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14/11/2013 | FRANCE | N°361647

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 14 novembre 2013, 361647


Vu la requête, enregistrée le 2 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Beauvoir-de-Marc, représentée par son maire ; la commune de Beauvoir-de-Marc demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 1334 D du 30 mai 2012 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a accordé à la SCI Vendôme Outlets l'autorisation préalable en vue de la création d'un centre de marques de luxe dénommé "The Village", d'une surface de vente globale de 21 032 m², composé de 13 moyennes surfaces

spécialisées dans l'équipement de la maison, l'équipement de la personne, ...

Vu la requête, enregistrée le 2 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Beauvoir-de-Marc, représentée par son maire ; la commune de Beauvoir-de-Marc demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 1334 D du 30 mai 2012 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a accordé à la SCI Vendôme Outlets l'autorisation préalable en vue de la création d'un centre de marques de luxe dénommé "The Village", d'une surface de vente globale de 21 032 m², composé de 13 moyennes surfaces spécialisées dans l'équipement de la maison, l'équipement de la personne, la culture et les loisirs pour un total de 6 440 m² et d'environ 69 boutiques de moins de 300 m² chacune pour un total de 14 592 m², à Villefontaine (Isère) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la SCI Vendôme Outlets la somme de 5 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;

Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;

Vu le décret n° 2008-1212 du 24 novembre 2008 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Louis Dutheillet de Lamothe, Auditeur,

- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la SCI Vendôme Outlets et à la SCP Boutet, avocat de la commune de Villefontaine, de la commune de la Verpilliere et du comité de soutien au village de marques ;

Sur l'intervention :

Considérant qu'eu égard à l'objet de ses statuts, la Fédération des groupements commerciaux du Nord Isère a intérêt à l'annulation de la décision attaquée ; qu'ainsi, son intervention est recevable ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

En ce qui concerne la procédure suivie devant la commission nationale :

1. Considérant, en premier lieu, que, si la requérante soutient qu'il n'est pas établi que tous les membres de la commission nationale auraient été régulièrement convoqués, ni qu'ils auraient reçu communication de l'intégralité du dossier et des rapports réalisés par les services instructeurs, elle n'assortit pas ces allégations de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

2. Considérant, en second lieu, que si la requérante soutient que les signataires des avis des 7 et 9 mai 2012 n'auraient pas été habilités à engager les ministres concernés et que tous les ministres intéressés n'auraient pas été consultés, il résulte de la combinaison des dispositions des articles R. 752-16 et R. 752-51 du code de commerce que les ministres intéressés, au sens de cet article, sont ceux qui ont autorité sur les services chargés d'instruire les demandes, soit les ministres en charge du commerce, de l'urbanisme et de l'environnement ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que les avis de ces ministres ont été signés par des personnes dûment habilitées à cet effet ; que le moyen tiré de ce que l'avis d'autres ministres n'a pas été recueilli est inopérant ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la procédure de consultation des ministres intéressés n'aurait pas été régulière doit être écarté ;

En ce qui concerne la composition du dossier de demande :

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient la requérante, le dossier de demande comportait des informations suffisantes concernant les effets du projet sur les consommations énergétiques et la pollution, ainsi que son impact sur les écosystèmes ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la commission nationale n'aurait pas été en mesure d'apprécier les effets du projet doit être écarté ;

En ce qui concerne l'appréciation de la commission nationale :

4. Considérant qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles se prononcent sur un projet d'exploitation commerciale soumis à autorisation en application de l'article L. 752-1 du code de commerce, d'apprécier la conformité de ce projet aux objectifs prévus à l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et à l'article L. 750-1 du code de commerce, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du même code ; que l'autorisation ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet compromet la réalisation de ces objectifs ;

5. Considérant que, si la requérante soutient que la décision attaquée compromettrait la réalisation de l'objectif d'aménagement du territoire, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que le projet, qui consiste en la création d'un village de marques distribuant des produits haut de gamme à prix réduits, se caractérise par un positionnement commercial différent des commerces traditionnels et contribuera à développer l'attractivité commerciale du nord de l'Isère, notamment par l'afflux touristique qu'il pourra susciter ; d'autre part, que le projet, qui s'implantera dans une zone d'aménagement concerté se situant dans la continuité des zones urbaines de Villefontaine et La Verpillière, en bordure d'une voie ferrée et d'axes d'envergure tels que l'autoroute A 43 et la RD 106, bénéficie d'une desserte routière et autoroutière adaptée et que les aménagements routiers envisagés permettront de fluidifier le trafic et d'absorber les flux de véhicules induits par le futur ensemble commercial ;

6. Considérant que, si la requérante soutient que la décision attaquée compromettrait la réalisation de l'objectif de développement durable, il ressort des pièces du dossier qu'en matière d'insertion dans le réseau de transports collectifs, la desserte du projet est satisfaisante, dès lors que le site est accessible par plusieurs lignes de bus desservant des points stratégiques de l'agglomération et du département et qu'une navette régulière permettra de relier le village de marques à la gare de La Verpillière ; qu'en matière de qualité environnementale, d'une part, l'insertion paysagère du projet, qui s'inscrit dans un environnement urbanisé, est suffisamment assurée par le soin apporté aux caractéristiques architecturales et environnementales des bâtiments, ainsi qu'à la place accordée aux espaces verts, qui représenteront 44 % de la superficie totale du site, d'autre part, le projet prévoit de nombreux dispositifs destinés à limiter son impact sur l'environnement, tant au stade de sa conception que de son exploitation ;

7. Considérant que, si la requérante soutient que la décision attaquée compromettrait la réalisation de l'objectif de protection des consommateurs, elle n'assortit pas ces allégations des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commission nationale a, par la décision attaquée, fait une exacte application des dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce ;

En ce qui concerne la compatibilité du projet avec les documents d'urbanisme :

9. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que le projet contesté méconnaîtrait les orientations du schéma de développement commercial de la communauté d'agglomération de la Porte de l'Isère, lesquelles sont dépourvues de valeur contraignante, est inopérant ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que le projet contesté est incompatible avec les dispositions du schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Nord Isère, en cours d'élaboration à la date de la décision attaquée, doit être écarté comme inopérant ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les communes d'implantation du projet ne font pas partie du périmètre des SCOT de l'agglomération lyonnaise et de l'agglomération grenobloise ; que dès lors, le moyen tiré de ce que le projet ne serait pas compatible avec les dispositions de ces documents d'urbanisme est également inopérant ;

12. Considérant que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir opposée par le ministre, les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'autorisation accordée par la Commission nationale d'aménagement commercial doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit à la demande présentée à ce titre par la commune de Beauvoir-de-Marc ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Beauvoir-de-Marc le versement à la SCI Vendôme Outlets, à la commune de Villefontaine, à la commune de La Verpillière et au comité de soutien au village de marques d'une somme de 500 euros chacun ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention de la Fédération des groupements commerciaux du Nord Isère est admise.

Article 2 : La requête de la commune de Beauvoir-de-Marc est rejetée.

Article 3 : La commune de Beauvoir-de-Marc versera à la SCI Vendôme Outlets, à la commune de Villefontaine, à la commune de La Verpillière, et au comité de soutien au village de marques la somme de 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Beauvoir-de-Marc, à la SCI Vendôme Outlets, à la Commission nationale d'aménagement commercial, à la commune de Villefontaine, à la commune de La Verpillière, à la Fédération des groupements commerciaux du Nord Isère et au comité de soutien au village de marques.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 361647
Date de la décision : 14/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 14 nov. 2013, n° 361647
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP BOUTET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:361647.20131114
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