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01/07/2022 | FRANCE | N°448916

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 01 juillet 2022, 448916


Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de révision de sa situation administrative. Par un jugement n° 1703509 du 23 octobre 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n°19DA02809 du 12 novembre 2020, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel de Mme A..., annulé ce jugement ainsi que la décision implicite du ministre de l'intérieur et enjoint à ce dernier de procéder à la révision de la situati

on administrative de Mme A... en lui accordant une ancienneté acquise supplé...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de révision de sa situation administrative. Par un jugement n° 1703509 du 23 octobre 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n°19DA02809 du 12 novembre 2020, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel de Mme A..., annulé ce jugement ainsi que la décision implicite du ministre de l'intérieur et enjoint à ce dernier de procéder à la révision de la situation administrative de Mme A... en lui accordant une ancienneté acquise supplémentaire de cinq mois au titre de sa nomination au grade de major de police intervenue le 2 décembre 2015.

Par un pourvoi enregistré le 19 janvier 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2004-1439 du 23 décembre 2004 ;

- le décret n° 2015-1374 du 29 octobre 2015 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Natacha Chicot, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A..., classée au 6ème échelon du grade de brigadier-chef depuis le 1er juillet 2011, a été promue au grade de major de police à compter du 2 décembre 2015 par arrêté du ministre de l'intérieur du 22 juillet 2015 et reclassée au 2ème échelon de ce grade avec une ancienneté conservée de douze mois par arrêté du préfet de la zone de défense et de sécurité du Nord en date du 20 janvier 2016. Par courrier daté du 19 décembre 2016, elle a saisi le préfet de la zone de défense et de sécurité du Nord d'une demande tendant à la révision de sa situation administrative au motif que les brigadiers-chefs nommés au grade de major de police au titre de l'année 2016 avaient bénéficié de règles de reclassement plus favorables conduisant à leur conférer une ancienneté dans le grade de major de police plus élevée que celle des brigadiers-chefs nommés dans ce grade au titre de l'année 2015. Par un jugement du 23 octobre 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de Mme A... tendant à l'annulation de la décision implicite de refus opposée à sa demande. Le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 12 novembre 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Douai, d'une part, a, sur appel de Mme A..., annulé ce jugement et la décision attaquée et, d'autre part, lui a enjoint de procéder à la révision de la situation administrative de Mme A... en lui accordant une ancienneté acquise supplémentaire de cinq mois au titre de sa nomination au grade de major de police intervenue le 2 décembre 2015.

2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " Le ministre de l'intérieur soutient, à l'appui de son pourvoi, que la décision attaquée par Mme A... se borne à confirmer l'arrêté du 20 janvier 2016 pris par le préfet de la zone de défense et de sécurité du Nord et ne pouvait donc pas faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que cet arrêté du 20 janvier 2016 ait été notifié à Mme A... dans des conditions de nature à faire courir le délai de recours contentieux ni que la demande de révision adressée par Mme A... au préfet de la zone de défense et de sécurité du Nord par courrier daté du 19 décembre 2016 ait été présentée au-delà d'un délai raisonnable à compter de la date à laquelle Mme A... a eu connaissance de l'arrêté du 20 janvier 2016. Par suite, le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir qu'en ne jugeant pas irrecevable la demande de première instance, la cour administrative d'appel de Douai a commis une erreur de droit.

3. En second lieu, le principe d'égalité entre les fonctionnaires appartenant à un même corps fait obstacle à ce que le statut particulier de ce corps fixe des règles établissant une différence de traitement entre ces fonctionnaires sous réserve des cas où des circonstances exceptionnelles peuvent justifier que de telles règles soient édictées dans l'intérêt du service.

4. En vertu de l'article 19 du décret du 23 décembre 2004 dans sa rédaction issue du décret du 29 octobre 2015, applicable au litige, les brigadiers-chefs ayant atteint le 6ème échelon et promus au grade de major de police ont été reclassés au 2ème échelon avec une ancienneté acquise dans la limite d'un an pour ceux nommés au titre de l'année 2015 et dans la limite de deux ans pour ceux nommés au titre de l'année 2016. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les brigadiers-chefs promus au titre de l'année 2016 ont été nommés dans le grade de major de police en juillet 2016 alors que les brigadiers-chefs promus dans ce grade au titre de l'année 2015 l'ont été à compter du 2 décembre 2015. Ce calendrier combiné aux règles de reclassement dans le grade de major de police précédemment rappelées a conduit à accorder aux brigadiers-chefs promus dans le grade de major de police au titre de l'année 2016 une ancienneté dans ce grade supérieure à certains des brigadiers-chefs promus dans ce même grade au titre de l'année précédente, inversant par suite l'ordre d'ancienneté de certains membres de ce corps. Le ministre de l'intérieur n'est par suite pas fondé à soutenir que la cour administrative d'appel, qui a relevé l'absence de circonstance exceptionnelle de nature à justifier cette situation, aurait commis une erreur de droit en jugeant qu'il était ainsi porté une atteinte illégale au principe de l'égalité de traitement des fonctionnaires d'un même corps.

5. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à Mme B... A....

Délibéré à l'issue de la séance du 13 juin 2022 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et Mme Natacha Chicot, maître des requêtes-rapporteure.

Rendu le 1er juillet 2022.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

La rapporteure :

Signé : Mme Natacha Chicot

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Pilet


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 448916
Date de la décision : 01/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 01 jui. 2022, n° 448916
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Natacha Chicot
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:448916.20220701
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