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05/05/2017 | FRANCE | N°403882

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 05 mai 2017, 403882


Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse de suspendre l'exécution de la décision du 28 avril 2016 par laquelle La Poste l'a révoquée de ses fonctions, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision et d'enjoindre à La Poste de la réintégrer sans délai dans un poste de guichetière confirmée sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le mois suivant la notification de la décision à intervenir.

Par une ordonnance n° 1603745 du 12 septembre 2016, le juge des réf

érés du tribunal administratif a suspendu l'exécution de la décision du 28 avril 20...

Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse de suspendre l'exécution de la décision du 28 avril 2016 par laquelle La Poste l'a révoquée de ses fonctions, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision et d'enjoindre à La Poste de la réintégrer sans délai dans un poste de guichetière confirmée sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le mois suivant la notification de la décision à intervenir.

Par une ordonnance n° 1603745 du 12 septembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif a suspendu l'exécution de la décision du 28 avril 2016 et enjoint à La Poste de réintégrer à titre provisoire Mme A...dans le délai d'un mois suivant la notification de l'ordonnance.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 29 septembre 2016 et 13 avril 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, La Poste demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de suspension présentée par Mme A... ;

3°) de mettre à la charge de Mme A...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-631 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-11 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Haas, avocat de La Poste SA, et à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de Mme A...;

1. Considérant que la société La Poste demande l'annulation de l'ordonnance du 12 septembre 2016 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a, sur la demande de Mme B...A..., suspendu l'exécution de la décision du 28 avril 2016 du président directeur général de La Poste qui avait prononcé la révocation de l'intéressée ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le président directeur général de la Poste a, après consultation du conseil de discipline, prononcé le 28 avril 2016 la sanction de la révocation à l'encontre de MmeA..., agent technique de gestion de second niveau aux motifs de détournement de fonds, commis en récidive, d'un montant de 7 100 euros dans la caisse du bureau, falsification de la situation de caisse et des données comptables d'un distributeur de billets et attitude dilatoire en cours d'enquête ; que les faits à l'origine des poursuites ont été constatés le 13 janvier 2015 lors du rechargement d'un distributeur automatique de billets puis ont fait l'objet d'une enquête du service national d'enquêtes saisi le 17 mars 2015 qui a rendu ses conclusions le 8 juillet 2015 ; que l'intéressée a fait l'objet d'une mesure de suspension le 18 août 2015 ;

Sur la condition d'urgence :

3. Considérant que pour juger que la condition d'urgence était remplie, le juge des référés a retenu que Mme A...élevait seule ses quatre enfants dont deux étudiantes, une lycéenne et une collégienne ; qu'il n'était ni établi ni même allégué qu'elle aurait des chances sérieuses de retrouver un emploi alors qu'elle avait été recrutée en 1982 et titularisée en 1988 et qu'elle était privée de sa rémunération depuis juin 2016, La Poste lui versant une indemnité de chômage depuis la fin août ; qu'en statuant ainsi, alors même que plusieurs mois, s'étaient écoulés entre l'introduction de la requête au fond et le dépôt de la demande de suspension, le juge des référés n'a ni insuffisamment motivé son ordonnance ni commis d'erreur de droit ;

Sur le sérieux des moyens :

4. Considérant que le juge des référés a relevé qu'en l'état de l'instruction il n'existait aucune preuve matérielle que Mme A...ait détourné 7 100 euros lors du rechargement qu'elle a effectué, le 9 janvier 2015, du distributeur automatique de billets extérieur du bureau de poste où elle était affectée, et que les conclusions de l'enquête interne, engagée tardivement le 2 avril 2015 et réalisée sur la base des seules auditions de Mme A...et de son aide-caissier, en l'absence d'exploitation des bandes de vidéo surveillance et d'éléments objectifs déterminant les rôles exacts de chacune de personnes présentes dans le bureau de poste, ne sauraient suffire à établir la culpabilité de MmeA..., eu égard aux incertitudes qui ressortaient, d'une part, du débat devant le conseil de discipline lequel n'a abouti à aucune proposition de sanction, et, d'autre part, de ce que La Poste n'a déposé plainte que le 11 août 2015 et n'a donné aucun élément sur l'état d'avancement de la procédure pénale ; qu'en jugeant, au vu de ces constatations, qu'était, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée, le moyen tiré de ce que la matérialité des faits reprochés à Mme A...n'était pas établie, le juge des référés s'est livré, dans le cadre de son office, à une appréciation souveraine des circonstances de l'espèce exempte de dénaturation ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de La Poste doit être rejeté y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que Mme A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de Mme A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de La Poste la somme de 3 000 euros à verser à cette société ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de La Poste est rejeté.

Article 2 : La Poste versera à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de Mme A..., une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à La Poste et à Mme B...A....


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 403882
Date de la décision : 05/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 mai. 2017, n° 403882
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: M. Xavier Domino
Avocat(s) : HAAS ; SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:403882.20170505
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