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21/09/2022 | FRANCE | N°450674

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 21 septembre 2022, 450674


Vu la procédure suivante :

La société Nexity IR Programmes Domaines a demandé au tribunal administratif de Versailles, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'exécution des arrêtés du 27 janvier 2021 par lesquels le maire de Longpont-sur-Orge a refusé de lui délivrer des permis de construire modificatifs et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au maire de cette commune de procéder à un nouvel examen de ses demandes de permis de construire modificatifs et de les lui délivrer dans le délai de quinze jours à comp

ter de la notification de l'ordonnance à intervenir. Par une ordonna...

Vu la procédure suivante :

La société Nexity IR Programmes Domaines a demandé au tribunal administratif de Versailles, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'exécution des arrêtés du 27 janvier 2021 par lesquels le maire de Longpont-sur-Orge a refusé de lui délivrer des permis de construire modificatifs et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au maire de cette commune de procéder à un nouvel examen de ses demandes de permis de construire modificatifs et de les lui délivrer dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir. Par une ordonnance n°s 2101419, 2101420 du 26 février 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a rejeté ces demandes.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 et 31 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Nexity IR Programmes Domaines demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à ses demandes ;

3°) de mettre à la charge de commune de Longpont-sur-Orge la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société Nexity IR Programmes Domaines et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la commune de Longpont-sur-Orge ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces des dossiers soumis au juge des référés du tribunal administratif que, par deux arrêtés des 22 et 24 mai 2018, le maire de Longpont-sur-Orge a accordé à la société Nexity IR Programmes Domaines un premier permis de construire pour la réalisation de vingt-sept logements locatifs sociaux et six maisons individuelles et un deuxième permis de construire pour la réalisation de deux immeubles collectifs de vingt logements et de trois maisons individuelles. Par un premier jugement du 29 juin 2020, le tribunal administratif de Versailles, saisi par l'association de défense des sources de Longpont-sur-Orge, a jugé que ces deux arrêtés étaient chacun entaché d'un vice, tenant au caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire s'agissant de l'indication et de la localisation des canalisations des sources de l'Ormoy et d'Hodierne, identifiées et protégées comme éléments remarquables par l'article 2.5/2 du règlement du plan local d'urbanisme et respectivement présentes sur leur terrain d'assiette. Après avoir écarté les autres moyens des demandes de l'association requérante, le tribunal a sursis à statuer afin de permettre la régularisation de ce vice en impartissant un délai de six mois à cette fin. Le maire de Longpont-sur-Orge ayant toutefois refusé, par deux arrêtés du 27 janvier 2021, les permis de construire modificatifs sollicités pour cette régularisation par la société Nexity IR Programmes Domaines, cette société a demandé au juge des référés du tribunal administratif de suspendre l'exécution des arrêtés du 27 janvier 2021. Elle se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 26 février 2021 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a refusé de faire droit à ces demandes.

Sur le cadre du litige :

2. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. "

3. D'autre part, l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme dispose que : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. "

4. Lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée sont susceptibles d'être régularisés, le juge administratif doit, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation, sauf à ce qu'il fasse le choix de recourir à l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, si les conditions posées par cet article sont réunies, ou que le bénéficiaire de l'autorisation lui ait indiqué qu'il ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation. Lorsqu'il décide de recourir à l'article L. 600-5-1, il lui appartient, avant de surseoir à statuer sur le fondement de ces dispositions, de constater préalablement qu'aucun des autres moyens n'est fondé et n'est susceptible d'être régularisé et d'indiquer dans sa décision de sursis pour quels motifs ces moyens doivent être écartés.

5. A compter de la décision par laquelle le juge recourt à l'article L. 600-5-1, seuls des moyens dirigés contre la mesure de régularisation notifiée, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. A ce titre, les parties peuvent contester la légalité d'un permis de régularisation par des moyens propres et au motif qu'il ne permet pas de régulariser le permis initial. En revanche, si aucune mesure de régularisation ne lui est notifiée, il appartient au juge de prononcer l'annulation de l'autorisation de construire litigieuse, sans que puisse être contestée devant lui la légalité du refus opposé, le cas échéant, à la demande de régularisation présentée par le bénéficiaire de l'autorisation. Une telle contestation ne peut intervenir que dans le cadre d'une nouvelle instance, qui doit être regardée comme dirigée contre le refus d'autoriser le projet dans son ensemble, y compris les modifications qu'il était envisagé d'y apporter.

