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02/07/2007 | FRANCE | N°04BX02082

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 02 juillet 2007, 04BX02082


Vu le recours, enregistré au greffe de la cour en télécopie le 10 décembre 2004 et en original le 14 décembre 2004, présenté pour le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 30 juillet 2004, par lequel le tribunal administratif de Toulouse, d'une part, a annulé son arrêté du 26 février 2002 prononçant la révocation de M. Philippe X ainsi que sa décision du 16 avril 2003 confirmant cette révocation et lui a enjoint de procéder sous un délai de deux mois à la réinté

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Vu le recours, enregistré au greffe de la cour en télécopie le 10 décembre 2004 et en original le 14 décembre 2004, présenté pour le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 30 juillet 2004, par lequel le tribunal administratif de Toulouse, d'une part, a annulé son arrêté du 26 février 2002 prononçant la révocation de M. Philippe X ainsi que sa décision du 16 avril 2003 confirmant cette révocation et lui a enjoint de procéder sous un délai de deux mois à la réintégration de M. X et à la reconstitution de sa carrière, d'autre part, a condamné l'Etat à verser à M. X une indemnité de 8 000 euros ainsi que la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761.1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. X devant le tribunal administratif de Toulouse ;

…………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les lois n° 83-634 du 13 juillet 1983 et n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiées ;

Vu le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 modifié notamment par le décret n° 99-101 du 11 février 1999 ;

Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juin 2007 :

- le rapport de Mme Boulard ;

- et les conclusions de M. Pouzoulet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un arrêté du 26 février 2002, le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE a prononcé la révocation de M. X, professeur certifié de génie civil ; que le motif de cette sanction repose, selon les termes de cet arrêté, sur la « fraude commise » par M. X le 14 février 2001, lors d'une épreuve du concours interne de l'agrégation de génie civil ; qu'après avis rendu le 7 janvier 2003 par la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, laquelle a proposé de substituer la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans à celle de la révocation, le ministre a décidé, le 16 avril 2003, de confirmer cette dernière sanction ; que, saisi par M. X d'une double demande aux fins d'annulation et de condamnation, le tribunal administratif de Toulouse, d'une part, a annulé, comme entachées d'une erreur manifeste d'appréciation, les décisions de révocation prises par le ministre les 26 février 2002 et 16 avril 2003, puis lui a enjoint de réintégrer M. X et de reconstituer sa carrière, d'autre part, a condamné l'Etat à verser à M. X une indemnité dont il a limité le montant à la somme de 8 000 euros en raison de la faute commise par ce dernier ; que le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse ; que, par la voie de l'appel incident, M. X conteste ce même jugement en ce qu'il lui a accordé une indemnité qu'il estime insuffisante ;

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la recevabilité du recours du ministre :

Considérant que le recours du ministre, dirigé contre le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 30 juillet 2004, lequel lui a été notifié le 11 octobre 2004, a été enregistré au greffe de la cour le 10 décembre 2004 sous la forme d'une télécopie qui a été confirmée par la réception de l'original ; que ce recours est donc intervenu dans le délai d'appel de deux mois imparti par l'article R. 811-2 du code de justice administrative ; que le moyen tiré de ce que le recours enregistré le 10 décembre 2004 ne serait pas accompagné du jugement attaqué manque en fait ;

Au fond :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, candidat au concours interne de l'agrégation de génie civil organisé en 2001, a utilisé lors de la première épreuve écrite de ce concours, dite « épreuve prenant appui sur un système industriel », un précis de génie civil dont il résulte clairement du règlement de ce concours que son usage n'était pas autorisé ; que, si M. X fait valoir que la consultation par lui de cet ouvrage ne résultait pas d'une intention de frauder et soutient qu'il l'a consulté « machinalement », comme lors de la préparation de ses cours, les surveillants, qui avaient procédé avant le début de l'épreuve à la vérification du matériel et des documents déposés sur les tables pouvant être utilisés par les deux candidats concourant au titre de cette spécialité dans la salle qu'ils contrôlaient, ont découvert ce précis, en partie masqué par la copie de M. X, lequel admet l'avoir sorti pendant l'épreuve de son sac ; que, dans ces conditions, la réalité de la fraude doit être regardée comme établie ; qu'elle est de nature à justifier légalement une sanction disciplinaire ; qu'eu égard à la nature des fonctions et obligations qui incombent au personnel enseignant ainsi qu'à la nécessité d'assurer le bon fonctionnement du service public de l'éducation nationale, l'autorité administrative n'a pas, en prononçant la révocation de M. X, entaché sa décision d'erreur manifeste, alors même que le comportement antérieur de ce dernier n'avait donné lieu à aucune sanction et qu'il bénéficiait de bonnes appréciations quant à sa manière de servir ; que c'est donc à tort que, pour annuler les décisions de révocation contestées, le tribunal administratif de Toulouse a estimé qu'elles étaient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le requérant ;

