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17/07/2013 | FRANCE | N°356099

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 17 juillet 2013, 356099


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 janvier et 24 avril 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10LY00210 du 24 novembre 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0505109 du 20 novembre 2009 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande d'annulation pour excès de pouvoir de la décision de l'inspecteur du travail de la 1ère

section de l'Isère du 6 avril 2004 autorisant la société Silicomp Man...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 janvier et 24 avril 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... B..., demeurant... ; M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10LY00210 du 24 novembre 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0505109 du 20 novembre 2009 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande d'annulation pour excès de pouvoir de la décision de l'inspecteur du travail de la 1ère section de l'Isère du 6 avril 2004 autorisant la société Silicomp Management à le licencier pour faute et de la décision du 6 octobre 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale rejetant son recours hiérarchique, d'autre part, à l'annulation de ces décisions ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Silicomp Management la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Louis Dutheillet de Lamothe, Auditeur,

- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de M. B...et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Silicomp Management ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 24 novembre 2011 :

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B..., salarié protégé, était employé par la société Silicomp Management, dont le siège social se trouve dans l'Essonne, où il était affecté au site de Palaiseau (Essonne) ; qu'une procédure de licenciement pour faute a été engagée à son encontre par la société Silicomp Management ; que, saisi par la société Silicomp, dont le siège se trouve en Isère et qui est la société dominante du groupe auquel appartient la société Silicomp Management, l'inspecteur du travail de la 1ère section de l'Isère a autorisé le licenciement de M. B...; que le ministre du travail a rejeté le recours hiérarchique formé par l'intéressé contre cette décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 436-3 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur, aujourd'hui repris à l'article R. 2421-10 du même code : " La demande d'autorisation de licenciement est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement où est employé l'intéressé (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'inspecteur du travail compétent pour se prononcer sur une demande d'autorisation de licencier un salarié protégé est celui dans le ressort duquel se trouve l'établissement disposant d'une autonomie de gestion suffisante où le salarié est affecté ou rattaché ; qu'a défaut, l'inspecteur du travail compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le siège social de l'entreprise qui emploie le salarié protégé, même lorsque cette entreprise appartient à un groupe ;

3. Considérant que, pour retenir la compétence de l'inspecteur du travail de la 1ère section de l'Isère, dont dépendait le siège social de la société Silicomp, société dominante du groupe auquel appartenait la société Silicomp Management, dont le siège social se trouvait dans l'Essonne, pour autoriser le licenciement de M.B..., la cour administrative d'appel de Lyon a jugé que ni le site de Palaiseau, où était affecté M.B..., ni même la société Silicomp Management, qui employait pourtant l'intéressé, ne disposaient d'une autonomie suffisante au regard de la société Silicomp ; qu'en jugeant ainsi, alors que M. B...n'était pas employé par la société Silicomp mais par la société Silicomp Management, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que, par suite, son arrêt doit être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions d'appel de M. B...tenant à l'annulation des décisions autorisant son licenciement :

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle l'inspecteur du travail de la 1ère section de l'Isère a autorisé le licenciement de M.B..., le site de Palaiseau de la société Silicomp Management où travaillait ce salarié, qui n'était pas encore doté d'un comité d'établissement, ne disposait pas d'une autonomie de gestion permettant de le regarder comme un établissement au sens de l'article R. 436-3 du code du travail cité ci-dessus ;

