La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/10/2020 | FRANCE | N°437851

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 07 octobre 2020, 437851


Vu la procédure suivante :

1° Sous le numéro 437851, par une requête et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 21 janvier, 9 et 20 septembre 2020, M. I... B... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 11 du décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l'évolution des attributions des commissions administratives paritaires et de prononcer un report d'audience.

2° Sous le numéro 438129, par un mémoire, enregistré le 30 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... F... dema

nde au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 11 du décre...

Vu la procédure suivante :

1° Sous le numéro 437851, par une requête et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 21 janvier, 9 et 20 septembre 2020, M. I... B... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 11 du décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l'évolution des attributions des commissions administratives paritaires et de prononcer un report d'audience.

2° Sous le numéro 438129, par un mémoire, enregistré le 30 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... F... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 11 du décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l'évolution des attributions des commissions administratives paritaires.

....................................................................................

3° Sous le numéro 438195, par un mémoire enregistré le 2 février 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. E...-P... J... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 11 du décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l'évolution des attributions des commissions administratives paritaires.

....................................................................................

4° Sous le numéro 438266, par un mémoire enregistré le 4 février 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. L... A... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 11 du décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l'évolution des attributions des commissions administratives paritaires.

....................................................................................

5° Sous le numéro 440247, par un mémoire enregistré le 24 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. H... K... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 11 du décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l'évolution des attributions des commissions administratives paritaires.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 ;

- le décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 ;

- l'arrêté du 21 juillet 2020 portant fixation d'une durée maximale d'occupation des emplois du réseau à l'étranger du ministère de l'Europe et des affaires étrangères ;

- la décision du 11 juin 2020 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par MM. B..., F..., J... et A... ;

- la décision du 3 août 2020 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. K... ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Yves Ollier, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes de MM. B..., F..., J..., A... et K... sont dirigées contre le même décret. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

Sur les interventions :

2. MM. C..., G... et M... justifient d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien de la requête de M. B.... Leur intervention doit, par suite, être admise.

Sur les dispositions attaquées :

3. Aux termes du 8ème alinéa du I de l'article 25 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique modifiant l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " III.-L'autorité compétente peut définir, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, des durées minimales et maximales d'occupation de certains emplois ". Aux termes de l'article 11 du décret du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l'évolution des attributions des commissions administratives paritaires : " I.- Dans les administrations et établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, des durées minimales et maximales d'occupation de certains emplois peuvent être fixées notamment pour tenir compte : / 1° De difficultés particulières de recrutement ;/ 2° Des impératifs de continuité du service et de maintien des compétences ; / 3° Des objectifs de diversification des parcours de carrières ; / 4° Des enjeux de prévention des risques d'usure professionnelle liés aux conditions particulières d'exercice de certaines fonctions ; / 5° Des enjeux relatifs à la prévention de risques déontologiques. / Ces durées minimales et maximales d'affectation peuvent n'être appliquées que dans certaines zones géographiques. / II. - Un arrêté du ou des ministres intéressés et du ministre chargé de la fonction publique précise, après consultation du ou des comités sociaux d'administration ministériels compétents, les types d'emplois ainsi que, le cas échéant, les zones géographiques soumis à une durée minimale ou maximale d'occupation ainsi que le quantum de ces durées. / III. - La durée minimale requise ne peut être supérieure à cinq années et la durée maximale ne peut être inférieure à cinq années. / IV. - Par dérogation au III, la durée maximale d'occupation des emplois du réseau de l'Etat à l'étranger peut être fixée à une durée inférieure à cinq ans par arrêté du ou des ministres intéressés./ ... VI.- Les dispositions du présent article ne sont pas applicables : / 1° Aux emplois fonctionnels ; / 2° Aux emplois pour lesquels des règles spécifiques relatives aux durées minimales et maximales d'occupation sont prévues par les statuts particuliers ; / 3° Aux membres du Conseil d'Etat, aux magistrats administratifs, aux magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes ".

4. En premier lieu, aux termes de l'article 33 de la loi du 11 janvier 1984 : " L'activité est la position du fonctionnaire qui, titulaire d'un grade, exerce effectivement les fonctions de l'un des emplois correspondant à ce grade dans les administrations de l'Etat, les autorités administratives indépendantes et les établissements publics administratifs de l'Etat ". Parmi les règles fondamentales du statut des fonctionnaires figure le droit d'un fonctionnaire à être nommé dans un emploi vacant de son grade. Si l'article 11 du décret attaqué, qui prévoit des durées minimales et maximales d'occupation de certains emplois, ne précise pas la position des fonctionnaires lorsqu'ils atteignent la durée maximale fixée pour un emploi, il résulte des dispositions combinées de la loi du 13 juillet 1983 et de la loi du 11 janvier 1984 qu'à l'expiration de la durée maximale d'occupation de son poste, le fonctionnaire, qui reste placé en position d'activité, doit se voir proposer par son administration un emploi correspondant à son grade. Dès lors, les moyens tirés de ce que les dispositions contestées méconnaîtraient le droit des fonctionnaires à occuper un emploi et le principe dit de la carrière ne peuvent qu'être écartés. En outre, contrairement à ce qui est soutenu, aucun texte de droit européen n'instaure de principe ni en ce qui concerne la permanence des emplois publics dans les Etat membres et ni en ce qui concerne leur occupation par des fonctionnaires.

5. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées de l'article 11 du décret qu'elles n'autorisent la fixation de durées maximales que pour certains emplois et qu'elles renvoient à un arrêté interministériel le soin de fixer les types d'emplois concernés ainsi que, le cas échéant, les zones géographiques où s'applique la possibilité de soumettre certains emplois à des durées d'occupation minimale ou maximale. Dès lors, le moyen tiré de ce que le décret aurait pour effet de conduire à généraliser à l'ensemble des fonctionnaires de l'Etat une mesure destinée à seulement certains emplois manque en fait.

6. En troisième lieu, le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un comme dans l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit. Ces modalités de mise en oeuvre du principe d'égalité sont applicables à l'édiction de normes régissant la situation des fonctionnaires qui, en raison de leur contenu, ne sont pas limitées à un même corps ou à un même cadre d'emplois. Si l'article 11 du décret, qui définit des règles qui ne sont pas limitées à un même corps ou un même cadre d'emploi, a exclu de son champ d'application les emplois qui bénéficient déjà d'une durée maximale d'occupation en vertu de règles spécifiques prévues par les statuts particuliers de leur corps, il n'en résulte pas de méconnaissance du principe d'égalité entre les corps de fonctionnaires, alors que les corps dont les statuts ont prévu des durées spécifiques d'occupation minimale ou maximale sont dans une situation différente justifiant la différence de traitement ainsi instituée. Le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité ne peut par suite qu'être écarté, de même que le moyen tiré de ce que le décret aurait ce faisant excédé le champ de la compétence du pouvoir réglementaire et méconnu la loi du 6 août 2019.

7. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que le décret méconnaîtrait le principe de bonne administration n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de recevoir opposées par la ministre de la transformation et de la fonction publiques, que les requêtes de MM. B..., F..., J..., A... et K... doivent être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les interventions de MM. C..., G... et M... au soutien de la requête n° 437851 sont admises.

Article 2 : Les requêtes de MM. B..., F..., J..., A... et K... sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à MM. I... B..., D... F..., L... A..., E...-P... J..., O... C..., E... G..., N... M..., H... K..., à la ministre de la transformation et de la fonction publiques et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 437851
Date de la décision : 07/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 oct. 2020, n° 437851
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Yves Ollier
Rapporteur public ?: M. Gilles Pellissier

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:437851.20201007
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award