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10/01/2024 | FRANCE | N°22LY01681

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 10 janvier 2024, 22LY01681


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



L'association Animal Cross a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 29 mai 2020 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a autorisé la capture et l'euthanasie de bouquetins séropositifs à la brucellose en vue de la constitution d'un noyau sain, et ordonné le prélèvement de bouquetins présents sur la zone cœur du massif.



Par un jugement n° 2004294 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour



Par une requête enregistrée le 31 mai 2022, l'association Animal Cros...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Animal Cross a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 29 mai 2020 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a autorisé la capture et l'euthanasie de bouquetins séropositifs à la brucellose en vue de la constitution d'un noyau sain, et ordonné le prélèvement de bouquetins présents sur la zone cœur du massif.

Par un jugement n° 2004294 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 31 mai 2022, l'association Animal Cross, représentée par Me Thouy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 mars 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 29 mai 2020 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Grenoble, compte tenu de son objet, de ses activités en Haute-Savoie, de ce qu'elle est membre de l'association France Nature Environnement Haute-Savoie, et de ce que l'arrêté attaqué soulève des questions qui dépassent les seules circonstances locales, elle justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour le contester ;

- le préfet n'était pas compétent pour prendre les mesures contestées ;

- l'arrêté attaqué ne comporte pas toutes les mentions prévues pour une dérogation par l'arrêté ministériel du 19 février 2007 ;

- la participation du public n'a pas été prise en compte, eu égard au très faible délai entre la fin de la consultation et l'arrêté litigieux ;

- le préfet n'établit pas avoir vainement recherché des solutions alternatives moins radicales, notamment la séparation spatiale entre espèces ;

- l'abattage indiscriminé ne répond pas à un intérêt public.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 septembre 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le jugement n'est pas entaché d'irrégularité dès lors que la demande de première instance était irrecevable ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 14 septembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 27 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Joël Arnould, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Animal Cross relève appel du jugement du 17 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté, comme irrecevable, sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 29 mai 2020 autorisant, d'une part, la capture et l'euthanasie de bouquetins atteints de brucellose et ordonnant, d'autre part, l'abattage de vingt bouquetins jamais testés présents dans les secteurs dits A... ", du " Petit Bargy " et de " Jallouvre-Payre ".

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si, en principe, le fait qu'une décision administrative ait un champ d'application territorial limité fait obstacle à ce qu'une association ayant un ressort national justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour en demander l'annulation, il peut en aller autrement lorsque la décision soulève, en raison de ses implications, notamment dans le domaine des libertés publiques, des questions qui, par leur nature et leur objet, excèdent les seules circonstances locales.

3. Indépendamment de la compétence nationale des instances consultatives préalablement consultées, l'arrêté litigieux a pour seul objet d'autoriser la capture et l'abattage d'un nombre déterminé de bouquetins dans un massif montagneux précisément identifié. Portant dérogation à l'interdiction de capturer et de détruire des animaux d'une espèce protégée en application de l'article L. 411-1 du code de l'environnement en raison d'un contexte particulier, il ne soulève aucune question excédant ces seules circonstances locales, alors même notamment que d'autres dérogations pourraient être ultérieurement sollicitées pour d'autres parties du territoire. Si l'association Animal Cross fait valoir qu'elle est implantée localement en Haute-Savoie, où elle mène des actions, et qu'elle est membre de l'association France Nature Environnement Haute-Savoie, son intérêt pour agir doit être apprécié au regard de son propre objet, tel que défini par ses statuts, qui, à défaut de prévoir un champ d'action géographique plus restreint, doivent être regardés comme lui conférant un ressort national. Ainsi, elle ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'arrêté préfectoral du 29 mai 2020.

4. Il résulte de ce qui précède que l'association Animal Cross n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande comme irrecevable.

Sur les frais liés au litige :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par l'association Animal Cross.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Animal Cross est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Animal Cross et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Emilie Felmy, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Joël Arnould, premier conseiller,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 janvier 2024.

Le rapporteur,

Joël ArnouldLa présidente,

Emilie Felmy

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY01681


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01681
Date de la décision : 10/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-01-04-01-02 Procédure. - Introduction de l'instance. - Intérêt pour agir. - Absence d'intérêt. - Syndicats, groupements et associations.


Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: M. Joël ARNOULD
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : THOUY

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-10;22ly01681 ?
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