffisamment motivé son jugement sur ces points, a pu juger sans entacher son jugement de contradiction de motifs, après avoir relevé que les dispositions des articles L. 443-1 et L. 443-2 du code de la sécurité sociale relatives à la prise en charge des rechutes n'étaient pas applicables au litige, que si le nouvel arrêt de travail de M. Bessoud, à compter du 19 février 2008, se rattachait à l'accident de service survenu le 30 janvier 2007 et constituait, en cela, une rechute au sens de l'article 3.6 des conditions générales du contrat, qu'il a souverainement interprété sans le dénaturer, il résultait des stipulations de cet article que la société Quatrem assurances collectives pouvait en refuser la prise en charge dès lors qu'il n'était pas contesté que le contrat litigieux était résilié à la date de la rechute ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la commune de Tullins doit être rejeté et, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Tullins la somme de 3 000 euros au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la commune de Tullins est rejeté.

Article 2 : La commune de Tullins versera une somme de 3 000 euros à la société Quatrem assurances collectives au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la commune de Tullins, aux Mutuelles du Mans assurances et à la société Quatrem assurances collectives.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 357272
Date de la décision : 28/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ASSURANCE ET PRÉVOYANCE - CONTRATS D'ASSURANCE - CONTRATS SOUSCRITS PAR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES POUR COUVRIR LES PRESTATIONS SOCIALES QU'ELLES DOIVENT À LEURS AGENTS - RÉSILIATION DU CONTRAT - 1) APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DITE EVIN RENFORÇANT LES GARANTIES OFFERTES AUX PERSONNES ASSURÉES CONTRE CERTAINS RISQUES - ABSENCE [RJ1] - 2) CONSÉQUENCES - SINISTRE SURVENU PENDANT LA PÉRIODE DE VALIDITÉ DU CONTRAT - CLAUSES RÉPUTÉES NON ÉCRITES - A) CLAUSE PRÉVOYANT L'ARRÊT DES PRESTATIONS LIÉES AU SINISTRE À COMPTER DE LA RÉSILIATION - EXISTENCE - B) CLAUSE PRÉVOYANT L'ABSENCE DE PRISE EN CHARGE DES RECHUTES D'ARRÊT DE TRAVAIL POSTÉRIEURES À LA RÉSILIATION - ABSENCE.

12-02 1) Les dispositions de l'article 7 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques, qui ont pour objet de garantir collectivement et directement des assurés ou des adhérents contre certains risques personnels, ne sont pas applicables aux contrats qui sont souscrits par les collectivités territoriales pour que leur soit garanti le versement ou le remboursement des prestations qu'elles doivent à leurs agents en vertu de dispositions législatives ou réglementaires figurant dans le statut de ces derniers. 2) a) Les principes applicables aux contrats administratifs passés en matière d'assurance impliquent que les prestations liées à la réalisation d'un sinistre survenu pendant la période de validité d'un contrat d'assurance ne peuvent être remises en cause par la résiliation ultérieure de celui-ci : doivent, par suite, être réputées non écrites les clauses prévoyant l'interruption des prestations en cours à la date de résiliation du contrat. b) En revanche, ces principes n'impliquent pas que soit réputée non écrite, dans un contrat tel que décrit au point 1, une clause selon laquelle les rechutes d'arrêt de travail intervenues postérieurement à la date de la résiliation du contrat ne sont pas prises en charge par l'assureur.

MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FORMATION DES CONTRATS ET MARCHÉS - CONTENU - CONTRATS D'ASSURANCE - CONTRATS SOUSCRITS PAR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES POUR COUVRIR LES PRESTATIONS SOCIALES QU'ELLES DOIVENT À LEURS AGENTS - RÉSILIATION DU CONTRAT - 1) APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DITE EVIN RENFORÇANT LES GARANTIES OFFERTES AUX PERSONNES ASSURÉES CONTRE CERTAINS RISQUES - ABSENCE [RJ1] - 2) CONSÉQUENCES - SINISTRE SURVENU PENDANT LA PÉRIODE DE VALIDITÉ DU CONTRAT - CLAUSES RÉPUTÉES NON ÉCRITES - A) CLAUSE PRÉVOYANT L'ARRÊT DES PRESTATIONS LIÉES AU SINISTRE À COMPTER DE LA RÉSILIATION - EXISTENCE - B) CLAUSE PRÉVOYANT L'ABSENCE DE PRISE EN CHARGE DES RECHUTES D'ARRÊT DE TRAVAIL POSTÉRIEURES À LA RÉSILIATION - ABSENCE.

39-02-04 1) Les dispositions de l'article 7 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques, qui ont pour objet de garantir collectivement et directement des assurés ou des adhérents contre certains risques personnels, ne sont pas applicables aux contrats qui sont souscrits par les collectivités territoriales pour que leur soit garanti le versement ou le remboursement des prestations qu'elles doivent à leurs agents en vertu de dispositions législatives ou réglementaires figurant dans le statut de ces derniers. 2) a) Les principes applicables aux contrats administratifs passés en matière d'assurance impliquent que les prestations liées à la réalisation d'un sinistre survenu pendant la période de validité d'un contrat d'assurance ne peuvent être remises en cause par la résiliation ultérieure de celui-ci : doivent, par suite, être réputées non écrites les clauses prévoyant l'interruption des prestations en cours à la date de résiliation du contrat. b) En revanche, ces principes n'impliquent pas que soit réputée non écrite, dans un contrat tel que décrit au point 1, une clause selon laquelle les rechutes d'arrêt de travail intervenues postérieurement à la date de la résiliation du contrat ne sont pas prises en charge par l'assureur.


Références :

[RJ1]

Rappr. Cass. civ. 2è, 28 juin 2012, n° 11-1493.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jan. 2013, n° 357272
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Natacha Chicot
Rapporteur public ?: M. Gilles Pellissier
Avocat(s) : SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:357272.20130128
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