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10/06/2015 | FRANCE | N°368127

France | France, Conseil d'État, 6ème ssjs, 10 juin 2015, 368127


Vu 1°, sous le n° 368127, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 avril 2013 et 8 juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le syndicat départemental de traitement des déchets ménagers de l'Aisne " Valor'Aisne ", représenté par son président, dont le siège est au ZAC du Griffon, 80, rue Pierre-Gilles de Gennes à Barenton Bugny (02000) ; le syndicat départemental de traitement des déchets ménagers de l'Aisne " Valor'Aisne " demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11DA00615 du 14 février 2

013 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a annulé, à la demand...

Vu 1°, sous le n° 368127, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 avril 2013 et 8 juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le syndicat départemental de traitement des déchets ménagers de l'Aisne " Valor'Aisne ", représenté par son président, dont le siège est au ZAC du Griffon, 80, rue Pierre-Gilles de Gennes à Barenton Bugny (02000) ; le syndicat départemental de traitement des déchets ménagers de l'Aisne " Valor'Aisne " demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 11DA00615 du 14 février 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a annulé, à la demande de l'association " Vivre à Grisolles " et autres, le jugement n° 0802625 du 22 février 2011 du tribunal administratif d'Amiens et l'arrêté du 28 juillet 2008 par lequel le préfet de l'Aisne a accordé au syndicat requérant un permis de construire un centre de traitement et de valorisation de déchets au lieu-dit " La Tuilerie / Arc à Dieu " au hameau de Charme à Grisolles sur les parcelles cadastrées C 84, 85, 86, 87, 88, 90 et 139 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'association " Vivre à Grisolles " et autres le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°, sous le n° 368233, le pourvoi, enregistré le 2 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité ; le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité demande au Conseil d'Etat d'annuler le même arrêt que celui contesté sous le n° 368127 ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Baptiste de Froment, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Coutard, Munier-Apaire avocat du syndicat départemental de traitement des déchets ménagers de l'Aisne " Valor'Aisne ", et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'association " Vivre à Grisolles " et autres ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 28 juillet 2008, le préfet de 1'Aisne a délivré au syndicat départemental de traitements des déchets ménagers et assimilés " Valor'Aisne " un permis de construire en vue de la réalisation, sur le territoire de la commune de Grisolles, des locaux industriels et des bureaux d'un centre de traitement et de valorisation de déchets non dangereux, pour une surface hors-oeuvre nette d'environ 1 100 m2 ; que par un jugement du 22 février 2011, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande de l'association " Vivre à Grisolles " et de plusieurs personnes physiques tendant à l'annulation de cet arrêté ; que, par un arrêt du 14 février 2013, contre lequel le syndicat " Valor'Aisne ", sous le numéro 368127, et la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, sous le numéro 368233, se pourvoient en cassation la cour administrative d'appel de Douai a annulé ce jugement pour irrégularité de la procédure juridictionnelle, puis, après avoir évoqué l'affaire, a annulé le permis litigieux en se fondant sur deux moyens tirés, d'une part, de l'insuffisance de l'étude d'impact réalisée au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement et, d'autre part, de l'irrégularité de l'avis émis par un adjoint au maire en application des dispositions des articles L. 421-2-1 et R. 421-26 du code de l'urbanisme ;

2. Considérant que les pourvois nos 368127 et 368233 du syndicat départemental de traitement des déchets ménagers de l'Aisne " Valor'Aisne " et du ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sont dirigés contre le même arrêt ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

3. Considérant que la cour administrative d'appel n'a entaché son arrêt d'aucune insuffisance de motivation en accueillant les moyens tirés de l'irrégularité du jugement du tribunal administratif et de l'avis mentionné ci-dessus, ainsi que du caractère insuffisant de l'étude d'impact ;

Sur le bien fondé de l'arrêt attaqué :

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un mémoire enregistré le 18 janvier 2011 au greffe du tribunal administratif d'Amiens, avant l'audience publique du 25 janvier 2011, l'association " Vivre à Grisolles " et autres ont présenté un moyen et des conclusions nouveaux par rapport à N...précédents mémoires ; qu'en estimant que la circonstance que ce mémoire n'avait été ni visé ni communiqué aux parties, alors même que l'instruction a été ensuite rouverte, a entaché d'irrégularité le jugement du tribunal administratif, la cour n'a ni commis d'erreur de droit ni entaché son arrêt de dénaturation ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'en jugeant que le tribunal administratif avait entaché son jugement d'une autre irrégularité, dès lors qu'il s'était fondé sur le contenu d'un courrier de la direction départementale des affaires sociales du 2 août 2007 produit dans la note en délibéré du 28 janvier 2011, sans communiquer cette dernière ni rouvrir l'instruction, la cour n'a ni commis d'erreur de droit, ni dénaturé les pièces du dossier ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme, le permis de construire a pour objet de vérifier que les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de N...abords ; que l'article R. 421-2 du même code dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, dispose que : " A. Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte :/ (...) / 8° L'étude d'impact, lorsqu'elle est exigée ; (...) " ; que les articles R. 122-5 à R. 122-10 du code de l'environnement, dans leur rédaction en vigueur à la date de l'arrêté litigieux, dressent la liste des aménagements, ouvrages et travaux soumis à étude d'impact, notamment lorsqu'ils sont subordonnés à la délivrance d'un permis de construire ;

