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12/11/2014 | FRANCE | N°364650

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 12 novembre 2014, 364650


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI la Garenne de Sèvres a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 10 novembre 2008 par laquelle le maire de Paris a exercé le droit de préemption urbain sur l'immeuble situé 51 bis, rue des Epinettes, 88, rue Pouchet et 15, 18 et 20 impasse Deligny à Paris (XVIIème). Par un jugement n° 0900239 du 13 juillet 2011, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 11PA04198 du 18 octobre 2012, la cour administrative d'appel

de Paris a rejeté l'appel formé contre ce jugement par la SCI la Garenne de Sèvre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI la Garenne de Sèvres a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 10 novembre 2008 par laquelle le maire de Paris a exercé le droit de préemption urbain sur l'immeuble situé 51 bis, rue des Epinettes, 88, rue Pouchet et 15, 18 et 20 impasse Deligny à Paris (XVIIème). Par un jugement n° 0900239 du 13 juillet 2011, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 11PA04198 du 18 octobre 2012, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé contre ce jugement par la SCI la Garenne de Sèvres.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 décembre 2012 et 19 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SCI la Garenne de Sèvres demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt n° 11PA04198 de la cour administrative d'appel de Paris du 18 octobre 2012 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Combettes, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, avocat de la SCI la Garenne de Sèvres et à Me Foussard, avocat de la ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 10 novembre 2008, le maire de Paris a préempté un immeuble appartenant à la SCI la Garenne de Sèvres situé 51 bis, rue des Epinettes, 88, rue Pouchet et 15, 18 et 20 impasse Deligny, dans le XVIIème arrondissement, en vue d'y réaliser une opération de création d'une trentaine de logement sociaux. La SCI la Garenne de Sèvres se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 octobre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a confirmé le jugement du tribunal administratif de Paris du 13 juillet 2011 qui rejetait sa demande d'annulation pour excès de pouvoir de cette décision de préemption.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) ". Il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption. En outre, la mise en oeuvre de ce droit doit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien faisant l'objet de l'opération ou au coût prévisible de cette dernière, répondre à un intérêt général suffisant.

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 213-21 du même code, dans sa rédaction applicable à la décision litigieuse : " Le titulaire du droit de préemption doit recueillir l'avis du service des domaines sur le prix de l'immeuble dont il envisage de faire l'acquisition (...) / L'avis du service des domaines doit être formulé dans un délai d'un mois à compter de la date de réception de la demande d'avis. Passé ce délai, il peut être procédé librement à l'acquisition (...) ". Il résulte de ces dispositions que le titulaire du droit de préemption doit avoir connaissance de l'avis du service des domaines, émis dans les conditions de délai précitées, avant d'exercer ce droit.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'appui de son appel, la SCI la Garenne de Sèvres faisait notamment valoir, d'une part, que la ville de Paris n'avait pas eu connaissance, avant de préempter l'immeuble litigieux, de l'avis du service des domaines demandé le 4 novembre 2008 et daté du 7 novembre suivant et, d'autre part, que l'opération envisagée par la ville de Paris ne présentait pas un intérêt général suffisant de nature à justifier légalement l'exercice du droit de préemption. Par suite, en rejetant la requête de la SCI la Garenne de Sèvres sans se prononcer sur ces deux moyens relatifs à la légalité de la décision de préemption du 10 novembre 2008, qui étaient susceptibles d'avoir une incidence sur l'issue du litige, la cour administrative d'appel de Paris a insuffisamment motivé son arrêt.

5. Il résulte de ce qui précède que la SCI la Garenne de Sèvres est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. L'insuffisance de motivation ainsi relevée suffisant à entraîner cette annulation, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres moyens du pourvoi.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la SCI la Garenne de Sèvres, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la ville de Paris, au titre des mêmes dispositions, le versement à la SCI la Garenne de Sèvres d'une somme de 3 000 euros.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 18 octobre 2012 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : La ville de Paris versera à la SCI la Garenne de Sèvres une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la ville de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SCI la Garenne de Sèvres et à la ville de Paris.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 364650
Date de la décision : 12/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 nov. 2014, n° 364650
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe Combettes
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : FOUSSARD ; SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD, POUPOT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:364650.20141112
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