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01/08/2013 | FRANCE | N°347876

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 01 août 2013, 347876


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 mars et 28 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. D... B..., demeurant... ; M. A... B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA03828 du 24 janvier 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, d'une part, annulé le jugement n° 0702701 du tribunal administratif de Melun du 2 avril 2009 annulant pour excès de pouvoir la décision du 14 septembre 2006 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement et la décision du ministre de l'

emploi, de la cohésion sociale et du logement du 27 février 2007 co...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 mars et 28 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. D... B..., demeurant... ; M. A... B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA03828 du 24 janvier 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, d'une part, annulé le jugement n° 0702701 du tribunal administratif de Melun du 2 avril 2009 annulant pour excès de pouvoir la décision du 14 septembre 2006 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement et la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement du 27 février 2007 confirmant cette autorisation, d'autre part, rejeté sa demande de première instance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société Devaux Werts Fonderies ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de MeC..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Devaux Werts Fonderies, une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Balat, avocat de M. A...B...et à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de la SCP BTSG, liquidateur judiciaire de la société Devaux Werts Fonderies ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-1 du code du travail alors en vigueur, devenu l'article L. 1233-4 : " (...) Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. Les offres de reclassement proposées au salarié doivent êtres écrites et précises. " ; qu'il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié protégé, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

2. Considérant qu'au titre de son obligation de reclassement, l'employeur doit s'efforcer de proposer au salarié des offres de reclassement écrites, précises et personnalisées, portant, si possible, sur un emploi équivalent ; que si, pour juger de la réalité des efforts de reclassement de l'employeur, l'inspecteur du travail peut tenir compte de la volonté exprimée par le salarié, l'expression de cette volonté, lorsqu'il s'agit d'un reclassement sur le territoire national, ne peut néanmoins être prise en compte qu'après que des propositions de reclassement écrites, précises et personnalisées ont été effectivement exprimées, et à condition que l'information du salarié soit complète et exacte ;

3. Considérant que la cour administrative d'appel de Paris a jugé que, dans les circonstances particulières d'une cessation d'activité totale de l'entreprise, le seul fait que l'employeur avait, en l'espèce, communiqué au salarié une liste de vingt postes vacants, dont certains correspondaient à son profil, et mis en oeuvre diverses mesures générales de nature à faciliter le reclassement permettait d'établir, dans un tel contexte et eu égard au fait que le salarié lui avait fait savoir qu'il souhaitait s'arrêter de travailler, que l'employeur s'était acquitté de son obligation de reclassement ;

4. Considérant, toutefois, que le contexte d'une cessation totale d'activité de l'entreprise ne dispense pas l'employeur de l'obligation qu'il a de rechercher des offres personnalisées de reclassement pour le salarié au sein du groupe sur le territoire national ; que, dès lors, en estimant que la volonté du salarié de ne pas s'inscrire dans la démarche de reclassement mise en oeuvre permettait, dans ce contexte particulier, de regarder la société Devaux Werts Fonderies comme ayant satisfait aux obligations qui lui incombaient à ce titre sans contrôler si celle-ci lui avait fait, au préalable, des propositions de reclassement écrites, précises et personnalisées, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit ; que le requérant est, par suite, fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, si M. A...B... a reçu de son employeur, les 16 juin et 28 juin 2006, des listes d'emplois ouverts au reclassement dans le groupe auquel il appartenait et qu'une telle liste figurait également dans le plan de sauvegarde de l'emploi, ces documents, d'une part, ne contenaient pas une description précise du contenu des postes et des conditions d'embauche, d'autre part, ne constituaient pas des offres personnalisées adressées à ce salarié ; qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, ni le souhait exprimé par ce dernier de s'arrêter de travailler ni son refus de participer aux mesures d'aide au reclassement organisées par l'employeur n'exonéraient celui-ci de l'obligation de lui proposer des offres de reclassements précises et personnalisées ; que, dès lors, la société Devaux Werts Fonderies ne peut être regardée, en l'espèce, comme s'étant acquittée de son obligation de reclassement vis-à-vis de M. A...B... ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Devaux Werts Fonderies n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a annulé la décision de l'inspecteur du travail ;

8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le requérant au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font, par ailleurs, obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de ce dernier qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 24 janvier 2011 est annulé.

Article 2 : La requête de la société Devaux Werts Fonderies est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la SCP BTSG présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. E... A...B..., à la SCP BSTG es qualités de liquidateur judiciaire de la société Devaux Werts Fonderies et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 347876
Date de la décision : 01/08/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 01 aoû. 2013, n° 347876
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Bachini
Rapporteur public ?: Mme Gaëlle Dumortier
Avocat(s) : BALAT ; SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:347876.20130801
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