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26/04/2013 | FRANCE | N°363334

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 26 avril 2013, 363334


Vu, 1° sous le n° 363334, le pourvoi, enregistré le 11 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance n° 1205243 du 27 septembre 2012 en tant que par cette ordonnance, le juge des référés du tribunal administratif de Lille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a, à la demande de Mme A...B..., suspendu l'exécution de son arrêté du 12 juillet 2012 fixant la li

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Vu, 1° sous le n° 363334, le pourvoi, enregistré le 11 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance n° 1205243 du 27 septembre 2012 en tant que par cette ordonnance, le juge des référés du tribunal administratif de Lille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a, à la demande de Mme A...B..., suspendu l'exécution de son arrêté du 12 juillet 2012 fixant la liste des élèves des instituts régionaux d'administration aptes à être titularisés, en tant que l'intéressée n'y figure pas ;

Vu, 2° sous le n° 363367, le pourvoi, enregistré le 12 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour l'institut régional d'administration (IRA) de Lille, dont le siège est 49, rue Jean Jaurès, BP 213 à Lille (59018 Cedex) ; l'institut régional d'administration de Lille demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance n° 1205249 du 27 septembre 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Lille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, à la demande de Mme A...B..., a suspendu l'exécution de la décision du jury du 6 juillet 2012 inscrivant l'intéressée sur la liste des élèves non classés dans l'univers professionnel " administration territoriale de l'Etat " et celle de la décision de classement final établi par le même jury le 6 juillet 2012 dans l'univers professionnel " administration territoriale de l'Etat " en tant que l'intéressée n'y figure pas ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 84-588 du 10 juillet 1984 ;

Vu l'arrêté du 23 août 2007 relatif à l'organisation de la formation initiale au sein des instituts régionaux d'administration ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dominique Versini-Monod, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de Mme B... et de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de l'institut régional d'administration de Lille,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de Mme B...et à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de l'institut régional d'administration de Lille ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ; que, par deux ordonnances du 27 septembre 2012 prises sur le fondement de ces dispositions à la demande de MmeB..., le juge des référés du tribunal administratif de Lille a suspendu, d'une part, l'exécution de la décision de classement final établi par le jury de l'institut régional d'administration (IRA) de Lille du 6 juillet 2012, en tant que l'intéressée n'y figure pas, et de la décision du même jour l'inscrivant sur la liste des élèves non classés et, d'autre part, celle de l'arrêté du ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique du 12 juillet 2012 fixant la liste des élèves des instituts régionaux d'administration aptes à être titularisés, en tant qu'elle n'y figure pas ; que ces ordonnances font l'objet de pourvois en cassation présentés respectivement par l'IRA de Lille et par le ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur le pourvoi de l'IRA de Lille :

2. Considérant qu'en vertu de l'article 25 du décret du 10 juillet 1984 relatif aux instituts régionaux d'administration, le jury chargé d'établir le classement de sortie d'un institut régional d'administration peut ne pas faire figurer sur la liste de classement les élèves dont il estime les résultats insuffisants ; que l'article 26 du même décret dispose : " Au vu des décisions prises par le jury, (...) le ministre chargé de la fonction publique arrête la liste des élèves aptes à être titularisés (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que la délibération par laquelle le jury d'un institut régional d'administration refuse de faire figurer un élève sur la liste de classement épuise ses effets lorsque le ministre arrête, au vu de cette délibération, la liste des élèves aptes à être titularisés ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés qu'au vu de la décision de classement final du jury de l'institut régional d'administration de Lille le 6 juillet 2012 et de la décision de ce jury du même jour inscrivant Mme B...sur la liste des élèves non classés, le ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique, par un arrêté du 12 juillet 2012, a fixé la liste des élèves des instituts régionaux d'administration aptes à être titularisés ; qu'il suit de là qu'à la date du 10 septembre 2012 à laquelle l'intéressée a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lille la suspension des décisions du jury de l'IRA de Lille du 6 juillet 2012, ces décisions avaient épuisé leurs effets ; que, par suite, sa demande devait être regardée comme dépourvue d'objet et le juge des référés ne pouvait, sans méconnaître son office, y faire droit ; que son ordonnance doit, dès lors, être annulée ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

5. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la demande de suspension des décisions du jury de l'IRA de Lille présentée par Mme B... le 10 septembre 2012 est dépourvue d'objet et, par suite, irrecevable ; qu'elle doit, dès lors, être rejetée ;

Sur le pourvoi du ministre :

6. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 12 juillet 2012 fixant la liste des élèves des instituts régionaux d'administration aptes à être titularisés n'avait pas cessé de produire ses effets à la date du 10 septembre suivant, à laquelle Mme B...en a demandé la suspension au juge des référés du tribunal administratif de Lille ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que cette demande aurait été dépourvue d'objet et que le juge des référés aurait commis une erreur de droit en ne la rejetant pas comme irrecevable ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que pour juger que l'urgence justifiait la suspension de l'arrêté litigieux, le juge des référés a relevé que celui-ci faisait obstacle à la titularisation de l'intéressée et au versement du salaire correspondant aux fonctions auxquelles elle se destinait dans la fonction publique, que le redoublement ne lui avait pas été proposé et qu'elle était demandeur d'emploi depuis le 1er septembre 2012 ; que c'est sans dénaturation, et par une ordonnance suffisamment motivée, que le juge des référés a pu estimer, compte tenu des incidences de la décision contestée sur la situation de l'intéressée, que la condition d'urgence était remplie, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que Mme B...avait présenté sa demande de suspension près de deux mois après l'intervention de cet arrêté du 12 juillet 2012 ;

8. Considérant, en troisième lieu, que le juge des référés a jugé qu'en l'état de l'instruction, le moyen tiré de ce que le jury de l'IRA de Lille avait commis une erreur de droit au regard de l'article 9 de l'arrêté du 23 août 2007 relatif à l'organisation de la formation initiale au sein des instituts régionaux d'administration en ne faisant pas figurer Mme B...sur la liste de classement final était propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de sa décision du 6 juillet 2012 ; qu'en vertu des dispositions de cet article, le jury établit, par univers professionnel, le classement final des élèves en additionnant, pour chaque élève, le total des points qu'il a obtenus dans le cadre du cycle d'approfondissement et la moitié des points qu'il a obtenus dans le cadre du tronc commun ; qu'eu égard à son office, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit en déduisant de ces dispositions que, sauf note éliminatoire, le jury devait apprécier l'insuffisance des résultats des élèves qu'il décidait de ne pas faire figurer sur la liste de classement au regard de l'ensemble des notes obtenues, ni dénaturé les pièces du dossier en estimant, en l'état de l'instruction, que le moyen tiré de la méconnaissance de cette exigence était de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté litigieux ;

9. Considérant, en dernier lieu, que le juge des référés a déduit du doute sérieux ainsi relevé quant à la légalité de la décision du jury de l'institut régional d'administration de Lille du 6 juillet 2012 qu'un tel doute affectait également, par voie de conséquence, la légalité de l'arrêté du 12 juillet 2012 du ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique fixant la liste des élèves des instituts régionaux d'administration aptes à être titularisés, en tant que Mme B...n'y figure pas ; que si le ministre fait valoir qu'il ne pouvait remettre en cause l'appréciation du jury, il n'en résulte pas que le juge des référés aurait entaché son ordonnance d'erreur de droit en retenant l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

11. Considérant que Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de MmeB..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à cette SCP ; qu'en revanche, les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur leur fondement par cette SCP et tendant à ce que soit mise à la charge de l'IRA de Lille, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme qu'elle demande à ce titre ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance n° 1205249 du juge des référés du tribunal administratif de Lille du 27 septembre 2012 est annulée.

Article 2 : La demande présentée à ce juge par Mme B...dans l'instance n° 1205249 est rejetée.

Article 3 : Le pourvoi du ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin à l'encontre de l'institut régional d'administration de Lille sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 5 : L'Etat versera à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de Mme B..., une somme de 2 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique, à l'institut régional d'administration de Lille et à Mme A...B....


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 363334
Date de la décision : 26/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 avr. 2013, n° 363334
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dominique Versini-Monod
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:363334.20130426
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