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27/06/2013 | FRANCE | N°12BX02931

France | France, Cour administrative d'appel de, 1ère chambre - formation à 3, 27 juin 2013, 12BX02931


Vu la requête, enregistrée au greffe le 23 novembre 2012, présentée pour Mme C...B...épouse D...demeurant..., par Me David-Esposito, avocat ;

Mme D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200395 en date du 13 septembre 2012 du administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 septembre 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le Maroc comme pays de renvoi ;

2°)

d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui...

Vu la requête, enregistrée au greffe le 23 novembre 2012, présentée pour Mme C...B...épouse D...demeurant..., par Me David-Esposito, avocat ;

Mme D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200395 en date du 13 septembre 2012 du administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 septembre 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le Maroc comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui " rendre sa carte de résident " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à son avocat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions sur proposition du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 2013 :

- le rapport de Mme Catherine Girault, président ;

1. Considérant que Mme B...épouseD..., de nationalité marocaine, née le 3 décembre 1979, est entrée régulièrement en France le 18 mai 2009 munie d'un visa de long séjour ; qu'elle a bénéficié le 2 juillet 2010 d'un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale " en qualité de conjointe de ressortissant français ; qu'elle a déposé le 18 avril 2011 une demande tendant au renouvellement de son titre de séjour ; que par un arrêté du 21 septembre 2011, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays dont elle a la nationalité comme pays de renvoi ; que Mme D...relève appel du jugement n° 1200395 en date du 13 septembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Considérant que, par une décision du 29 novembre 2012, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme D...l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, les conclusions tendant à ce que soit prononcée son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

3. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

4. Considérant que si Mme D...reproche à la décision contestée une motivation insuffisante en fait, l'arrêté du 21 septembre 2011 mentionne en premier lieu que l'enquête conduite par les services de la gendarmerie nationale n'a pas permis d'établir la réalité d'une vie commune entre l'intéressée et son époux, ce qui est corroboré par deux courriers du mari de l'intéressée des 16 et 25 août 2011 confirmant son départ du domicile conjugal et ainsi l'absence de communauté de vie, et relève ensuite que si elle présente un contrat de travail à temps partiel établi par la société GSF Atlantis ainsi que des attestations d'emploi établies par le centre national du chèque emploi-service universel, elle ne justifie pas détenir, outre le visa long séjour délivré à ce titre, le contrat ou l'autorisation de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, ni le certificat de contrôle médical requis par les textes en vigueur pour bénéficier d'un titre de séjour en qualité de salarié ; qu'ainsi, et contrairement à ce que Mme D...soutient, cette décision comporte les éléments de fait sur lesquels le préfet s'est fondé pour refuser de lui délivrer un titre de séjour ; qu'elle est dès lors suffisamment motivée en fait au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;

5. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 du même code : " Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale." ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...a épousé le 27 juin 2008 M. A...D..., ressortissant français ; que le 2 juillet 2010 une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " lui a été délivrée ; qu'elle a sollicité, le 18 avril 2011, le renouvellement de son titre de séjour ; que, toutefois, le compte-rendu d'enquête de communauté de vie en date du 12 juin 2011 établi par la gendarmerie a révélé que si la visite au domicile des intéressés montrait qu'ils partageaient une communauté de vie, le mari a déclaré que le lendemain son épouse avait annoncé son intention de le quitter sitôt qu'elle aurait une carte de séjour, et a lui-même indiqué que la communauté de vie ne devrait plus être effective à compter du mois d'août 2011, date à laquelle il avait l'intention de déménager seul ; que par deux courriers du 25 août 2011 et du 8 septembre 2011 M. D...a fait part au préfet de ce qu'il ne vivait plus avec sa femme et désirait que lui soit notifiée une expulsion ; que si Mme D...conteste ce procès-verbal et ces lettres en faisant valoir que la communauté de vie a perduré jusqu'au 4 octobre 2011, date à laquelle son mari l'a chassée du domicile conjugal après avoir exercé sur elle des violences, elle ne l'établit pas ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du témoignage d'une voisine, que c'est début septembre qu'elle a trouvé Mme D... en pleurs sur le palier au milieu d'affaires jetées en vrac ; qu'un médecin atteste avoir été consulté pour violences le 7 septembre 2011 ; que si un autre médecin a été consulté le 6 octobre 2011 pour de nouvelles violences qui auraient été exercées le 4 octobre 2011, les circonstances et la date ne ressortent pas des pièces du dossier ; qu'ainsi en l'absence de certitude sur la date de cessation de la communauté de vie, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait entaché sa décision du 21 septembre 2011 d'une erreur de fait sur le moment de cette rupture ;

7. Considérant en revanche que, contrairement à ce que soutient le préfet, la réalité des violences conjugales subies par Mme D...est établie par les trois certificats médicaux produits au dossier, les attestations de témoins et la procédure pénale diligentée à l'encontre de M. D...pour les violences exercées le 4 octobre 2011 à l'encontre de son épouse suite à sa plainte du 7 octobre 2011, pour lesquelles il a fait l'objet d'un rappel à la loi en 2012 ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D...ait obtenu l'ordonnance de protection du juge aux affaires familiales prévue à l'article 515-9 du code civil et mentionnée à l'article L.316-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet, au moment de prendre son arrêté, n'avait pas connaissance de ces violences, qui ne lui ont été signalées que lors du recours gracieux formé contre son arrêté, le 13 octobre 2011, dont le rejet n'est pas contesté ; que, dès lors, en refusant le 21 septembre 2011 un titre de séjour à Mme D..., le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 431-2 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que MmeD..., née au Maroc en 1979, est entrée en France le 18 mai 2009 à la suite de son mariage avec un ressortissant français, qu'aucun enfant n'est né de cette union, qu'elle n'est pas dépourvue de toutes attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et ses deux frères et où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente ans ; que dans ces conditions, et en dépit de ses efforts pour s'intégrer dans la société française, la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; que le préfet de la Haute-Garonne n'a dès lors pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme D...;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l' obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, applicable en l'espèce : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) : ( ...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. /(...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que la motivation de l'obligation de quitter le territoire prise, comme en l'espèce, sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte du refus de titre de séjour ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, le refus de titre de séjour est suffisamment motivé ; que, par suite, doit être écarté le moyen tiré par Mme D...de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait insuffisamment motivée ;

11. Considérant que pour les motifs qui ont été précédemment exposés, le préfet de la Haute-Garonne, en prenant la mesure d'éloignement attaquée, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de Mme D... ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance, que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de Mme D...dirigées contre l'arrêté contesté, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de quelque somme que ce soit au profit de l'avocat de MmeD..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête de Mme D...est rejetée.

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No 12BX02931


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12BX02931
Date de la décision : 27/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : DAVID ESPOSITO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.de;arret;2013-06-27;12bx02931 ?
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