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13/12/2023 | FRANCE | N°23PA00418

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 13 décembre 2023, 23PA00418


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 31 mai 2022 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.





Par un jugement n° 2218111/3-2 du 30 décembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué, d'autre p

art, enjoint au préfet de police de délivrer à M. A... un titre de séjour.



Procédure devant la Cour :



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 31 mai 2022 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n° 2218111/3-2 du 30 décembre 2022, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué, d'autre part, enjoint au préfet de police de délivrer à M. A... un titre de séjour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 30 janvier 2023 et 10 février 2023, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2218111/3-2 du 30 décembre 2022 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour n'a pas méconnu l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté attaqué a été pris par une autorité compétente ;

- il est suffisamment motivé ;

- la décision de refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire ne méconnaissent pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant à 30 jours le délai de départ volontaire n'est entachée d'aucune erreur d'appréciation.

Par deux mémoires enregistrés respectivement le 5 avril 2023 et le 20 novembre 2023, M. A..., représenté par Me Koraytem, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 1 500 euros soit mis à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que les moyens soulevés par le préfet de police ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- et les observations de Me Koraytem pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien né le 30 octobre 1986, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, au cours de l'année 2017. Le 22 septembre 2021, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 31 mai 2022 le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Le préfet de police fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris, saisi par M. A..., a annulé cet arrêté et lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à M. A....

Sur le moyen d'annulation retenu par le Tribunal :

2. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. (...) ".

3. Pour annuler la décision de refus de séjour attaquée et, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, le Tribunal a considéré que M. A... justifiait d'un motif exceptionnel pour son admission au séjour compte tenu des caractéristiques et de la stabilité de son activité professionnelle.

4. Il ressort toutefois des pièces du dossier que si M. A... résidait habituellement en France depuis cinq ans à la date de l'arrêté attaqué, il n'exerçait une activité professionnelle que depuis trois ans à cette même date. Les circonstances qu'il exerce cette activité en exécution d'un unique contrat de travail à durée indéterminée à temps plein, dans le domaine de la restauration, ne suffisent pas à caractériser un motif exceptionnel au sens des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont accueilli le moyen tiré d'une méconnaissance de ces dispositions pour annuler l'arrêté attaqué.

5. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris et la Cour.

Sur les autres moyens :

6. En premier lieu, par un arrêté n° 2022-00263 du 18 mars 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de Paris le même jour, le préfet de police a donné délégation à Mme Ampolini, secrétaire administrative de classe supérieure, directement placée sous l'autorité de la cheffe du pôle " admission exceptionnelle au séjour ", pour signer tous arrêtés et décisions dans la limite de ses attributions en cas d'absence ou d'empêchement des autres délégataires, sans qu'il ressorte des pièces du dossier que ces derniers n'aient pas été absents ou empêchés lorsqu'elle a signé l'arrêté attaqué. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté.

7. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué mentionne les considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde et est, par suite, suffisamment motivé.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., alors célibataire sans enfant, est entré en France à l'âge de 31 ans, et n'y séjournait que depuis cinq années à la date de la décision attaquée. La circonstance qu'il soit devenu père d'un enfant postérieurement à la date de la décision attaquée, si elle peut le cas échéant fonder une nouvelle demande de titre de séjour, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué, qui s'apprécie à la date à laquelle il est pris. Dans ces conditions, malgré la circonstance qu'un frère et une sœur résident également en France, la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, M. A... n'est pas fondé à soutenir que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle.

10. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. Enfin, aux termes de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. (...) 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux (...) ". L'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Elle peut prolonger le délai accordé pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation. ".

12. En se bornant à soutenir, sans plus de précisions, que sa situation personnelle et l'impossibilité d'organiser son départ exigeaient un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, M. A... n'établit pas que le préfet de police aurait méconnu ces dispositions et commis une erreur manifeste d'appréciation dans la fixation à trente jours du délai fixé pour son départ volontaire.

13.Il résulte dès lors de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 31 mai 2022. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2218111/3-2 du 30 décembre 2022 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. B... A....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2023

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

B. AUVRAY

La greffière,

C. BUOTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA00418


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00418
Date de la décision : 13/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : KORAYTEM

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-13;23pa00418 ?
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