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31/01/2022 | FRANCE | N°439978

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 31 janvier 2022, 439978


Vu la procédure suivante :

M. L... E..., M. A... I..., M. G... H..., M. K... F... et M. B... J... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 31 juillet 2017 du maire de Vias (Hérault) accordant à la société Amétis un permis de construire en vue de l'édification de 43 logements sociaux répartis dans deux bâtiments en R+2 d'une surface de plancher de 2 877 m² et l'arrêté du 14 décembre 2017 portant permis de construire modificatif. Par un jugement n° 1800667 du 31 janvier 2019, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

Par

un arrêt n° 19MA00803, 19MA00804 du 4 février 2020, la cour administrative d...

Vu la procédure suivante :

M. L... E..., M. A... I..., M. G... H..., M. K... F... et M. B... J... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 31 juillet 2017 du maire de Vias (Hérault) accordant à la société Amétis un permis de construire en vue de l'édification de 43 logements sociaux répartis dans deux bâtiments en R+2 d'une surface de plancher de 2 877 m² et l'arrêté du 14 décembre 2017 portant permis de construire modificatif. Par un jugement n° 1800667 du 31 janvier 2019, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 19MA00803, 19MA00804 du 4 février 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de M. E... et autres, annulé ce jugement et ces deux arrêtés.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 avril et 6 juillet 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Société Amétis demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. E... et autres ;

3°) de mettre à la charge de M. E... et autres la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Olivier Fuchs, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de la société Ametis et à Me Galy Isabelle, avocat de M. E... et autres ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté en date du 31 juillet 2017, la société Amétis a obtenu un permis de construire pour la réalisation, sur le territoire de la commune de Vias, de deux bâtiments en R+2 comportant 43 logements sociaux, pour une surface de plancher de 2 877 m2. Un permis modificatif lui a été délivré le 14 décembre 2017, portant modification des façades, des hauteurs et réaménagement du sous-sol. M. E... et d'autres requérants ont formé un recours pour excès de pouvoir contre ces deux arrêtés. Par un jugement du 31 janvier 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande. Par un arrêt du 4 février 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et annulé les arrêtés du 31 juillet et 14 décembre 2017. La société Amétis se pourvoit en cassation contre cet arrêt.

Sur la régularité de l'arrêt :

2. La circonstance que la commune de Vias, qui avait d'ailleurs indiqué à la cour administrative d'appel son intention de ne pas prendre d'avocat et de " ne plus prendre partie à l'instance ", n'ait pas été convoquée à l'audience du 21 janvier 2020 n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à l'égard de la société bénéficiaire de l'acte attaqué et ne saurait, dès lors, être utilement invoquée par celle-ci.

Sur la légalité du permis de construire :

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si la commune de Vias a, par une délibération du 24 juillet 2017, adopté un plan local d'urbanisme, celui-ci n'est entré en vigueur que le 2 août 2017, une fois transmis au service du contrôle de légalité et affiché en mairie. Dès lors, le permis de construire, délivré le 31 juillet 2017, n'était pas soumis aux dispositions de ce document, sans qu'ait d'incidence le fait qu'ait été délivré, le 14 décembre 2017, un permis de construire modificatif, lequel n'a pas eu pour effet de modifier le droit applicable au permis de construire initial.

4. Il en résulte que c'est sans erreur de droit que la cour administrative d'appel a jugé que le permis de construire délivré le 31 juillet 2017 à la société Amétis n'était pas régi par le plan local d'urbanisme adopté le 24 juillet 2017 et que le périmètre de protection des abords qu'il délimitait ne lui était pas applicable. Elle a, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, estimé que le projet se trouvait à la fois dans le périmètre de 500 mètres autour de l'église Saint Jean Baptiste, monument classé, et en co-visibilité avec ce bâtiment, et qu'il devait, à ce titre, faire l'objet d'un avis conforme de l'architecte des bâtiments de France.

5. En second lieu, aux termes de l'article R. 111-28 du code de l'urbanisme :

" Dans les secteurs déjà partiellement bâtis, présentant une unité d'aspect et non compris dans des programmes de rénovation, l'autorisation de construire à une hauteur supérieure à la hauteur moyenne des constructions avoisinantes peut être refusée ou subordonnée à des prescriptions particulières ".

6. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le projet a vocation à s'insérer à la place d'une station-service, au bout d'une rue dans laquelle se trouvent, outre un certain nombre de maisons individuelles et d'habitats groupés, un garage, un centre commercial, un groupe scolaire et un théâtre de forme contemporaine présentant tous une diversité d'aspect. Dès lors, la cour ne pouvait, sans dénaturer les pièces du dossier, estimer que le quartier présentait une " unité d'aspect " au sens de l'article R. 111-28 du code de l'urbanisme.

Sur la mise en œuvre des pouvoirs de régularisation :

7. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ". Dès lors que la régularisation a été demandée, le juge est tenu de la prononcer si elle est possible ou, à défaut, de motiver son refus. En s'abstenant de répondre à la demande de régularisation formulée par la société Amétis, alors, au demeurant, que le permis litigieux était susceptible d'être régularisé par l'intervention de l'avis de l'architecte des bâtiments de France, la cour a entaché son arrêt d'une insuffisance de motivation.

8. Il résulte de ce qui précède que la société Amétis est fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille qu'elle attaque.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... et autres le versement à la société Amétis d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de cet article font, en revanche, obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. E... et autres tendant aux mêmes fins.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt n° 19MA00803, 19MA00804 de la cour administrative d'appel de Marseille du 4 février 2020 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : M. E... et autres verseront à la société Amétis une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. E... et autres sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Amétis, à M. E..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants et à la commune de Vias.

Délibéré à l'issue de la séance du 7 janvier 2022 où siégeaient : M. Fabien Raynaud, président de chambre, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 31 janvier 2022.

Le président :

Signé : M. Fabien Raynaud

La rapporteure :

Signé : Mme Catherine Moreau

La secrétaire :

Signé : Mme D... C...


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 439978
Date de la décision : 31/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 31 jan. 2022, n° 439978
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Moreau
Rapporteur public ?: M. Olivier Fuchs
Avocat(s) : SCP BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS, SEBAGH ; GALY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:439978.20220131
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