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31/03/2023 | FRANCE | N°467175

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 31 mars 2023, 467175


Vu la procédure suivante :

M. A... C... et Mme D... B..., épouse C..., ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, dans la catégorie des plus-values de cession de biens immobiliers, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1710316 du 19 mai 2020, ce tribunal a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 20DA01187 du 30 juin 2022, la cour administrative d'appel de Douai, saisie par M.

et Mme C..., a prescrit avant dire droit un supplément d'instruction aux fi...

Vu la procédure suivante :

M. A... C... et Mme D... B..., épouse C..., ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, dans la catégorie des plus-values de cession de biens immobiliers, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1710316 du 19 mai 2020, ce tribunal a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 20DA01187 du 30 juin 2022, la cour administrative d'appel de Douai, saisie par M. et Mme C..., a prescrit avant dire droit un supplément d'instruction aux fins, pour les requérants, de produire dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de son arrêt, les relevés de compte bancaire se rapportant aux opérations détaillées dans le tableau joint à leurs dernières écritures, ainsi que les éléments de nature à justifier que ces opérations se rapportent bien à la parcelle dont la plus-value de cession fait l'objet des impositions contestées, et, pour le ministre, de produire, dans le même délai, les factures fournies par M. et Mme C... en ce qui concerne ces travaux.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés les 31 août et 29 novembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. et Mme C... demandent au Conseil d'Etat :

1° d'annuler cet arrêt en tant qu'il juge la procédure d'imposition régulière, qu'il valide la méthode retenue par l'administration pour évaluer le prix d'acquisition du bien objet de la plus-value de cession en litige et rejette la méthode alternative qu'ils proposaient et qu'il juge qu'ils ne peuvent se prévaloir des paragraphes n° 460 et 480 des commentaires administratifs publiés le 23 février 2022 au Bulletin officiel des finances publiques - Impôts sous la référence BOI-BIC-CHAMP-40-20 et que la plus-value litigieuse était imposable selon le régime des plus-values des particuliers en application des dispositions de l'article 151 sexies du code général des impôts ;

2° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Mahé, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL cabinet Briard, avocat de M. et Mme C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme C... ont acquis le 2 janvier 2002, pour un prix hors mobilier de 557 964 euros, un terrain situé à Lambersart, couvrant une surface totale de 3 553 m2, sur laquelle étaient bâtis une maison principale et plusieurs dépendances. L'une de ces dépendances a fait l'objet de travaux en vue d'y aménager cinq gîtes et des parties communes. M. C... a progressivement inscrit, entre 2008 et 2011, les différents lots composant cette dépendance à l'actif de son entreprise individuelle de loueur de locaux meublés, pour une valeur totale de 430 000 euros. Le bâtiment abritant cette dépendance a ensuite été vendu le 6 août 2013, avec son terrain d'assiette d'une surface de 281 m2, l'ensemble composant, à la suite d'une division parcellaire, la parcelle cadastrée AN 441. Ayant estimé qu'en raison de l'inscription du bien cédé à l'actif de l'entreprise individuelle de location de meublés exploitée par M. C..., la plus-value réalisée à l'occasion de cette vente était de nature professionnelle et qu'elle était exonérée en application des dispositions de l'article 151 septies du code général des impôts, M. et Mme C... n'ont procédé à aucune déclaration à ce titre. Mais à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur l'activité de loueur en meublé de M. C..., suivie d'un contrôle sur pièces de la situation fiscale personnelle de M. et Mme C..., l'administration a remis partiellement en cause cette exonération. L'administration a estimé que la part de la plus-value de cession correspondant à la différence entre le montant pour lequel le bien avait été inscrit à l'actif de l'entreprise individuelle de M. C..., soit 430 000 euros, et son prix de revient, qu'elle a évalué à 44 128 euros, devait être regardée non comme une plus-value professionnelle, mais comme une plus-value imposable entre les mains de M. et Mme C... selon le régime des plus-values de particuliers en application de l'article 151 sexies du code général des impôts. Les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales en résultant ont été mis en recouvrement pour un montant de 174 974 euros, intérêts de retard et majoration de 10 % compris.

2. M. et Mme C... se pourvoient en cassation contre un arrêt avant dire droit par lequel la cour administrative d'appel de Douai, après avoir écarté des moyens tirés de l'irrégularité de la procédure d'imposition et de l'invocation du bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par des commentaires administratifs, a, s'agissant de la détermination du montant de la plus-value en litige, confirmé le prix d'acquisition de 44 128 euros de la parcelle AN 441 retenu par l'administration et ordonné un supplément d'instruction pour fixer le montant des travaux devant venir en augmentation de ce prix d'acquisition.

3. Aux termes du I de l'article 151 sexies du code général des impôts : " La plus-value réalisée dans le cadre d'une activité agricole, artisanale, commerciale, industrielle ou libérale est calculée, si le bien cédé a figuré pendant une partie du temps écoulé depuis l'acquisition dans le patrimoine privé du contribuable, suivant les règles des articles 150 U à 150 VH, pour la partie correspondant à cette période (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour retenir un prix de revient de 44 128 euros de la parcelle AN 441 détachée de l'ensemble immobilier acquis en 2002 par M. et Mme C..., en vue de la détermination de la fraction de la plus-value de cession de ce bien correspondant à la période, comprise entre son acquisition et son inscription à l'actif professionnel de M. C..., pendant laquelle il est demeuré dans patrimoine privé de ce dernier, l'administration s'est bornée à appliquer au prix total d'acquisition de ce bien, soit 557 964 euros, le rapport entre la superficie de cette parcelle, soit 281 m², et les 3 553 m² de surface totale du terrain d'assiette de l'ensemble immobilier initial. En jugeant que la méthode ainsi mise en œuvre par l'administration permettait de traduire fidèlement le prix de revient de la parcelle cédée et tenait suffisamment compte de la part prépondérante du bâti dans le prix d'acquisition, sans rechercher si, à la date d'acquisition, le rapport entre la valeur des constructions édifiées sur la parcelle détachée et la valeur totale des constructions était identique au rapport des surfaces des terrains d'assiette, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit. Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. et Mme C... sont donc fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros, à verser à M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 30 juin 2022 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Douai.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme C... une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et Mme D... B..., épouse C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 8 mars 2023 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Pierre Collin, M. Stéphane Verclytte, présidents de chambre ; M. Jonathan Bosredon, M. Hervé Cassagnabère, M. Christian Fournier, M. Frédéric Gueudar Delahaye, Mme Françoise Tomé, conseillers d'Etat et M. Vincent Mahé, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 31 mars 2023.

La présidente :

Signé : Mme Christine Maugüé

Le rapporteur :

Signé : M. Vincent Mahé

La secrétaire :

Signé : Mme Magali Méaulle


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 467175
Date de la décision : 31/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 31 mar. 2023, n° 467175
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Vincent Mahé
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SARL CABINET BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:467175.20230331
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