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22/10/2007 | FRANCE | N°06BX02059

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 22 octobre 2007, 06BX02059


Vu, I, sous le n° 06BX02059, la requête enregistrée au greffe de la cour le 25 septembre 2006, présentée pour M. et Mme Michel X demeurant ... ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-03699 en date du 27 juillet 2006, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1998 ;

2°) de leur accorder la décharge des droits et pénalités contestés ;

) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761...

Vu, I, sous le n° 06BX02059, la requête enregistrée au greffe de la cour le 25 septembre 2006, présentée pour M. et Mme Michel X demeurant ... ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 03-03699 en date du 27 juillet 2006, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1998 ;

2°) de leur accorder la décharge des droits et pénalités contestés ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………….

Vu, II, sous le n° 06BX02390, le recours enregistré au greffe de la cour en télécopie le 22 novembre 2006 et en original le 29 novembre 2006, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, qui demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1 et 2 du jugement n° 01-02547 du 27 juillet 2006, par lesquels le tribunal administratif de Bordeaux a ordonné la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles M. et Mme X ont été assujettis au titre des années 1995 à 1997 ;

2°) de rétablir M. et Mme X au rôle de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales à raison des droits et pénalités dont le tribunal a ordonné la décharge ;

…………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 2007 :

- le rapport de Mme Boulard ;

- et les conclusions de M. Pouzoulet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, dans l'instance n° 06BX02059, M. et Mme X contestent le jugement n° 03-03699 du 27 juillet 2006 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à la décharge du rappel d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui leur a été réclamé au titre de 1998 ; que, dans l'instance n° 06BX02390, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE fait appel du jugement n° 01-02547 du tribunal administratif de Bordeaux du même jour en ce qu'il a ordonné la réduction des rappels d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mis à la charge de M. et Mme X au titre des années 1995 à 1997 ; qu'il y a lieu de joindre ces deux affaires qui concernent les mêmes contribuables pour statuer par un seul arrêt ;

Sur l'instance n° 06BX02059 :

Considérant qu'en vertu de l'article 111 c du code général des impôts sont considérés comme des revenus distribués « les rémunérations et avantages occultes » ;

Considérant que les droits en litige procèdent de ce que l'administration des impôts a taxé au titre de 1998, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions précitées de l'article 111 c du code général des impôts, l'avantage dont elle a estimé que M. et Mme X avaient bénéficié lorsque la SA Entreprise LAROCHE, qui avait M. LAROCHE pour dirigeant, leur a vendu en 1998, après l'avoir rénovée de 1995 à 1997, la propriété immobilière dénommée Château Labrousse acquise par elle en 1995 ; que, pour effectuer cette taxation, l'administration s'est fondée sur ce que le prix consenti à M. et Mme LAROCHE était inférieur au coût d'acquisition et de rénovation de cette propriété supporté par la société ; que la seule circonstance que l'administration ait initialement entendu imposer les revenus distribués au titre des années 1995 à 1997, à raison des dépenses de rénovation réintégrées dans les résultats imposables de l'entreprise des mêmes années, n'entache pas d'irrégularité la procédure au terme de laquelle, après une notification du 19 décembre 2001 dont la régularité n'est pas contestée, l'imposition en litige a été établie au titre de 1998 ; qu'il ne résulte pas des termes du jugement attaqué que les premiers juges se soient mépris sur ce point ;

Considérant qu'en cas de vente par une société à un prix que les parties ont délibérément minoré par rapport à la valeur de l'objet de la transaction, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées de l'article 111 c du code général des impôts, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du co-contractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause ; que la preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsque est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer, et, pour le co-contractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ;