Considérant, en premier lieu, que les deux décisions de révocation attaquées ont été signées par M. Duwoye, directeur des personnels enseignants, qui avait reçu délégation pour ce faire par un arrêté du MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE du 12 avril 2000 publié au Journal officiel de la République française le 19 avril 2000 ; qu'ainsi, le moyen tiré de la prétendue incompétence de l'auteur des décisions contestées doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article 37 du décret du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs certifiés, dans sa rédaction issue du décret n° 99-101 du 11 février 1999, donnait à la rectrice de l'académie de Toulouse le pouvoir de saisir la commission administrative paritaire académique siégeant en conseil de discipline, et ainsi d'engager la procédure disciplinaire à l'encontre de M. X, ce dont il a été informé par lettre du 22 octobre 2001, alors même qu'à l'issue de cette procédure la sanction de révocation ne pouvait être prononcée que par le ministre ou son délégataire ;

Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que la délégataire de la rectrice de l'académie de Toulouse, directrice des ressources humaines et signataire de la lettre susmentionnée du 22 octobre 2001 informant M. X de l'engagement de la procédure disciplinaire à son encontre, ait siégé en qualité de membre représentant l'administration à la séance du conseil de discipline appelé à donner son avis sur son cas n'est pas, par elle-même, de nature à entacher d'irrégularité cette procédure ;

Considérant, en quatrième lieu, que ni le conseil de discipline ni la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat ne présentent le caractère d'une juridiction, non plus que celui d'un tribunal, au sens des stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, M. X ne peut utilement invoquer une méconnaissance de ces stipulations pour critiquer la procédure suivie devant ces organismes ; que lesdites stipulations n'ont ni pour objet, ni pour effet, d'interdire à l'autorité investie du pouvoir disciplinaire de sanctionner des faits reprochés à un agent public, dès lors que ces faits sont établis ;

Considérant, en cinquième lieu, que la circonstance que le ministre ait, par sa décision du 16 avril 2003, maintenu la sanction de la révocation après l'avis de la commission de recours qui proposait d'y substituer l'exclusion de fonctions pendant deux ans ne révèle pas que cet avis, lequel ne lie pas l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, n'ait pas été pris en considération lorsque cette décision a été prise ni que le ministre se soit alors abstenu d'examiner la situation individuelle de l'intéressé ;

Considérant, enfin, que l'exclusion de M. X du concours auquel il était candidat ne faisait pas obstacle à ce qu'il fût révoqué de ses fonctions de professeur, dès lors que cette exclusion et cette révocation poursuivent des objectifs distincts et sont de nature différente ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'administration a, en révoquant M. X, méconnu le principe de non-cumul des peines doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que LE MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé ses décisions de révocation prises à l'encontre de M. X et à demander l'annulation du jugement sur ce point ; qu'il est aussi fondé à demander, par voie de conséquence, l'annulation de ce même jugement en tant qu'il lui enjoint de procéder à la réintégration de M. X et à la reconstitution de sa carrière ;

Considérant que la révocation de M. X, qui n'est pas entachée d'illégalité, ne peut engager la responsabilité pour faute de l'Etat ; qu'il suit de là que le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE est également fondé à demander l'annulation du jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité fautive et condamné l'Etat à verser à M. X une indemnité de 8 000 euros ;

Sur l'appel incident :

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que l'appel incident de M. X, tendant au rehaussement du montant de l'indemnité qui lui a été allouée à tort par le jugement attaqué, ne peut être accueilli ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à rembourser à M. X les frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1 à 4 du jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 30 juillet 2004 sont annulés.

Article 2 : L'appel incident de M. X, ainsi que sa demande présentée devant le tribunal administratif de Toulouse sont rejetés.

4

No 04BX02082


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 04BX02082
Date de la décision : 02/07/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Dominique BOULARD
Rapporteur public ?: M. POUZOULET
Avocat(s) : FAURE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2007-07-02;04bx02082 ?
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