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08/04/2015 | FRANCE | N°375963

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 08 avril 2015, 375963


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er mars et 21 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat unitaire national démocratique des personnels de l'enseignement et de la formation privés (SUNDEP) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2013-1230 du 23 décembre 2013 portant création auprès du ministre chargé de l'éducation nationale du comité consultatif ministériel des maîtres de l'enseignement privé sous contrat ;

2°) de mettre à la cha

rge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er mars et 21 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat unitaire national démocratique des personnels de l'enseignement et de la formation privés (SUNDEP) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2013-1230 du 23 décembre 2013 portant création auprès du ministre chargé de l'éducation nationale du comité consultatif ministériel des maîtres de l'enseignement privé sous contrat ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le code de l'éducation ;

- la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Odinet, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 914-1-2 du code de l'éducation : " Il est institué, auprès du ministre chargé de l'éducation nationale, un comité consultatif ministériel compétent à l'égard des maîtres des établissements d'enseignement privés des premier et second degrés sous contrat. / Ce comité est chargé de connaître des questions relatives aux effectifs, aux emplois et compétences ainsi que des questions d'ordre statutaire intéressant les maîtres des établissements d'enseignement privés des premier et second degrés sous contrat. / Ce comité comprend des représentants de l'administration et des représentants des maîtres mentionnés au premier alinéa. Seuls les représentants des maîtres sont appelés à prendre part aux votes. / Les représentants des maîtres siégeant dans le comité consultatif ministériel sont élus au scrutin de liste avec représentation proportionnelle. L'article 9 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est applicable à cette élection sous réserve que les mots : " organisations syndicales de fonctionnaires " et " union de syndicats de fonctionnaires " s'entendent, respectivement, comme : " organisations syndicales des maîtres des établissements d'enseignement privés des premier et second degrés sous contrat " et " union de syndicats des maîtres des établissements d'enseignement privés des premier et second degrés sous contrat ". / Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent article. " ; que, pour l'application de ces dispositions, le Premier ministre a adopté le décret du 23 décembre 2013 portant création auprès du ministre chargé de l'éducation nationale du comité consultatif ministériel des maîtres de l'enseignement privé sous contrat, qui crée les articles R. 914-13-1 à R. 914-13-39 du code de l'éducation ; que le syndicat requérant demande l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret ;

Sur la légalité externe du décret attaqué :

2. Considérant que l'article 15 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat dispose : " I.- Dans toutes les administrations de l'Etat et dans tous les établissements publics de l'Etat ne présentant pas un caractère industriel ou commercial, il est institué un ou plusieurs comités techniques. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements de l'Etat, pris pour l'application de ces dispositions : " L'organisation générale des comités techniques d'un département ministériel et le mode de désignation des représentants du personnel au sein de ces instances sont fixés après consultation des organisations syndicales représentées au sein du comité technique ministériel de ce département. " ; qu'aux termes de l'article 34 du même décret : " Les comités techniques sont consultés, dans les conditions et les limites précisées pour chaque catégorie de comité par les articles 35 et 36 sur les questions et projets de textes relatifs : / 1° A l'organisation et au fonctionnement des administrations, établissements ou services ; / (...) " ; que son article 35 dispose : " Les comités techniques sont compétents pour examiner les questions intéressant les seuls services au titre desquels ils ont été créés. / (...) " ;

3. Considérant que le décret attaqué fixe les dispositions d'application de l'article L. 914-1-2 du code de l'éducation, qui a institué, auprès du ministre chargé de l'éducation, un comité consultatif ministériel compétent à l'égard des maîtres de l'enseignement privé sous contrat ; que ce comité n'a pas le caractère d'un comité technique au sens de l'article 15 de la loi du 11 janvier 1984 ; que les personnels à l'égard desquels il est compétent exercent leurs fonctions dans des établissements d'enseignement privés liés à l'Etat par contrat, qui ne sont pas des services au titre desquels le comité technique ministériel du ministère chargé de l'éducation nationale est créé ; que, dès lors, ni l'article 2 du décret du 15 février 2011 ni son article 34 n'imposaient de consulter le comité technique ministériel du ministère chargé de l'éducation nationale avant l'adoption du décret attaqué ;

Sur la légalité interne du décret attaqué :

4. Considérant, en premier lieu, que l'absence de représentation des maîtres de l'enseignement privé au comité technique ministériel du ministère chargé de l'éducation nationale ne résulte d'aucune disposition du décret attaqué, mais des dispositions de l'article 15 précité de la loi du 11 janvier 1984 et du décret du 15 février 2011 pris pour son application, qui régissent cette instance ; que dès lors, les moyens tirés de ce que le pouvoir réglementaire aurait méconnu le principe d'égalité, le principe de participation des travailleurs à la détermination de leurs conditions de travail résultant du huitième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et le principe de représentativité en excluant la prise en compte du vote des maîtres de l'enseignement privé pour la désignation des membres du comité technique ministériel du ministère chargé de l'éducation nationale, en excluant la participation de ces agents à ce comité technique et en ne tenant pas compte du vote de ces enseignants pour l'appréciation de la représentativité des organisations syndicales appelées à désigner des représentants siégeant au sein de ce comité technique ne peuvent qu'être écartés ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des termes mêmes de l'article L. 914-1-2 précité du code de l'éducation que le comité consultatif qu'il institue n'est chargé de connaître que des questions relatives aux effectifs, aux emplois et compétences et des questions d'ordre statutaire ; que, dès lors, le syndicat requérant n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que le décret attaqué serait illégal faute de prévoir une compétence du comité consultatif pour connaître des questions relatives à l'organisation du service public de l'enseignement ;

6. Considérant, en troisième lieu, que, d'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en fixant à dix le nombre des représentants du personnel siégeant au comité consultatif institué par l'article L. 914-1-2 du code de l'éducation, le pouvoir réglementaire aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ; que, d'autre part, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'il aurait fixé ce nombre afin de faire en sorte que le syndicat requérant ne puisse être représenté au sein de ce comité consultatif ; qu'enfin, les moyens tirés de ce qu'il aurait, ce faisant, méconnu le principe de pluralisme et le " principe de proportionnalité " ne sont pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'article L. 914-1-2 du code de l'éducation que le comité consultatif qu'il institue est compétent à l'égard de l'ensemble des maîtres des établissements d'enseignement privés des premier et second degrés sous contrat, dont il connaît des questions statutaires ainsi que des questions d'effectifs, d'emplois et de compétences ; que ne peut donc qu'être écarté le moyen tiré de ce que le décret attaqué aurait illégalement inclus, parmi les électeurs chargés de désigner des représentants au sein du comité consultatif, ceux des maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat exerçant, outre leurs fonctions d'enseignement, des fonctions de directeur d'établissement ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que les dispositions de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ne sauraient être regardées comme interdisant la participation des maîtres exerçant des fonctions de directeur d'établissement à l'élection des représentants du personnel siégeant au sein du comité consultatif institué par l'article L. 914-1-2 du code de l'éducation au seul motif qu'ils seraient susceptibles d'être chargés de " missions confessionnelles " ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le syndicat requérant n'est pas fondé à demander l'annulation du décret qu'il attaque ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du syndicat unitaire national démocratique des personnels de l'enseignement et de la formation privés (SUNDEP) est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat unitaire national démocratique des personnels de l'enseignement et de la formation privés (SUNDEP) et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Copie en sera adressée pour information au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 375963
Date de la décision : 08/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 avr. 2015, n° 375963
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guillaume Odinet
Rapporteur public ?: M. Vincent Daumas

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:375963.20150408
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