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11/06/2014 | FRANCE | N°369994

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 11 juin 2014, 369994


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 juillet et 8 octobre 2013 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B... A..., domicilié ... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11MA04385 du 30 avril 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement n° 0907254 du 29 septembre 2011 du tribunal administratif de Marseille qui avait limité à la somme de 2 044,73 euros tous intérêts confondus la réparation de ses préjudices et, d'autre part, rejeté sa deman

de indemnitaire ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses d...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 juillet et 8 octobre 2013 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B... A..., domicilié ... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11MA04385 du 30 avril 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement n° 0907254 du 29 septembre 2011 du tribunal administratif de Marseille qui avait limité à la somme de 2 044,73 euros tous intérêts confondus la réparation de ses préjudices et, d'autre part, rejeté sa demande indemnitaire ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes indemnitaires ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Marseille la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Tristan Aureau, auditeur,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M.A..., et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la commune de Marseille ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 15 novembre 2007, le maire de Marseille a infligé à M.A..., agent administratif de la commune de Marseille, la sanction de l'exclusion temporaire d'une journée pour mauvaise exécution des tâches qui lui étaient confiées et négligence dans l'exécution de ses missions ; que, par une décision du 18 mars 2008, le maire a prononcé la mutation de M. A... au conservatoire national de région sur un emploi de régisseur ; qu'après avoir annulé, par deux jugements rendus respectivement le 17 novembre 2010 et le 5 mai 2011, la sanction disciplinaire infligée à M A...pour insuffisance de motivation et celle portant mutation de l'intéressé pour discrimination, le tribunal administratif de Marseille, par un jugement du 29 septembre 2011, a condamné la commune à réparer les préjudices subis par M. A... du fait de ces décisions illégales et à lui verser 2 000 euros au titre du préjudice moral et 44,73 euros au titre de la perte de traitement ; que, par un arrêt du 30 avril 2013, dont M. A...demande l'annulation, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et rejeté sa demande ;

Sur le préjudice né de la décision du 18 mars 2008 prononçant la mutation de M. A...:

2. Considérant que l'autorité absolue de la chose jugée par un jugement prononçant une annulation pour excès de pouvoir s'attache non seulement à son dispositif, mais également aux motifs qui en sont le soutien nécessaire ;

3. Considérant que le jugement du 5 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé pour excès de pouvoir la décision de mutation du 18 mars 2008 est fondé sur ce qu'elle " constituait l'exutoire d'une situation caractérisée par des mesures discriminatoires dont l'intéressé a été victime " et qu'elle n'était intervenue " qu'en raison de l'absence de mesures prises par la hiérarchie pour faire cesser les agissements dont il était victime dans son précédent poste " ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Marseille a méconnu l'autorité de chose jugée qui s'attachait à ce jugement définitif en écartant la responsabilité de la commune de Marseille au motif qu'il n'était pas établi que la mutation décidée le 18 mars 2008 manifestait une volonté de discrimination ; que, si la commune demande au Conseil d'Etat de substituer, au motif erroné en droit retenu par la cour, le motif tiré de l'absence de tout lien de causalité entre les préjudices allégués et les fautes invoquées, ce motif, dont l'examen implique l'appréciation de circonstances de fait, ne peut être substitué en cassation au motif retenu dans l'arrêt attaqué ;

Sur le préjudice né de l'incident du 19 juin 2007 et celui issu de la décision du 15 novembre 2007 prononçant la sanction de l'exclusion d'une journée à l'encontre de M. A... :

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...a subi à plusieurs reprises, et notamment le 19 juin 2007, des propos injurieux de la part d'une de ses collègues de travail liés à son orientation sexuelle ; que saisie par l'intéressé le 3 janvier 2008, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, qui est intervenue à l'appui des recours de M. A... devant le juge du fond, a estimé que les décisions successives prises par la commune de Marseille à l'encontre de son agent présentaient un caractère discriminatoire en lien avec l'orientation sexuelle de l'intéressé ; que la sanction infligée le 15 novembre 2007 à M. A...et annulée pour insuffisance de motivation par le tribunal administratif de Marseille le 17 novembre 2010 l'a été sans que la commune ait recherché les motifs des difficultés que M. A...rencontrait dans l'accomplissement de ses tâches ; que la nouvelle sanction identique reprise le 7 mars 2011 par la commune de Marseille a, au demeurant, été également annulée, à raison d'une discrimination illégale, par un jugement du 13 octobre 2011 du même tribunal passé en force de chose jugée ; que, dans ces conditions, en estimant que la sanction infligée le 15 novembre 2007 ne constituait pas une mesure discriminatoire et en en déduisant que la responsabilité de la commune de Marseille n'était pas engagée, la cour administrative d'appel de Marseille a inexactement qualifié les faits de l'espèce ;

5. Considérant qu'il résulte de tout de ce qui précède que M. A... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Marseille la somme de 3 000 euros à verser à M.A..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. A...;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 30 avril 2013 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : La commune de Marseille versera à M. A...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à la commune de Marseille.


Synthèse
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 369994
Date de la décision : 11/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 2014, n° 369994
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Tristan Aureau
Rapporteur public ?: Mme Béatrice Bourgeois-Machureau
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:369994.20140611
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