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30/07/2014 | FRANCE | N°366846

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 30 juillet 2014, 366846


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 mars et 17 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme C...A..., demeurant ... ; Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 30 mai 2012 par laquelle la commission d'avancement prévue à l'article 34 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature a émis un avis défavorable à l'intégration directe de l'intéressée dans la magistrature ;

2°) de mettre à la charge de l'

Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice a...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 mars et 17 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme C...A..., demeurant ... ; Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 30 mai 2012 par laquelle la commission d'avancement prévue à l'article 34 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature a émis un avis défavorable à l'intégration directe de l'intéressée dans la magistrature ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Samuel Gillis, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de Mme A...;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 23 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : " Peuvent être nommés directement aux fonctions du premier grade de la hiérarchie judiciaire:/1° Les personnes remplissant les conditions prévues à l'article 16 et justifiant de dix-sept années au moins d'exercice professionnel les qualifiant particulièrement pour exercer des fonctions judiciaires (...) " ; qu'aux termes de l'article 25-2 de la même ordonnance : " Les nominations au titre des articles 22 et 23 interviennent après avis conforme de la commission prévue à l'article 34 (...) " ; qu'enfin l'article 25 3 dispose : " Les candidats à une intégration au titre des articles 22 et 23 suivent, s'ils sont admis par la commission prévue à l'article 34, une formation probatoire organisée par l'Ecole nationale de la magistrature comportant un stage en juridiction effectué selon les modalités prévues à l'article 19. (...)/Le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature établit, sous la forme d'un rapport, le bilan de la formation probatoire de chaque candidat qu'il adresse au jury prévu à l'article 21. /Après un entretien avec le candidat, le jury se prononce sur son aptitude à exercer des fonctions judiciaires et transmet son avis à la commission prévue à l'article 34. Toute décision de la commission d'avancement défavorable à l'intégration d'un candidat admis à la formation probatoire visée au premier alinéa est motivée (...) " ;

2. Considérant que Mme A...a déposé une demande d'intégration directe dans le corps des magistrats judiciaires sur le fondement de l'article 23 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ; que la commission d'avancement a émis, le 30 mai 2012, un avis défavorable à sa candidature ; que l'intéressée demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le directeur adjoint de l'Ecole nationale de la magistrature, M.B..., a reçu par arrêté du 20 février 2012 du directeur de l'école délégation pour signer les avis relatifs à l'aptitude des auditeurs de justice ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le bilan de la formation probatoire prévue à l'article 21 de l'ordonnance du 23 octobre 1958 aurait été signé par une autorité incompétente manque en fait ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission d'avancement n'est pas assorti de précisions de nature à permettre d'en apprécier le bien-fondé ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'en se bornant à soutenir qu'elle n'aurait pas eu accès au rapport et aux appréciations de stage au vu desquels la commission d'avancement s'est prononcée alors que le garde des sceaux, ministre de la justice, soutient que le bilan du stage probatoire contenant les appréciations de stage lui a été transmis par l'Ecole nationale de la magistrature le 6 mars 2012, que la lettre par laquelle a été communiqué ce rapport, qui est jointe au dossier, invite expressément l'intéressée à présenter ses observations et qu'il est fait état d'une convocation pour un entretien avec le jury, l'intéressée n'établit pas qu'elle a été privée de la possibilité de présenter utilement ses observations sur ses appréciations ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que les auditeurs de justice et les personnes candidates à une intégration directe dans le corps des magistrats judiciaires sont placés dans des situations différentes ; que le moyen tiré d'une rupture d'égalité entre ces catégories de personnes ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que l'intéressée fait valoir que les mauvaises conditions matérielles de déroulement de son stage au parquet du tribunal de grande instance de Senlis ainsi que les préventions de certains magistrats à l'encontre des candidats à l'intégration directe dans le corps ont exercé une influence sur l'appréciation défavorable portée au terme de ce stage et qu'elle a reçu, en revanche, de nombreuses appréciations positives pour ses autres stages, notamment à la Cour d'appel, au tribunal de grande instance et au tribunal d'instance ; que les dispositions de l'article 23 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ne créent aucun droit à l'intégration directe dans le corps des magistrats judiciaires au profit des personnes remplissant les conditions qu'elles énumèrent ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressée aurait fait l'objet d'un traitement discriminatoire lors de son stage au parquet ; que les allégations relatives à des conditions matérielles anormales de déroulement de ce stage ne sont pas étayées par des éléments précis et circonstanciés ; qu'il ressort des évaluations produites que, si la requérante a effectué un bon stage à la cour d'appel et a accompli un stage satisfaisant au tribunal de grande instance et au tribunal d'instance, les avis rendus pour ces deux derniers stages font néanmoins état de difficultés et expriment des réserves ; que l'avis favorable rendu à l'issue du stage au siège pénal mentionne également des difficultés ; que les avis émis sur les stages au parquet, à l'instruction et au tribunal pour enfants soulignent diverses insuffisances, dont certaines sérieuses, et concluent à un avis défavorable ; qu'à la suite du stage auprès de la juridiction de l'application des peines, mentionnant également des insuffisances, il a été émis un avis réservé sur ses aptitudes ; que le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature a émis un avis réservé sur son intégration directe ; que le jury a émis un avis défavorable sur l'aptitude de l'intéressée à exercer des fonctions judiciaires ; qu'ainsi, en émettant, à partir de l'ensemble des éléments qui lui étaient communiqués sur les aptitudes de l'intéressée, un avis défavorable à son intégration dans la magistrature, la commission d'avancement, que le législateur a entendu investir d'un large pouvoir d'appréciation de l'aptitude des candidats à exercer la fonction de magistrat, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande Mme A...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2: La présente décision sera notifiée à Mme C...A...et à la garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 366846
Date de la décision : 30/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2014, n° 366846
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Samuel Gillis
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP THOUIN-PALAT, BOUCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:366846.20140730
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