La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/02/2022 | FRANCE | N°449621

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 11 février 2022, 449621


Vu la procédure suivante :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris, sous le n° 1904258, d'annuler la décision du 16 juillet 2018 par laquelle la caisse d'allocations familiales de Paris lui a demandé le remboursement d'une somme de 152,45 euros correspondant à un indu de prime exceptionnelle de fin d'année pour 2015, de la décharger de cette somme et d'enjoindre à l'Etat et à la caisse d'allocations familiales de lui restituer les sommes retenues pour la récupération de cet indu.

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris, sous

le n° 2005063, d'une part, d'annuler la décision du 16 juillet 2018 de l...

Vu la procédure suivante :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris, sous le n° 1904258, d'annuler la décision du 16 juillet 2018 par laquelle la caisse d'allocations familiales de Paris lui a demandé le remboursement d'une somme de 152,45 euros correspondant à un indu de prime exceptionnelle de fin d'année pour 2015, de la décharger de cette somme et d'enjoindre à l'Etat et à la caisse d'allocations familiales de lui restituer les sommes retenues pour la récupération de cet indu.

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris, sous le n° 2005063, d'une part, d'annuler la décision du 16 juillet 2018 de la caisse d'allocations familiales de Paris lui demandant le remboursement de la somme de 234,51 euros correspondant à un indu de revenu de solidarité active " activité " pour la période de septembre 2014 à décembre 2015, ainsi que le rejet de son recours gracieux, d'annuler la décision implicite par laquelle le département de Paris a, sur son recours préalable, confirmé la décision du 16 juillet 2018 par laquelle la caisse d'allocations familiales de Paris lui a demandé le remboursement de la somme de 4 097,53 euros correspondant à un indu de revenu de solidarité active " socle ", d'autre part, de la décharger de ces indus, enfin, d'enjoindre à l'administration de lui restituer les sommes retenues pour leur récupération.

Par un jugement nos 1904258 et 2005063 du 11 décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé ces décisions et enjoint à la caisse d'allocations familiales de Paris, à la Ville de Paris et à l'Etat de rembourser dans un délai de deux mois à Mme A... les sommes déjà recouvrées.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 février et 3 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Ville de Paris demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les demandes de Mme A... ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Damien Pons, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la ville de Paris et à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que, par une décision du 16 juillet 2018, la caisse d'allocations familiales de Paris a réclamé à Mme A..., au motif d'omissions déclaratives relatives notamment à des libéralités qu'elle avait reçues, le remboursement d'une somme de 4 097,53 euros au titre du revenu de solidarité active " socle " pour les mois de septembre 2014 à août 2016, 234,51 euros au titre du revenu de solidarité active " activité " pour les mois de septembre 2014 à décembre 2015 et 152,45 euros au titre de la prime exceptionnelle de fin d'année pour 2015. Mme A... a exercé le 9 août 2018 auprès de la Ville de Paris un recours administratif préalable obligatoire, reçu le 14 août 2018 et implicitement rejeté le 15 octobre 2018, contestant l'indu de revenu de solidarité active " socle ". Elle a, le même jour, exercé un recours gracieux auprès de la caisse d'allocations familiales contre l'indu de revenu de solidarité active " activité ", qui a également été implicitement rejeté. Par un jugement du 11 décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a fait droit aux demandes de Mme A... tendant à l'annulation de la décision de récupération des indus de revenu de solidarité active " socle " et " activité " et de prime exceptionnelle de fin d'année et enjoint à l'administration de lui restituer les sommes retenues pour la récupération de ces indus. La Ville de Paris se pourvoit en cassation contre ce jugement. Elle doit être regardée, ainsi qu'elle le précise dans le dernier état de ses écritures, comme n'en demandant l'annulation qu'en tant qu'il statue sur les conclusions de la demande, présentée par Mme A... sous le n° 2005063, relatives au revenu de solidarité active " socle".

