La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/11/2019 | FRANCE | N°426724

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 18 novembre 2019, 426724


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 4 avril 2017 du ministre de l'intérieur constatant la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul. Par un jugement n° 1703014 du 20 novembre 2018, le tribunal administratif a annulé cette décision et enjoint au ministre de l'intérieur de rétablir les points retirés à la suite des infractions commises les 4 janvier et 24 mai 2016.

Par un pourvoi, enregistré le 31 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le

ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce ju...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 4 avril 2017 du ministre de l'intérieur constatant la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul. Par un jugement n° 1703014 du 20 novembre 2018, le tribunal administratif a annulé cette décision et enjoint au ministre de l'intérieur de rétablir les points retirés à la suite des infractions commises les 4 janvier et 24 mai 2016.

Par un pourvoi, enregistré le 31 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dominique Chelle, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte des dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues à ces articles, lesquelles constituent une garantie essentielle en ce qu'elles mettent l'intéressé en mesure de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis.

2. Il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que, pour annuler la décision du 4 avril 2017 du ministre de l'intérieur constatant la perte de validité du permis de conduire de M. B... pour solde de points nul, le tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur ce que ce solde nul résultait du cumul de deux retraits de points consécutifs, respectivement, à une infraction du 4 janvier 2016 et à une infraction du 24 mai 2016 et que, dans les deux cas, les informations mentionnées au point précédent n'avaient pas été portées à la connaissance de l'intéressé.

Sur le jugement attaqué en tant qu'il statue sur l'infraction du 4 janvier 2016 :

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, ainsi que le soutenait le ministre de l'intérieur devant le tribunal administratif, M. B... a, à la suite de l'avis de contravention qui lui a été adressé le 11 janvier 2016, formé le 29 février 2016 une requête en exonération en utilisant le formulaire joint à cet avis, démontrant ainsi en avoir été destinataire. Or les avis de contravention comportent en principe, à leur verso, les informations mentionnées au point 1. Par suite, en estimant que le ministre n'apportait pas la preuve de ce que M. B... avait reçu les informations en question, le tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.

Sur le jugement attaqué, en tant qu'il statue sur l'infraction du 24 mai 2016 :

4. Il ressort des termes du jugement attaqué et n'est, d'ailleurs, pas contesté par le ministre de l'intérieur, qu'aucune preuve n'était apportée devant les juges du fond de ce que les informations mentionnées au point 1, notamment celles relatives à la qualification de l'infraction constatée, avait été portées à la connaissance de M. B... lors de la constatation de l'infraction commise le 24 mai 2016.

5. Par suite, même s'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'intéressé avait bénéficié, à l'occasion d'autres infractions récentes, d'une partie des informations légalement requises et notamment celles relatives à l'existence d'un traitement automatisé des points et à la possibilité d'y accéder, le tribunal a pu, sans erreur de droit, juger que, faute que soit établie la délivrance de l'information légalement requise sur la qualification de l'infraction en cause, M. B... avait été privé de la garantie prévue par la loi et que le retrait de points afférent à cette infraction était, dès lors, entaché d'illégalité.

Sur le jugement attaqué, en tant qu'il statue sur la perte de validité du permis de conduire et sur les conclusions à fins d'injonction :

6. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le tribunal a pu, sans erreur de droit, juger que le retrait de point effectué à la suite de l'infraction du 24 mai 2016 était entaché d'illégalité. Ce motif justifiant à lui seul l'annulation de la décision constatant la perte de validité du permis de conduire de M. B..., le ministre de l'intérieur n'est, dès lors, pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant que, par son article 1er, il annule de cette décision.

7. En revanche, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation de l'article 2 du jugement lui enjoignant de rétablir les points retirés à la suite des deux infractions mentionnées ci-dessus, en tant qu'il concerne l'infraction du 4 janvier 2016.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Versailles du 20 novembre 2018 est annulé en tant qu'il enjoint au ministre de l'intérieur de rétablir les points retirés du permis de conduire de M. B... à la suite de l'infraction du 4 janvier 2016.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, au tribunal administratif de Versailles.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. A... B....


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 426724
Date de la décision : 18/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 18 nov. 2019, n° 426724
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dominique Chelle
Rapporteur public ?: Mme Cécile Barrois de Sarigny

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:426724.20191118
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award