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03/02/2022 | FRANCE | N°453319

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 03 février 2022, 453319


Vu la procédure suivante :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision référencée " 48 M " du 11 mai 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré quatre points de son permis de conduire et d'enjoindre au ministre de les restituer à son capital de points. Par un jugement n° 1902228 du 6 avril 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a annulé cette décision et enjoint au ministre de l'intérieur de procéder à la restitution de ces points dans un délai d'un mois.

Par un pourvoi, enregistré

le 4 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l...

Vu la procédure suivante :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision référencée " 48 M " du 11 mai 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré quatre points de son permis de conduire et d'enjoindre au ministre de les restituer à son capital de points. Par un jugement n° 1902228 du 6 avril 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a annulé cette décision et enjoint au ministre de l'intérieur de procéder à la restitution de ces points dans un délai d'un mois.

Par un pourvoi, enregistré le 4 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions de M. C... devant le tribunal administratif.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Charmont, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL cabinet Briard, avocat de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision référencée " 48 M " du 11 mai 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré quatre points du capital de points de son permis de conduire à la suite d'une infraction commise le 10 janvier 2019 à Perthuis et d'enjoindre au ministre de restituer ces points. Le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre le jugement du 6 avril 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a annulé sa décision du 11 mai 2019 et lui a enjoint de restituer les points.

2. Il résulte des articles 529, 529-1, 529-2 et du premier alinéa de l'article 530 du code de procédure pénale que, pour les infractions dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat, le contrevenant peut, dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention, soit acquitter une amende forfaitaire et éteindre ainsi l'action publique, soit présenter une requête en exonération. Lorsque le destinataire d'un avis de contravention choisit d'éteindre l'action publique par le paiement de l'amende forfaitaire, il résulte des dispositions de l'article L. 223-1 du code de la route que ce paiement établit la réalité de l'infraction et entraîne la réduction de plein droit du nombre de points dont est affecté le permis de conduire de l'intéressé. Par suite, celui-ci ne peut utilement soutenir devant le juge administratif, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision de retrait de points, qu'il n'est pas le véritable auteur de l'infraction. Il résulte également de la combinaison des articles L. 223-1 et L. 225-1 du code la route et des articles 529, 529-1, 529-2 et 530 du code de procédure pénale que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention, ou, en cas d'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, avoir formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation de ce titre.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que si M. C... a, dans le délai de quarante-cinq jours mentionné au point précédent, contesté par une requête en exonération l'infraction commise le 10 janvier 2019, il a également, conformément d'ailleurs à ce qu'il indiquait dans la lettre accompagnant cette requête, acquitté le montant de l'amende forfaitaire ainsi que cela figure au relevé d'information intégral produit par le ministre de l'intérieur en défense devant le tribunal administratif. Aussi, en se fondant, pour prononcer l'annulation de la décision " 48 M " en litige, sur la circonstance que le silence opposé par l'officier du ministère public à la requête en exonération de M. C... avait porté atteinte à son droit au recours effectif en faisant obstacle à ce qu'il puisse contester la réalité de l'infraction devant la juridiction pénale, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a entaché sa décision d'une erreur de droit. Le ministre de l'intérieur est, par suite, fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Aux termes de l'article 529-10 du code de procédure pénale dans sa version applicable au litige : " Lorsque l'avis d'amende forfaitaire concernant une des infractions mentionnées à l'article L. 121-3 du code de la route a été adressé au titulaire du certificat d'immatriculation ou aux personnes visées aux trois derniers alinéas de l'article L. 121-2 de ce code, la requête en exonération prévue par l'article 529-2 ou la réclamation prévue par l'article 530 n'est recevable que si elle est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, en utilisant le formulaire joint à l'avis d'amende forfaitaire, et si elle est accompagnée : / (...) / 2° Soit d'un document démontrant qu'il a été acquitté une consignation préalable d'un montant égal à celui de l'amende forfaitaire dans le cas prévu par le premier alinéa de l'article 529-2, ou à celui de l'amende forfaitaire majorée dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article 530 ; cette consignation n'est pas assimilable au paiement de l'amende forfaitaire et ne donne pas lieu au retrait des points du permis de conduire prévu par le quatrième alinéa de l'article L. 223-1 du code de la route. / L'officier du ministère public vérifie si les conditions de recevabilité de la requête ou de la réclamation prévues par le présent article sont remplies. / Les requêtes et les réclamations prévues au présent article peuvent également être adressées de façon dématérialisée, selon des modalités précisées par arrêté. " En vertu de l'article R. 121-6 du code de la route, le titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule est, en application de l'article L. 121-3, redevable pécuniairement de l'amende encourue pour des infractions aux règles sur : " 6° bis Le sens de la circulation ou les manœuvres interdites prévus aux articles R. 412-28 et R. 421-6 ".

6. Il résulte de l'instruction que si M. C... établit avoir formé le 21 janvier 2019 devant l'officier du ministère public une requête en exonération de l'amende forfaitaire afférente à l'infraction relevée le 10 janvier 2019 à Perthuis consistant à avoir emprunté une voie en sens interdit, ce dernier a cependant acquitté le 30 janvier 2019 le montant de l'amende forfaitaire minorée de 90 euros, comme il l'avait indiqué dans la lettre accompagnant sa requête et ainsi que cela ressort des mentions figurant au relevé d'information intégral dont l'inexactitude n'est pas sérieusement contestée, et qui sont corroborées par la pièce produite par le ministre de l'intérieur dénommée " bordereau de situation des amendes et des condamnations pécuniaires " tenu par le comptable public pour chaque contrevenant et dont la personne concernée peut obtenir communication en application de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Si, il est vrai, M. C... a précisé, dans son courrier du 21 janvier 2019, procéder à ce règlement en qualité de titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule en infraction sans reconnaître en être le conducteur, cette circonstance ne suffit pas à établir qu'il aurait procédé non au paiement de l'amende mais à la consignation du montant de l'amende forfaitaire imposée par l'article 529-10 du code de procédure pénale préalablement à la requête en exonération, la consigne ne pouvant au surplus être limitée au montant de l'amende forfaitaire minorée. Dans ces conditions, la réalité de l'infraction doit être regardée, en application de ce qui a été dit au point 2, comme établie dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 du code de la route. Par suite, M. C... ne peut utilement soutenir à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision de retrait de points consécutive à cette infraction, qu'il n'en est pas l'auteur.

7. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 6 avril 2021 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Nîmes est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. A... C....

Délibéré à l'issue de la séance du 13 janvier 2022 où siégeaient : M. Olivier Yeznikian, conseiller d'Etat, présidant ; M. Jean-Philippe Mochon, conseiller d'Etat et M. François Charmont, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 3 février 2022.

Le président :

Signé : M. Olivier Yeznikian

Le rapporteur :

Signé : M. François Charmont

La secrétaire :

Signé : Mme D... B...


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 453319
Date de la décision : 03/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 03 fév. 2022, n° 453319
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François Charmont
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : sarl CABINET BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:453319.20220203
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