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17/11/2017 | FRANCE | N°414999

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 17 novembre 2017, 414999


Vu la procédure suivante :

Par un recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 12 octobre 2017, la ministre des solidarités et de la santé demande au juge des référés du Conseil d'Etat qu'il soit mis fin, sur le fondement de l'article L. 521-4 du code de justice administrative, à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 24 mars 2017 portant radiation de produits au titre I de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, en tant que cet arrêté concerne les dispositifs médicau

x OSTENIL et ARTHRUM, que le juge des référés du Conseil d'Etat, statuan...

Vu la procédure suivante :

Par un recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 12 octobre 2017, la ministre des solidarités et de la santé demande au juge des référés du Conseil d'Etat qu'il soit mis fin, sur le fondement de l'article L. 521-4 du code de justice administrative, à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 24 mars 2017 portant radiation de produits au titre I de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, en tant que cet arrêté concerne les dispositifs médicaux OSTENIL et ARTHRUM, que le juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a prononcée par deux ordonnances n° 409570 et n° 409983 des 12 et 24 mai 2017.

La ministre soutient que la publication de deux arrêtés du 9 octobre 2017 portant radiation, à compter du 1er décembre 2017, de la spécialité HYALGAN de la liste des spécialités remboursables prévue au premier alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale et de la liste des médicaments agréés à l'usage des collectivités publiques mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique constitue un élément nouveau de nature à lever le doute sérieux qui avait conduit à la suspension de l'arrêté du 24 mars 2017, en ce qu'elle a pour effet de mettre un terme à la différence de situation, en termes de remboursement par l'assurance maladie, existant entre la spécialité HYALGAN et les solutions d'acide hyaluronique ayant le statut de dispositif médical.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 novembre 2017, la société TRB Chemedica conclut au rejet du recours. Elle soutient, d'une part, que ce recours est irrecevable dès lors que l'adjoint au directeur des affaires juridiques du ministère des solidarités et de la santé n'était pas compétent pour signer le mémoire tendant à la levée de la suspension prononcée par le juge des référés, d'autre part, qu'aucun des moyens soulevés par la ministre des solidarités et de la santé n'est fondé et, enfin, que la condition d'urgence est remplie et que les moyens soulevés dans sa requête n° 409570, qu'elle reprend et développe, sont de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 novembre 2017, la société LCA SA conclut au rejet du recours et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient, d'une part, que la situation d'urgence reconnue par le juge des référés du Conseil d'Etat dans l'ordonnance du 24 mai 2017 persiste, d'autre part, qu'aucun des moyens soulevés par la ministre des solidarités et de la santé n'est fondé et, enfin, que les moyens soulevés dans sa requête n° 409983, qu'elle reprend et développe, sont de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- l'arrêté du 9 octobre 2017 portant radiation d'une spécialité pharmaceutique de la liste des médicaments agréés à l'usage des collectivités publiques prévue à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique ;

- l'arrêté du 9 octobre 2017 portant radiation d'une spécialité pharmaceutique de la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la ministre des solidarités et de la santé et, d'autre part, les sociétés TRB Chemedica, LCA SA et Laboratoires Expanscience et la Haute autorité de la santé ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du mardi 7 novembre 2017 à 14 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- les représentants de la ministre des solidarités et de la santé ;

- Me Lyon-Caen, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société TRB Chemedica ;

- les représentants de la société TRB Chemedica ;

- Me Monod, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société LCA SA ;

- les représentants de la société LCA SA ;

- Me Molinié, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société Laboratoires Expanscience ;

- le représentant de la société Laboratoires Expanscience ;

- les représentants de la Haute autorité de la santé ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". Aux termes de l'article L. 521-4 du code de justice administrative : " Saisi par toute personne intéressée, le juge des référés peut, à tout moment, au vu d'un élément nouveau, modifier les mesures qu'il avait ordonnées ou y mettre fin ".

2. Par deux ordonnances n° 409570 du 12 mai 2017 et n° 409983 du 24 mai 2017, le juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution de l'arrêté du 24 mars 2017 portant radiation de produits au titre I de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, en tant que cet arrêté concerne respectivement les dispositifs médicaux OSTENIL et ARTHRUM. La ministre des solidarités et de la santé demande au juge des référés, sur le fondement de l'article L. 521-4 du code de justice administrative, de mettre fin à cette suspension en raison d'éléments nouveaux.

