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29/06/2015 | FRANCE | N°387338

France | France, Conseil d'État, 4ème ssjs, 29 juin 2015, 387338


Vu la procédure suivante :

Par un mémoire, enregistré le 3 juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, Mme B...A...demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'arrêt n° 13NT01419 du 9 octobre 2014 de la cour administrative d'appel de Nantes, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 1226-2 du code du travail.

Elle soutient que ces disposi

tions, telles qu'interprétées par le Conseil d'Etat et la Cour de Cassat...

Vu la procédure suivante :

Par un mémoire, enregistré le 3 juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, Mme B...A...demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'arrêt n° 13NT01419 du 9 octobre 2014 de la cour administrative d'appel de Nantes, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 1226-2 du code du travail.

Elle soutient que ces dispositions, telles qu'interprétées par le Conseil d'Etat et la Cour de Cassation, sont applicables au litige et méconnaissent, entre les salariés protégés et les salariés non-protégés, le principe d'égalité garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ainsi que les principes de liberté syndicale et de participation des travailleurs à la détermination collective de leurs conditions de travail, résultant respectivement des sixième et huitième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- l'article L. 1226-2 du code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Orban, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de Mme A...et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor avocat de la société Broceliande-ALH ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail " ;

3. Considérant, en premier lieu, que Mme A...soutient que les dispositions de cet article méconnaissent le principe d'égalité garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 au motif qu'il en serait fait des applications différentes pour les salariés protégés et non protégés, en raison des interprétations divergentes qu'en donneraient, de manière constante, les jurisprudences administrative et judiciaire ; que toutefois les divergences alléguées ne portent pas sur la manière d'apprécier l'obligation fixée à cet article, mais sur l'existence, lorsque l'employeur s'est acquitté de cette obligation, d'obligations supplémentaires de recherches de reclassement, au sein de l'entreprise et du groupe qui pèseraient néanmoins sur lui ; qu'ainsi, et en tout état de cause, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que l'article L. 1226-2 du code du travail méconnaît le principe d'égalité devant la loi ;

4. Considérant, en second lieu, que la circonstance que le juge administratif n'imposerait pas à l'employeur d'un salarié protégé déclaré inapte à son emploi d'autres obligations de reclassement que celle fixée par les dispositions de l'article L. 1226-2 du code du travail ne caractérise, en tout état de cause, aucune atteinte portée par ces dispositions à la liberté syndicale ou au principe de participation des travailleurs à la détermination collective de leurs conditions de travail, résultant respectivement des sixième et huitième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 ;

5. Considérant, par suite, que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que l'article L. 1226-2 du code du travail porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être regardé comme non sérieux ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme A....

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A..., à la société Broceliande-ALH et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 4ème ssjs
Numéro d'arrêt : 387338
Date de la décision : 29/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2015, n° 387338
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe Orban
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR

Origine de la décision
Date de l'import : 17/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:387338.20150629
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