7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'obligation de joindre l'étude d'impact au dossier de demande de permis de construire prévue par l'article R. 421-2, devenu l'article R. 432-16 du code de l'urbanisme, ne concerne que les cas où l'étude d'impact est exigée en vertu des dispositions du code de l'environnement pour des projets soumis à autorisation en application du code de l'urbanisme ; que, par suite, en se fondant, pour annuler le permis attaqué, sur l'insuffisance de l'étude d'impact réalisée au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement qui était jointe au dossier, sans rechercher si celle-ci était également exigée au titre des projets soumis à autorisation en application du code de l'urbanisme, la cour a méconnu, au prix d'une erreur de droit, la portée de ces dispositions ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 421-2-1 du code de l'urbanisme : " Sont (...) délivrés ou établis, au nom de l'Etat, par le maire ou le représentant de l'Etat dans le département après avis du maire ou du président de l'établissement public compétent, les autorisations ou actes relatifs à l'utilisation et à l'occupation du sol concernant : / a) Les constructions, installations ou travaux réalisés pour le compte de l'Etat, de la région, du département, de N...établissements publics et concessionnaires ainsi que pour le compte d'Etats étrangers ou d'organisations internationales ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-26 du même code : " Le maire fait connaître son avis au responsable du service de l'Etat dans le département, chargé de l'urbanisme qui le communique, s'il est défavorable, au préfet. Cet avis est réputé favorable s'il n'est pas intervenu dans le mois de la réception de la demande. Il doit être dûment motivé s'il est défavorable, ou si, favorable, il est assorti d'une demande de prescriptions particulières. " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints (...) " ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 14 décembre 2001, le maire de Grisolles a donné délégation à deux de ses adjoints, dont MmeBN..., auteur de l'avis litigieux, pour " délivrer tous certificats et signer toutes pièces de la comptabilité communale, tous actes administratifs " ; qu'en estimant que cet arrêté ne définissait pas avec une précision suffisante les limites de la délégation ainsi accordée à Mme BN...et en déduisant qu'il était intervenu en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, qui n'autorisent la délégation que d'une partie des attributions du maire, la cour n'a commis ni erreur de qualification juridique ni erreur de droit ; qu'elle n'a pas non plus commis d'erreur de droit en jugeant que l'illégalité de cette délégation était susceptible d'entacher d'irrégularité l'avis émis par Mme BN...en application des dispositions des articles L. 421-2-1 et R. 421-26 du code de l'urbanisme ;

10. Considérant qu'en jugeant qu'une telle irrégularité, qui est relative à la compétence de l'auteur de l'avis ainsi émis, était susceptible, dans les circonstances de l'espèce, d'avoir eu une incidence sur le contenu de l'avis ainsi rendu au nom du maire ainsi que sur le sens de la décision litigieuse, la cour n'a entaché son arrêt ni d'une erreur de droit ni d'une dénaturation des faits de la cause ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'un des deux motifs retenus par la cour pour faire droit aux conclusions de l'association " Vivre à Grisolles " et autres justifie légalement le dispositif d'annulation de l'arrêt attaqué ; que, par suite, le syndicat " Valor'Aisne " et le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'association " Vivre à Grisolles " et de MM.X..., BJ..., BQ...et R...et CG...BG...BM..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat, d'une part, la somme de 1 500 euros à verser à l'association " Vivre à Grisolles " et, d'autre part, la somme globale de 1 500 euros à verser à MM. X...et autres au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les pourvois du syndicat départemental de traitement des déchets ménagers de l'Aisne " Valor'Aisne " et du ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sont rejetés.

Article 2 : L'Etat versera, d'une part, la somme de 1 500 euros à l'association " Vivre à Grisolles " et, d'autre part, la somme globale de 1 500 euros à MM.X..., BJ..., BQ...et R...et à Mme BG...BM...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au syndicat départemental de traitement des déchets ménagers de l'Aisne " Valor'Aisne ", à la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité et à l'association " Vivre à Grisolles ", premier défendeur dénommé. Les autres défendeurs seront informés de la présente décision par la SCP Piwnica et Molinié, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.

Copie en sera adressée à M. G...-CF...BC..., à Mme BT...BC..., à M. AL...AQ..., à Mme AY...AQ..., à Mme BK...CD..., à M. AX...AD..., à M. Q...P..., à Mme CA...P..., à M. E...N..., à Mme BT...N..., à Mme BP...BD..., à M. BF...BD..., à Mme BZ...CC..., à M. BL...CC..., à Mme AT...L..., à M. S...L..., à Mme BW...L..., à Mme AO...BR..., à M. AL...BY..., à Mme C...BS..., à M. AA...U..., à M. AF...BU..., à Mme BX...AK..., à Mme CA...D..., à M. BF...W..., à Mme B...BB..., à M. J...AE..., à Mme AS...AE..., à Mme AP...AH..., à Mme BA...BV..., à M. E...BV..., à Mme AR...AM..., à M. AB...K..., à Mme BH...K..., à Mme T...I..., à M. H... I..., à Mme CE...AJ..., à Mme BG...AN..., à M. AC...BB..., à M. AU... AG..., à Mme Y...AG..., à M. AZ...A..., à M. G...O..., à Mme B...A..., à Mme CB...AW..., à Mme AV...AI..., à M. BE...AI..., à M. V...F..., à Mme B...F..., à M. BO...M..., à Mme Z...M...et à M. AL...BI....


Synthèse
Formation : 6ème ssjs
Numéro d'arrêt : 368127
Date de la décision : 10/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 10 jui. 2015, n° 368127
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste de Froment
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:368127.20150610
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