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30/11/2015 | FRANCE | N°382362

France | France, Conseil d'État, 4ème ssjs, 30 novembre 2015, 382362


Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire en réplique et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 8 juillet et 21 novembre 2014, et les 14 avril et 3 juillet 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. E... B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la décision du 24 avril 2014 par laquelle le comité de sélection de l'Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon l'a classé en deuxième position sur la liste des candidats au concours de recrutement d'un professeur des universités dans la spé

cialité " management de l'énergie et énergétique des systèmes solaires " et,...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire en réplique et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 8 juillet et 21 novembre 2014, et les 14 avril et 3 juillet 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. E... B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la décision du 24 avril 2014 par laquelle le comité de sélection de l'Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon l'a classé en deuxième position sur la liste des candidats au concours de recrutement d'un professeur des universités dans la spécialité " management de l'énergie et énergétique des systèmes solaires " et, d'autre part, la décision du conseil d'administration restreint du 22 mai 2014 par laquelle le conseil d'administration restreint de l'INSA de Lyon a refusé de proposer sa nomination sur ce poste ;

2°) d'enjoindre à l'autorité compétente d'organiser un nouveau concours ;

3°) de mettre à la charge de l'INSA de Lyon la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;

- la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-20/21 QPC du 6 août 2010 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Orban, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 952-6-1 du code de l'éducation, telles qu'elles ont été interprétées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 6 août 2010 les déclarant conformes à la Constitution, que, pour le recrutement d'un enseignant-chercheur, le comité de sélection, après avoir dressé la liste des candidats qu'il souhaite entendre puis procédé à leur audition, choisit, en sa qualité de jury, ceux des candidats présentant des mérites, notamment scientifiques, suffisants, et, le cas échéant, les classe selon l'ordre de leurs mérites respectifs ; que, par un avis motivé unique portant sur l'ensemble des candidats, il transmet au conseil d'administration la liste de ceux qu'il a retenus, le conseil d'administration ne pouvant ensuite proposer au ministre chargé de l'enseignement supérieur la nomination d'un candidat non sélectionné par le comité ; que le conseil d'administration, siégeant dans une formation restreinte aux enseignants-chercheurs et personnels assimilés de rang au moins égal à celui de l'emploi à pourvoir, prend, au vu de la délibération du comité de sélection, une délibération propre par laquelle il établit sa proposition ; que, dans l'exercice de telles compétences, il incombe au conseil d'administration d'apprécier l'adéquation des candidatures au profil du poste et à la stratégie de l'établissement, sans remettre en cause l'appréciation des mérites scientifiques des candidats retenus par le comité de sélection ; qu'en outre, la décision du conseil d'administration, eu égard à la nature et aux attributions de cet organisme, dans le cadre de la procédure de recrutement définie par le législateur, doit être motivée lorsqu'il ne reprend pas les propositions du comité de sélection ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, en vue du recrutement d'un professeur des universités sur un emploi correspondant au profil " Management de l'énergie - énergétique des systèmes solaires " qui était ouvert, au titre du 1° de l'article 46 du décret du 6 juin 1984 relatif au statut des enseignants-chercheurs, aux candidats titulaires d'une habilitation à diriger des recherches, le comité de sélection constitué au sein de l'Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon, après avoir auditionné trois candidats, a émis un avis favorable sur les trois candidatures, celle du requérant étant retenue en deuxième position, derrière celle de M.D... ; que le conseil d'administration de l'INSA, par une délibération du 22 mai 2014, a décidé de proposer au ministre chargé de l'enseignement supérieur la nomination de M. D..., candidat classé en première position par le comité de sélection ; que M. B...demande l'annulation pour excès de pouvoir de ces décisions du comité de sélection et du conseil d'administration de l'INSA ;

Sur la décision du comité de sélection :

3. Considérant, en premier lieu, que le 2e alinéa de l'article L. 952-6-1 du code de l'éducation prévoit que les membres du comité de spécialistes " sont choisis en raison de leurs compétences, en majorité parmi les spécialistes de la discipline en cause " ; que, contrairement à ce que soutient M.B..., il ressort des pièces du dossier que onze des douze membres du comité de sélection étaient des spécialistes en " énergétique " dont relevait le poste ouvert au concours ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le comité de spécialistes aurait été irrégulièrement composé au regard des exigences de l'article L. 952-6-1 ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la seule circonstance qu'un membre d'un jury d'examen professionnel connaisse un candidat ne suffit pas à justifier qu'il s'abstienne de participer aux délibérations qui concernent ce candidat ; qu'en revanche, le respect du principe d'impartialité exige que s'abstienne de participer, de quelque manière que ce soit, aux interrogations et aux délibérations qui concernent un candidat, un membre du jury qui aurait avec celui-ci des liens, tenant à la vie personnelle ou aux activités professionnelles, qui seraient de nature à influer sur son appréciation ; qu'en outre, un membre du jury qui a des raisons de penser que son impartialité pourrait être mise en doute ou qui estime, en conscience, ne pas pouvoir participer aux délibérations avec l'impartialité requise, peut également s'abstenir de prendre part aux interrogations et aux délibérations qui concernent un candidat ; qu'en dehors de ces hypothèses, il incombe aux membres des jurys d'examen de siéger dans les jurys auxquels ils ont été nommés en application de la réglementation applicable ;

5. Considérant que le requérant soutient que des liens professionnels et personnels existant entre M. D...et l'un des membres du comité de sélection, par ailleurs directeur du laboratoire dans lequel se trouvait le poste à pourvoir, M. C..., empêchaient ce dernier de siéger régulièrement dans ce jury ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que les liens noués entre MM. D...et C...dans le cadre professionnel sont à la fois anciens et peu nombreux ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que MM. D...et C...auraient été liés, ainsi qu'il est soutenu, par des liens de " profonde amitié " ; qu'enfin, les circonstances, d'une part, que les institutions où l'un et l'autre travaillaient en 2013 avaient conclu un partenariat et, d'autre part, que la mère de M. D...avait siégé dans le jury ayant apprécié, en 2004, la valeur de M. C...en vue de la délivrance de son habilitation à diriger des recherches ne sauraient davantage être regardées, par elles-mêmes, comme étant de nature à influer sur l'appréciation portée par M. C...sur la candidature de M.D... ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la participation de M. C...au comité de sélection aurait été irrégulière en raison de son manque d'impartialité à l'égard de ce candidat doit être écarté ;

Sur la décision du conseil d'administration :

6. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le conseil d'administration de l'INSA, en retenant la candidature classée en première position par le comité de spécialistes, aurait porté sur l'adéquation de cette candidature au profil du poste et à la stratégie de l'établissement une appréciation erronée ; que si M. B...fait valoir que la fiche de poste fait une part excessive à l'enseignement et que des chercheurs d'un groupe de travail au sein du laboratoire dans lequel se trouve le poste ouvert au concours auraient adressé un courrier au directeur de l'INSA s'étonnant du choix de la personne retenue, ces circonstances ne sont pas de nature, en l'espèce, à révéler une appréciation erronée de la part du conseil d'administration ;

7. Considérant que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par l'INSA de Lyon, M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions attaquées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'INSA de Lyon qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...le versement à l'INSA de Lyon d'une somme de 1 500 euros au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : M. B...versera à l'INSA de Lyon une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. E... B..., à l'Institut national des sciences appliquées de Lyon et à M. A... D....

Copie en sera adressée à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : 4ème ssjs
Numéro d'arrêt : 382362
Date de la décision : 30/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 nov. 2015, n° 382362
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe Orban
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:382362.20151130
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