Considérant que la SA Entreprise LAROCHE, entreprise de travaux publics, qui venait d'ajouter à son objet social l'activité de marchand de biens, a acheté en 1995 le château Labrousse situé à Saint-Martin-Lacaussade, pour la somme de 1 200 000 F, en se plaçant sous le régime des marchands de biens ; que cette propriété a été revendue en 1998 à M. et Mme LAROCHE, qui en ont fait leur domicile privé, pour la somme de 3 200 000 F ; que l'avantage imposé par l'administration entre les mains des requérants, pour un montant de 3 887 980 F, correspond à la différence entre ce prix de vente de 3 200 000F et le prix d'acquisition du château majoré des dépenses de rénovation évaluées par le service des impôts à la somme de 5 887 980 F, soit un coût total de 7 087 980 F ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des constatations opérées par le juge pénal à l'encontre de M. Michel LAROCHE, reconnu coupable d'avoir utilisé des fonds sociaux à des fins personnelles, que les travaux de rénovation entrepris sur cette propriété de 1995 à 1997 par la société ont été comptabilisés, pour une part, comme des travaux afférents à la dite propriété, soit une somme de 1 702 374 F dont le montant n'est pas contesté, et, pour la majeure partie, de manière irrégulière, comme des travaux se rapportant à des chantiers de travaux publics réalisés à Blaye et à Eysines par la société, afin de minorer la valeur de rachat du bien ; que M. et Mme LAROCHE ne contestent pas que des travaux de rénovation ont fait l'objet d'imputations comptables irrégulières, mais soutiennent que le coût total de l'opération serait moindre que celui retenu par le service des impôts ; que, toutefois, il ne ressort pas des énonciations de l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 25 septembre 2001, faisant état de dépenses personnelles de différentes natures prises en charge par la société « pour un montant d'au moins 4 500 000 F », que l'estimation des travaux de rénovation serait exagérée ; que l'administration établit au contraire que les travaux irrégulièrement comptabilisés de 1995 à 1997, qui ne se rapportent pas aux travaux publics réalisés par la société mais à la rénovation du château Labrousse, s'élèvent à la somme de 4 185 606 F, les requérants n'étayant pas de précisions suffisantes leurs moyens tirés de paiements à des sous-traitants et de factures prises en compte deux fois, non plus que celui tenant à des règlements par eux-même de travaux ; qu'ainsi, l'administration démontre que, pour acheter le château Labrousse et le rénover, la SA Entreprise LAROCHE a dépensé la somme totale de 7 087 980 F ; que la différence entre le prix de revient de la propriété effectivement supporté par la société, qui est celui que M. et Mme LAROCHE auraient dû payer s'ils avaient mené ces opérations personnellement, et le prix auquel l'entreprise a accepté de leur vendre ce bien représente un avantage accordé aux cessionnaires ; que, si les requérants se prévalent de ce que la valeur vénale de la propriété en cause aurait été estimée à un prix moindre en matière de droits d'enregistrement et de ce que des expertises foncières ont estimé la valeur de la propriété à un prix équivalent au prix de vente, d'une part, la position prise en matière de droit d'enregistrement n'est pas opposable en matière d'impôt sur le revenu, d'autre part, la réfaction faite par les experts sur la valeur des travaux est motivée par le fait que ces travaux incorporent « une part de convenance » propre à celui qui les a ordonné, lequel est en l'occurrence l'acquéreur qui en a bénéficié ; qu'ainsi, le prix de revient de la propriété doit être regardé comme correspondant à sa valeur réelle lors de la vente faite à M. et Mme LAROCHE ; que, dans ces conditions et eu égard à la nature de la propriété en cause, aux modalités de son achat puis de sa vente, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elle ait été précédée d'un réel démarchage commercial auprès de tiers, ainsi qu'aux modalités suivant lesquelles ont été exécutées et frauduleusement comptabilisées les dépenses de rénovation, l'administration doit être regardée comme établissant que la cession du château Labrousse en 1998 procède d'une libéralité et que l'écart entre le prix de cession et la valeur réelle de la propriété est constitutif d'un avantage occulte ;

Considérant qu'en se bornant à demander au juge de l'impôt de « dire que la mauvaise foi n'est pas qualifiée », les requérants n'assortissent pas leur moyen tenant aux pénalités mises à leur charge de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme LAROCHE ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à la décharge des droits et pénalités en litige au titre de 1998 ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au remboursement des frais exposés, présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées ;

Sur l'instance n° 06BX2390 :

En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers :

Considérant que l'administration des impôts a taxé entre les mains de M. LAROCHE dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement de l'article 109-1 du code général des impôts, des frais de mission exposés par la SA Entreprise LAROCHE, qu'elle a réintégrés dans les résultats imposables de la société et qu'elle a estimé avoir été distribués à M. LAROCHE, soit les sommes de 88 110 F au titre de 1995, 120 410 F au titre de 1996 et 59 138 F au titre de 1997 ; que le tribunal administratif a ordonné la décharge des droits correspondants au motif que le service des impôts n'avait pas justifié du « caractère non déductible des frais de représentation ni de la disposition effective desdites sommes aux requérants » ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre, la charge de la preuve n'incombe pas à M. et Mme LAROCHE du seul fait que les revenus en cause se rapportent à des charges déduites par la société ; que l'administration ne se prévalant d'aucune circonstance de la procédure de redressement suivie à l'égard de M. et Mme LAROCHE personnellement qui conduirait à leur attribuer la charge de la preuve, il lui appartient de démontrer que les sommes en litige font partie des bénéfices imposables de la société et qu'elles ont été appréhendées par les contribuables ; que le ministre ne s'acquitte pas de cette preuve en se bornant, d'une part, à critiquer les éléments de justifications apportés par M. LAROCHE ou à évoquer, de manière générale, la nature des dépenses dont il s'agit ; que, d'autre part, le seul fait que M. LAROCHE soit président-directeur général de la SA Entreprise LAROCHE ne suffit pas à démontrer qu'il a effectivement disposé des sommes en cause ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont ordonné la décharge des droits correspondants ; que, si le ministre demande, à titre subsidiaire, que les sommes en litige soient imposées dans la catégorie des traitements et salaires, il n'est pas fondé à demander une telle substitution de base légale, dès lors que leur appréhension par M. LAROCHE n'est pas établie ;

En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :

Considérant qu'à l'issue de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. LAROCHE, l'administration a imposé, sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, comme revenu d'origine indéterminée au titre de 1997, la somme de 50 000 F correspondant à un crédit bancaire enregistré sur le compte de M. LAROCHE au cours de la même année ; que, les premiers juges, devant lesquels M. LAROCHE soutenait que la somme en cause correspondait au remboursement d'un prêt amical, ont estimé que les attestations des différents intervenants concernés par l'opération et les copies des chèques produites par le requérant permettaient de justifier de l'origine du versement en litige ; que ces attestations circonstanciées, si elles n'ont pas de date certaine, sont corroborées par les pièces bancaires et permettent des recoupements suffisants pour établir que le crédit en litige représente le remboursement d'un prêt ; qu'ainsi, la preuve de l'origine et du caractère non imposable de la somme litigieuse doit être regardée comme apportée ; que le ministre n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé la décharge des droits et pénalités afférents à ce chef de redressement ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 06BX02059 de M. et Mme Michel LAROCHE ainsi que le recours n° 06BX02390 du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE sont rejetés.

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Nos 06BX02059,06BX02390


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 06BX02059
Date de la décision : 22/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Dominique BOULARD
Rapporteur public ?: M. POUZOULET
Avocat(s) : MOREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2007-10-22;06bx02059 ?
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