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06/11/2013 | FRANCE | N°340982

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 06 novembre 2013, 340982


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juin et 29 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Les Tamarines, représentée par son gérant, dont le siège est 10, rue des Oiseaux du Paradis à Piton Saint-Leu (97424) ; la société Les Tamarines demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08MA00503 du 19 mars 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0502518 du 11 octobre 2007 par lequel le tribun

al administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la d...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juin et 29 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Les Tamarines, représentée par son gérant, dont le siège est 10, rue des Oiseaux du Paradis à Piton Saint-Leu (97424) ; la société Les Tamarines demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08MA00503 du 19 mars 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0502518 du 11 octobre 2007 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 janvier 2005 par laquelle le maire de Saint-Raphaël a refusé de lui accorder un permis de construire, ainsi que de la décision du 14 mars 2005 rejetant son recours gracieux contre ce refus et, d'autre part, à l'annulation pour excès de pouvoir de ces décisions et à ce qu'il soit enjoint au maire de Saint-Raphaël de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Raphaël la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 octobre 2013, présentée pour la société Les Tamarines ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Eric Aubry, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la société Les Tamarines et à la SCP Gaschignard, avocat de la commune de Saint-Raphaël ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 6 janvier 2005, le maire de Saint-Raphaël a refusé d'accorder à la société Les Tamarines un permis de construire en vue de la reconstruction d'une ancienne villa délabrée située en zone ND du plan d'occupation des sols alors applicable ; que cette décision est fondée sur plusieurs motifs tirés de ce que le projet est situé sur un terrain proche du rivage dans le périmètre du site classé de l'Esterel et est de nature à porter atteinte au caractère et à l'intérêt des paysages naturels, en méconnaissance des articles R. 111-21, L. 146-6 et R. 146-1 du code de l'urbanisme, de ce que seule peut, dans cet espace protégé, être autorisée la reconstruction à l'identique d'une construction existant à la date du plan d'occupation des sols en vigueur et en état d'habitation, selon l'article ND1 II 10 du règlement, de ce que le raccordement au réseau d'alimentation en eau potable n'est pas assuré dans des conditions conformes aux règlements sanitaires en vigueur, en méconnaissance des dispositions du règlement du plan d'occupation des sols et du code de l'urbanisme et de ce que le projet ne satisfait pas aux exigences de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, dès lors que la restauration envisagée ne porte pas sur une ruine consécutive à un sinistre résultant d'un événement accidentel ou d'une catastrophe naturelle ; que, par une décision du 14 mars 2005, le maire de Saint-Raphaël a rejeté le recours gracieux formé par la société contre ce refus ; que le tribunal administratif de Nice a, par un jugement du 11 octobre 2007, rejeté la demande de la société tendant à l'annulation de ces décisions ; que, par un arrêt du 19 mars 2010, contre lequel la société Les Tamarines se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Marseille, après avoir annulé le jugement précité, a rejeté sa demande ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié " ; qu'en relevant, au terme d'une appréciation souveraine des pièces du dossier, que l'état de ruine de la construction litigieuse avait été constaté dès 1992 et que si des incendies ou des explosions qui auraient eu lieu, dans des conditions au demeurant non clairement établies, en 1995 et 1996 ont pu aggraver la ruine de cette villa, ils n'en ont pas été la cause et que, par suite, le délabrement du bâtiment en litige ne pouvait être regardé comme imputable à un sinistre, au sens de l'article L. 111-3 précité, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis ; que, compte tenu de l'argumentation présentée devant elle, qui n'excipait pas de façon précise et circonstanciée d'un sinistre antérieur à 1992, la cour a suffisamment motivé son arrêt sur ce point ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article ND 1-II-1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Saint-Raphaël, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne sont admises que (...) les restaurations ou améliorations de construction à usage d'habitation existant dans les conditions prévues à l'article ND 14 " ; qu'aux termes de l'article ND 14 du même règlement : " Les restaurations ou agrandissements des constructions existantes à usage d'habitation, susceptibles d'être admises dans la zone, ne doivent pas entraîner un accroissement de la superficie de plancher hors oeuvre nette supérieure à 30% de la surface hors oeuvre nette existante. De plus, la superficie de plancher hors oeuvre nette obtenue après extension ne doit pas excéder, annexes comprises, 200 m² maximum (...) " ;

4. Considérant qu'un bâtiment en état de ruine ne peut, en tout état de cause, être regardé comme une construction existante à usage d'habitation au sens et pour l'application de ces dispositions ; qu'il suit de là qu'en jugeant, après avoir constaté, sans dénaturer les pièces du dossier, l'état de ruine du bâtiment litigieux, que la requérante ne pouvait se prévaloir de ces dispositions, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ; que la société requérante ne peut utilement critiquer le motif surabondant par lequel la cour a fait état de l'absence d'occupation du bâtiment depuis 1992 ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 111-21 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ; qu'aux termes de l'article R. 146-1 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " En application du premier alinéa de l'article L. 146-6, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral, sont nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : / a) Les dunes, les landes côtières, les plages et les lidos, les estrans, les falaises et les abords de celles-ci (...) " ;

6. Considérant que ces dispositions permettent à l'autorité compétente de rejeter la demande de permis de construire, lorsque la construction projetée est de nature, par sa situation, et qu'elles qu'en soient les caractéristiques architecturales et la nature des travaux réalisés, à porter atteinte à un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral ; qu'en relevant, pour retenir une telle atteinte, que le terrain d'assiette du projet litigieux, qui consistait ainsi qu'il a été dit ci-dessus non en la restauration d'un bâtiment existant mais en la reconstruction d'une ruine, était situé, en-dehors de toute urbanisation, sur les côtes du " Trayas ", partie naturelle du site classé du massif de l'Estérel, et que ces parcelles surplombaient le rivage, à moins de 100 mètres de celui-ci, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les faits de l'espèce ; que le moyen tiré de ce que le projet entrait dans les prévisions de l'article R. 146-2 du code de l'urbanisme, qui est nouveau en cassation et n'est pas né de l'arrêt attaqué, ne peut être utilement invoqué ;

7. Considérant qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour a entendu juger que les seuls motifs de la décision litigieuse tirés de l'impossibilité de procéder à la reconstruction d'un bâtiment en état de ruine situé dans un espace remarquable du littoral suffisaient à justifier légalement la décision litigieuse ; qu'elle n'a, par suite, pas entaché son arrêt d'insuffisance de motivation en ne se prononçant pas sur les moyens dirigés contre le motif de l'arrêté litigieux relatif aux difficultés de raccordement au réseau d'alimentation en eau potable ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Les Tamarines n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, au titre de ces dispositions, de mettre à la charge de la société requérante une somme de 2 000 euros qui sera versée à la commune de Saint-Raphaël ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Les Tamarines est rejeté.

Article 2 : La société Les Tamarines versera une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à la commune de Saint-Raphaël.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Les Tamarines et à la commune de Saint-Raphaël.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 340982
Date de la décision : 06/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 nov. 2013, n° 340982
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Eric Aubry
Rapporteur public ?: M. Xavier De Lesquen
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:340982.20131106
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