Sur le pourvoi :

En ce qui concerne le non-lieu :

6. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que, contrairement à ce que soutient la commune de Longpont-sur-Orge, la circonstance que les permis de construire initiaux délivrés les 22 et 24 mai 2018 aient été, en l'absence de mesure de régularisation, annulés par le tribunal administratif par un jugement du 22 mars 2021 ne rend pas sans objet la contestation du refus opposé aux demandes de régularisation formulées par la société Nexity IR Programmes Domaines, laquelle doit être regardée comme dirigée contre les refus d'autoriser ces projets dans leur ensemble, y compris les modifications qu'il était envisagé d'y apporter.

En ce qui concerne les moyens du pourvoi :

7. Pour refuser, par les arrêtés du 27 janvier 2021 en litige, les permis de construire modificatifs sollicités par la société Nexity IR Programmes Domaines, le maire de Longpont-sur-Orge s'est fondé, en premier lieu, sur le caractère trop imprécis des dossiers de demande de permis en litige pour permettre aux services instructeurs de s'assurer du respect des prescriptions du plan local d'urbanisme relatives aux canalisations et pierrées appartenant au réseau historique de la ville et protégées au titre des éléments remarquables du plan local d'urbanisme, lequel interdit toute construction et installation sur le réseau de canalisations et de pierrées ainsi que dans une emprise de trois mètres de part et d'autre des bords extérieurs du réseau, notamment en l'absence de toute justification de la localisation du réseau retenue, matérialisée par un simple pointillé sur le plan de masse, et, en second lieu, en application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, sur l'atteinte susceptible d'être en conséquence portée à la salubrité ou à la sécurité publique.

8. En écartant comme n'étant pas propres à créer un doute sérieux les moyens tirés, d'une part, de ce que l'imprécision du tracé du réseau figurant aux dossiers de demandes ne pouvait lui être opposée dès lors que ce tracé était conforme à celui figurant sur le plan de zonage du plan local d'urbanisme et, d'autre part, de ce que l'atteinte susceptible d'être portée par les permis de construire modificatifs en litige à la salubrité ou à la sécurité publique ne pouvait lui être davantage opposée dès lors qu'elle était déduite des désordres survenus lors de travaux effectués en application d'une autorisation d'urbanisme distincte, le juge des référés du tribunal administratif n'a, eu égard à son office, pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.

9. Il n'a pas davantage commis d'erreur de droit, eu égard à son office, en ne retenant pas qu'était propre à créer un doute sérieux quant à la légalité des arrêtés attaqués le moyen tiré de l'absence de visa et de recueil des avis des personnes publiques, services ou commissions intéressées par le projet au titre des articles R. 423-50 et A. 424-2 du code de l'urbanisme.

10. Par suite, la société Nexity IR Programmes Domaines n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif qu'elle attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être également rejetées. Il y a lieu, en revanche, de mettre à sa charge une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Longpont-sur-Orge et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la société Nexity IR Programmes Domaines est rejeté.

Article 2 : La société Nexity IR Programmes Domaines versera une somme de 3 000 euros à la commune de Longpont-sur-Orge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Nexity IR Programmes Domaines et à la commune de Longpont-sur-Orge.

Copie en sera adressée à l'association de défense des sources de Longpont-sur-Orge.

Délibéré à l'issue de la séance du 8 septembre 2022 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, maître des requêtes-rapporteure.

Rendu le 21 septembre 2022.

La présidente :

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

La rapporteure :

Signé : Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir

Le secrétaire :

Signé : M. Hervé Herber


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 450674
Date de la décision : 21/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 sep. 2022, n° 450674
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP JEAN-PHILIPPE CASTON

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:450674.20220921
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