6. Considérant que, par suite, l'inspecteur du travail compétent était celui dans le ressort duquel se trouvait le siège social de l'employeur de M.B..., la société Silicomp Management, qui était dans l'Essonne, sans qu'y puisse faire obstacle le fait que cette société avait donné mandat à des autorités de la société dominante du groupe Silicomp pour conduire la procédure de licenciement ; que, dès lors, la décision autorisant le licenciement prise par l'inspecteur du travail de la 1ère section de l'Isère, dans le ressort duquel se trouvait le siège social de la société dominante du groupe Silicomp mais non le siège social de l'employeur du salarié, est entachée d'incompétence ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête d'appel, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail du 6 avril 2004 autorisant son licenciement ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler également la décision du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale du 6 octobre 2004 qui s'est borné a rejeté le recours hiérarchique du requérant ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de la société Silicomp Management au titre de ces dispositions ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M B...au titre de ces dispositions, en raison des frais engagés par lui en appel et en cassation, et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de M. B...les sommes demandées par la société Silicomp au titre des frais exposés par elle en première instance, en appel et en cassation et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 24 novembre 2011 et le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 20 novembre 2009 sont annulés.

Article 2 : La décision de l'inspecteur du travail du 6 avril 2004 et la décision du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale du 6 octobre 2004 sont annulées.

Article 3 : L'Etat versera à M. B...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la société Silicomp Management au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en première instance, en appel et en cassation sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., à la société Silicomp Management et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 356099
Date de la décision : 17/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

TRAVAIL ET EMPLOI - INSTITUTIONS DU TRAVAIL - ADMINISTRATION DU TRAVAIL - INSPECTION DU TRAVAIL - COMPÉTENCE TERRITORIALE - PRINCIPE - INSPECTEUR DANS LE RESSORT DUQUEL SE TROUVE L'ÉTABLISSEMENT OÙ LE SALARIÉ EST AFFECTÉ OU RATTACHÉ - EXCEPTION EN L'ABSENCE D'AUTONOMIE SUFFISANTE DE L'ÉTABLISSEMENT - INSPECTEUR DANS LE RESSORT DUQUEL SE TROUVE LE SIÈGE SOCIAL DE L'ENTREPRISE EMPLOYEUR - ET NON DE LA SOCIÉTÉ MÈRE DU GROUPE.

66-01-01-02 Il résulte des dispositions de l'article R. 436-3 du code du travail, aujourd'hui repris à l'article R. 2421-10 du même code, que l'inspecteur du travail compétent pour se prononcer sur une demande d'autorisation de licencier un salarié protégé est celui dans le ressort duquel se trouve l'établissement disposant d'une autonomie de gestion suffisante où le salarié est affecté ou rattaché. A défaut, l'inspecteur du travail compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le siège social de l'entreprise qui emploie le salarié protégé, même lorsque cette entreprise appartient à un groupe.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIÉS PROTÉGÉS - MODALITÉS DE DÉLIVRANCE OU DE REFUS DE L'AUTORISATION - AUTORITÉ COMPÉTENTE - COMPÉTENCE TERRITORIALE DE L'INSPECTEUR DU TRAVAIL - PRINCIPE - INSPECTEUR DANS LE RESSORT DUQUEL SE TROUVE L'ÉTABLISSEMENT OÙ LE SALARIÉ EST AFFECTÉ OU RATTACHÉ - EXCEPTION EN L'ABSENCE D'AUTONOMIE SUFFISANTE DE L'ÉTABLISSEMENT - INSPECTEUR DANS LE RESSORT DUQUEL SE TROUVE LE SIÈGE SOCIAL DE L'ENTREPRISE EMPLOYEUR - ET NON DE LA SOCIÉTÉ MÈRE DU GROUPE.

66-07-01-03-01 Il résulte des dispositions de l'article R. 436-3 du code du travail, aujourd'hui repris à l'article R. 2421-10 du même code, que l'inspecteur du travail compétent pour se prononcer sur une demande d'autorisation de licencier un salarié protégé est celui dans le ressort duquel se trouve l'établissement disposant d'une autonomie de gestion suffisante où le salarié est affecté ou rattaché. A défaut, l'inspecteur du travail compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le siège social de l'entreprise qui emploie le salarié protégé, même lorsque cette entreprise appartient à un groupe.


Publications
Proposition de citation : CE, 17 jui. 2013, n° 356099
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Rapporteur public ?: M. Rémi Keller
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:356099.20130717
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