Sur la recevabilité du recours :

3. Il résulte du 2° de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 visé ci-dessus que les chefs de services et directeurs adjoints sont habilités à signer, au nom de leur ministre, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires placées sous leur autorité. Il en résulte que M. B...A..., nommé par arrêté du 11 août 2017 chef de service, adjoint au directeur des affaires juridiques à l'administration centrale des ministères sociaux, était, en tout état de cause, habilité à signer le présent recours au nom de la ministre des solidarités et de la santé.

Sur le bien-fondé du recours :

4. Le juge des référés du Conseil d'Etat a prononcé les suspensions querellées au motif que, d'une part, les sociétés TRB Chemedica et LCA SA justifiaient d'une situation d'urgence et que, d'autre part, l'arrêté du 24 mars 2017 ayant procédé à la radiation des dispositifs médicaux OSTENIL et ARTHRUM de la liste des produits remboursables prévue par l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale alors que la spécialité concurrente HYALGAN, qui a la même composition et un effet thérapeutique identique, restait inscrite sur la liste des médicaments remboursables, le moyen tiré de ce que cet arrêté portait une atteinte illégale aux règles de concurrence était propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à sa légalité. Compte tenu de l'intervention des arrêtés du 9 octobre 2017 visés ci-dessus, lesquels ont radié à compter du 1er décembre 2017 la spécialité HYALGAN de la liste des spécialités remboursables prévue au premier alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale et de la liste des médicaments agréés à l'usage des collectivités publiques mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique, le moyen ainsi retenu n'est plus susceptible de justifier, à compter du 1er décembre 2017, la suspension de l'arrêté du 24 mars 2017.

5. S'agissant du produit OSTENIL, la circonstance que le Professeur Dubernard, président de la Commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDIMTS), a été placé en situation de conflit d'intérêts lors de la réunion du 19 novembre 2013 au cours de laquelle un avis a été rendu sur ce dispositif médical, ce qui a conduit au retrait de cet avis, n'impliquait par elle-même ni que les avis rendus avant sa nomination comme président soient viciés ni que, lorsque la commission s'est réunie à nouveau sous une nouvelle présidence le 21 avril 2015, l'impartialité des autres membres ait été entachée. Le moyen tiré de ce que l'avis du 21 avril 2015 aurait été rendu en méconnaissance du principe d'impartialité n'est, par suite, pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée. D'autre part, au vu du résumé de plusieurs " méta-analyses " qui figure dans cet avis de la commission, et nonobstant la circonstance que celle-ci a in fine estimé non valide une étude de la société TRB Chemedica dont elle avait, selon l'entreprise, initialement approuvé la méthode, le moyen tiré de ce que les auteurs de l'arrêté attaqué auraient commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant le service rendu par OSTENIL insuffisant pour justifier un remboursement n'est pas davantage, en l'état de l'instruction, de nature à créer un tel doute. Par ailleurs, aucun des autres moyens soulevés dans la requête n° 409570 et développés dans le cadre de la présente requête n'est de nature, en l'état, à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté attaqué en tant qu'il concerne OSTENIL.

6. S'agissant du produit ARTHRUM, le moyen tiré de ce que l'avis du 7 avril 2015 de la CNEDIMTS aurait été rendu en méconnaissance du principe d'impartialité n'est, pour les raisons indiquées au point précédent, pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée. D'autre part, au vu du résumé de plusieurs " méta-analyses " qui figure dans cet avis de la commission, et alors même que l'administration a refusé d'examiner deux études produites par la société LCA SA en juillet 2015, le moyen tiré de ce que les auteurs de l'arrêté attaqué auraient commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant le service rendu par ARTHRUM insuffisant pour justifier un remboursement n'est pas davantage, en l'état de l'instruction, de nature à créer un tel doute. Par ailleurs, aucun des autres moyens soulevés dans la requête n° 409983 et développés dans le cadre de la présente requête n'est de nature, en l'état, à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté attaqué en tant qu'il concerne ARTHRUM.

7. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de mettre fin, à compter du 1er décembre 2017, aux mesures de suspension de l'arrêté du 24 mars 2017 prononcées les 12 et 24 mai 2017.

8. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à sa charge sur ce fondement au profit de la société LCA SA.

O R D O N N E :

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Article 1er : Il est mis fin à compter du 1er décembre 2017 aux mesures de suspension prononcées par les ordonnances n° 409570 du 12 mai 2017 et n° 409983 du 24 mai 2017 du juge des référés du Conseil d'Etat.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société LCA SA sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la ministre des solidarités et de la santé, à la société TRB Chemedica, à la société LCA SA, à la société Laboratoires Expanscience et à la Haute autorité de la santé.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 414999
Date de la décision : 17/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 nov. 2017, n° 414999
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SCP MONOD, COLIN, STOCLET ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:414999.20171117
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