2. L'article L. 262-40 du code de l'action sociale et des familles dispose que les organismes chargés du versement du revenu de solidarité active " réalisent les contrôles relatifs au revenu de solidarité active selon les règles, procédures et moyens d'investigation applicables aux prestations de sécurité sociale ". Selon l'article L. 114-9 du code de la sécurité sociale, les directeurs des caisses d'allocations familiales " sont tenus, lorsqu'ils ont connaissance d'informations ou de faits pouvant être de nature à constituer une fraude, de procéder aux contrôles et enquêtes nécessaires. (...) ". Aux termes de l'article L. 114-10 du même code, ils " confient à des agents chargés du contrôle, assermentés et agréés dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale (...), le soin de procéder à toutes vérifications ou enquêtes administratives concernant l'attribution des prestations (...). Ces agents ont qualité pour dresser des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire(...) ". Les conditions d'agrément des agents chargés du contrôle de l'application des législations de sécurité sociale ont été définies, en dernier lieu, par un arrêté du 5 mai 2014 de la ministre des affaires sociales et de la santé, dont il résulte notamment que l'agrément est attribué, suspendu ou retiré par le directeur de la caisse nationale à la demande du directeur de la caisse locale et qu'il est automatiquement suspendu en cas de suspension du contrat de travail de l'agent ou d'affectation sur un nouvel emploi sans fonction de contrôle et retiré en cas de rupture du contrat de travail de l'agent, sauf dans le cas d'une mobilité au sein du réseau des organismes de la même branche.

3. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que les contrôles portant sur les déclarations des bénéficiaires du revenu de solidarité active ne peuvent être conduits que par des agents assermentés et agréés, chargés d'une telle mission par le directeur de la caisse d'allocations familiales assurant le service de cette prestation. Il en résulte également que l'agrément d'un agent établit que celui-ci est affecté à un emploi comportant une mission de contrôle, dont il a été chargé par le directeur de la caisse d'allocations familiales qui l'emploie. Par suite, en jugeant, après avoir relevé que l'agent qui avait procédé à l'enquête à l'origine de la décision de récupération avait été agréé par une décision du directeur adjoint de la caisse nationale d'allocations familiales du 8 avril 2008, qu'il ne ressortait ni de la décision d'agrément ni d'aucune autre pièce des dossiers que le directeur général de la caisse d'allocations familiales de Paris aurait pris une décision lui confiant le soin de procéder à des vérifications et enquêtes administratives concernant l'attribution des prestations servies par les caisses, le tribunal a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi et sans qu'il y ait lieu de faire droit aux substitutions de motifs demandées par Mme A..., tirées de ce que la preuve du paiement des indus n'est pas rapportée par l'administration, de ce que la procédure de récupération est irrégulière du fait de la violation des règles afférentes au droit de communication et de ce que la décision de récupération est entachée d'incompétence, lesquelles ne sont pas susceptibles de justifier légalement le dispositif du jugement attaqué, que la Ville de Paris est fondée à demander l'annulation pour ce motif de ce jugement en tant qu'il statue sur les conclusions de la demande de Mme A... enregistrée sous le n° 2005063 relatives au revenu de solidarité active " socle ".

5. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de Mme A.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la Ville de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 11 décembre 2020 du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de la demande de Mme A... enregistrée sous le n° 2005063 relatives au revenu de solidarité active " socle ".

Article 2 : L'affaire est, dans cette mesure, renvoyée au tribunal administratif de Paris.

Article 3 : Les conclusions présentées par la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de Mme A..., au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par la Ville de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la Ville de Paris et à Mme D... A....

Copie en sera adressée à la caisse d'allocations familiales de Paris et au ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré à l'issue de la séance du 14 janvier 2022 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et M. Damien Pons, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 11 février 2022.

La présidente:

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

Le rapporteur

Signé : M. Damien Pons

La secrétaire:

Signé : Mme B... C...


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 449621
Date de la décision : 11/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 fév. 2022, n° 449621
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Damien Pons
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:449621.20220211
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award