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03/10/2018 | FRANCE | N°416040

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 03 octobre 2018, 416040


Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler les décisions implicites par lesquelles le Premier ministre a rejeté ses demandes, formulées par courriers du 30 mars 2012, tendant à ce que lui soient attribués des noms de domaine relevant de la racine " e164.arpa ", d'autre part, d'enjoindre au Premier ministre de lui attribuer les noms de domaine sollicités sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard. Par un jugement n° 1306089/5-3 du 8 avril 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 15PA02273 du 26 septembre 2017, la cour administrativ...

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler les décisions implicites par lesquelles le Premier ministre a rejeté ses demandes, formulées par courriers du 30 mars 2012, tendant à ce que lui soient attribués des noms de domaine relevant de la racine " e164.arpa ", d'autre part, d'enjoindre au Premier ministre de lui attribuer les noms de domaine sollicités sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard. Par un jugement n° 1306089/5-3 du 8 avril 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 15PA02273 du 26 septembre 2017, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. A...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 27 novembre 2017 et 28 février 2018, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code des postes et des communications électroniques ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Clément Malverti, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier, de La Varde, Buk Lament, Robillot, avocat de M.A...,

Vu la note en délibéré, enregistrée le 1er octobre 2018, présentée par M.A... ;

1. Considérant que, par plusieurs courriers du 30 mars 2012, M. A...a demandé au Premier ministre de lui attribuer des noms de domaines relevant de l'extension " e164.arpa ", qui constitue la racine correspondant au standard " ENUM " (Telephon Number Mapping) permettant de convertir un numéro de téléphone en un nom de domaine sur internet ; que, par un jugement du 8 avril 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus implicite que lui a opposé le Premier ministre ; que, par un arrêt du 26 septembre 2017, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par M. A...contre ce jugement ; que M. A...se pourvoit en cassation contre cet arrêt ; qu'à l'appui de son pourvoi, il fait valoir que les dispositions des articles L. 45 et L. 45-1 du code des postes et des communications électroniques sont entachées d'une incompétence négative qui affecte le droit de propriété, la liberté de communication des pensées et des opinions, la liberté d'entreprendre et le principe d'égalité des citoyens devant la loi ;

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat ou la Cour de cassation (...). Le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité dès lors que les conditions prévues aux 1° et 2° de l'article 23-2 sont remplies et que la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 45 du code des postes et communications électroniques : " L'attribution et la gestion des noms de domaine rattachés à chaque domaine de premier niveau du système d'adressage par domaines de l'internet correspondant aux codes pays du territoire national ou d'une partie de celui-ci sont centralisées par un organisme unique dénommé " office d'enregistrement ". / Le ministre chargé des communications électroniques désigne, par arrêté, l'office d'enregistrement de chaque domaine, après consultation publique, pour une durée fixée par voie réglementaire. / Chaque office d'enregistrement établit chaque année un rapport d'activité, qu'il transmet au ministre chargé des communications électroniques. / Le ministre chargé des communications électroniques veille au respect par les offices d'enregistrement des principes énoncés aux articles L. 45-1 à L. 45-6. En cas de méconnaissance par un office de ces dispositions ou d'incapacité financière ou technique à mener à bien ses missions, le ministre peut procéder au retrait de la désignation de cet office, après l'avoir mis à même de présenter ses observations " ; qu'aux termes de l'article L. 45-1 de ce code : " Les noms de domaine sont attribués et gérés dans l'intérêt général selon des règles non discriminatoires et transparentes, garantissant le respect de la liberté de communication, de la liberté d'entreprendre et des droits de propriété intellectuelle. / Les noms de domaine sont attribués pour une durée limitée et renouvelable. / Sous réserve des dispositions de l'article L. 45-2, le nom de domaine est attribué au demandeur éligible ayant le premier fait régulièrement parvenir sa demande. Un nom de domaine attribué et en cours de validité ne peut faire l'objet d'une nouvelle demande d'enregistrement. / L'enregistrement des noms de domaine s'effectue sur la base des déclarations faites par le demandeur et sous sa responsabilité " ;

4. Considérant que ces dispositions sont applicables au présent litige et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ;

5. Considérant que le législateur a entendu expressément exclure du champ d'application des dispositions contestées les noms de domaine autres que ceux correspondant aux codes pays du territoire national ou d'une partie de celui-ci ; qu'aucune disposition constitutionnelle n'impose au législateur d'encadrer les modalités de gestion et d'attribution de l'ensemble des noms de domaine ; que, par suite, ne peut être regardé comme sérieux le grief tiré de ce que le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence et porté atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit au seul motif qu'il aurait ainsi circonscrit le champ d'application des dispositions contestées ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M.A....

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A..., au ministre de l'économie et des finances et à l'Association française pour le nommage internet en coopération.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 416040
Date de la décision : 03/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 03 oct. 2018, n° 416040
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Clément Malverti
Rapporteur public ?: M. Guillaume Odinet
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT, ROBILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:416040.20181003
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