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08/07/2008 | FRANCE | N°07BX00152

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 08 juillet 2008, 07BX00152


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 18 janvier 2007, présenté par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE ;

Le MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0404176, en date du 9 novembre 2006, par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a annulé, à la demande de l'association « Union Midi-Pyrénées nature et environnement (UMINATE) », de l'association « Nature Midi-Pyrénées » et de l'association « Nature Comminges », l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 30 septembre 2004, modifiant

un précédent arrêté du 13 juillet 2004, en tant qu'il a autorisé le prélè...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 18 janvier 2007, présenté par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE ;

Le MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0404176, en date du 9 novembre 2006, par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a annulé, à la demande de l'association « Union Midi-Pyrénées nature et environnement (UMINATE) », de l'association « Nature Midi-Pyrénées » et de l'association « Nature Comminges », l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 30 septembre 2004, modifiant un précédent arrêté du 13 juillet 2004, en tant qu'il a autorisé le prélèvement, dans la limite d'un par chasseur et par saison, du lagopède alpin ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la communauté européenne ;

Vu la directive européenne n° 79/409/CEE du 2 avril 1979 ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2008 :

- le rapport de M. Zupan, premier conseiller,

- les observations de Me Pais pour l'association « Union Midi-Pyrénées nature et environnement »,

- et les conclusions de M. Vié, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par arrêté du 30 septembre 2004, modifiant son précédent arrêté du 13 juillet 2004 portant ouverture et clôture de la chasse pour la campagne 2004-2005, le préfet de la Haute-Garonne a défini, au vu d'opérations d'échantillonnage effectuées au cours de l'été, le « prélèvement maximal autorisé » de trois espèces d'oiseaux sauvages ; que le MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE demande à la Cour d'annuler le jugement, en date du 9 novembre 2006, par lequel le Tribunal administratif de Toulouse, à la demande de l'association « Union Midi-Pyrénées nature et environnement », de l'association « Nature Midi-Pyrénées » et de l'association « Nature Comminges », a annulé ledit arrêté en tant qu'il a ainsi autorisé le prélèvement, dans la limite d'un par chasseur et par saison, du lagopède alpin ;

Sur l'intervention de la Fédération départementale des chasseurs de la Haute-Garonne :

Considérant que la Fédération départementale des chasseurs de la Haute-Garonne justifie d'un intérêt au maintien de l'arrêté contesté ; que son intervention volontaire doit dès lors être admise ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant que si la période de chasse au lagopède alpin définie par l'arrêté contesté, qui ne l'a autorisée que jusqu'au 24 octobre 2004, était expirée à la date à laquelle les associations « Union Midi-Pyrénées nature et environnement », « Nature Midi-Pyrénées » et « Nature Comminges » ont saisi le Tribunal administratif de Toulouse, ledit arrêté n'en demeurait pas moins alors en vigueur et avait d'ailleurs produit des effets en rapport avec les intérêts collectifs dont ces associations ont pour objet statutaire d'assurer la défense ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la Fédération départementale des chasseurs de la Haute-Garonne, cette demande ne pouvait être regardée comme dépourvue d'objet et, par suite, irrecevable ;

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

Considérant qu'il ressort clairement des stipulations de l'article 249 (anciennement 189) du traité instituant la communauté européenne que les directives du conseil des communautés européennes lient les Etats membres « quant aux résultats à atteindre » ; que si, pour atteindre ces résultats, les autorités nationales, qui sont tenues d'adapter leur législation et leur réglementation aux directives qui leur sont destinées, restent seules compétentes pour décider de la forme à donner à l'exécution de ces directives et pour fixer elles-mêmes, sous le contrôle des juridictions nationales, les moyens propres à leur faire produire leurs effets en droit interne, ces autorités ne peuvent légalement, après l'expiration des délais impartis, ni édicter des dispositions réglementaires qui seraient contraires aux objectifs définis par les directives, ni laisser subsister des dispositions réglementaires qui ne seraient plus compatibles avec leurs objectifs ;

Considérant que, selon les dispositions de l'article 4 de la directive du Conseil n° 79/409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages, les Etats membres ont l'obligation « d'adopter des mesures de conservation spéciale concernant l'habitat des espèces d'oiseaux énoncées à l'annexe I afin d'assurer leur survie et leur reproduction dans leur aire de distribution » ; qu'aux termes de l'article 7 de la même directive : « 1. En raison de leur niveau de population, de leur distribution géographique et de leur taux de reproductivité dans l'ensemble de la Communauté, les espèces énumérées à l'annexe II peuvent être l'objet d'actes de chasse dans le cadre de la législation nationale. Les États membres veillent à ce que la chasse de ces espèces ne compromette pas les efforts de conservation entrepris dans leur aire de distribution. 2. Les espèces énumérées à l'annexe II partie 1 peuvent être chassées dans la zone géographique maritime et terrestre d'application de la présente directive. (...) 4. Les États membres s'assurent que la pratique de la chasse (...), telle qu'elle découle de l'application des mesures nationales en vigueur, respecte les principes d'une utilisation raisonnée et d'une régulation équilibrée du point de vue écologique des espèces d'oiseaux concernées, et que cette pratique soit compatible, en ce qui concerne la population de ces espèces (...), avec les dispositions découlant de l'article 2 » ; que l'article 2 auquel il est ainsi renvoyé impose aux Etats-membres de prendre les mesures nécessaires pour maintenir ou adapter la population des espèces vulnérables « à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, compte tenu des exigences économiques et récréationnelles » ; qu'il résulte de ces dispositions que si la chasse au lagopède alpin, ou lagopus mutus, qui figure à la fois dans l'annexe I et dans la première partie de l'annexe II de la directive, n'est pas interdite de manière générale et absolue sur l'ensemble du territoire, elle doit être réglementée de manière à faire l'objet d'une protection, afin d'assurer la conservation de cette espèce ;

Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article L. 425-5 du code de l'environnement : « Dans les conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat, le ministre peut, après avis de la fédération nationale des chasseurs et de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, fixer le nombre maximal d'animaux qu'un chasseur est autorisé à prélever dans une période déterminée sur un territoire donné. Dans les mêmes conditions, le préfet peut, sur proposition de la fédération départementale des chasseurs, fixer le nombre maximal d'animaux qu'un chasseur ou un groupe de chasseurs est autorisé à prélever dans une période déterminée sur un territoire donné. Ces dispositions prennent en compte les orientations du schéma départemental de gestion cynégétique » ; qu'aux termes de l'article R. 225-16 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté contesté : « Après avis du conseil départemental de la chasse et de la faune sauvage, de la fédération départementale des chasseurs et de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, le préfet peut fixer par arrêté le nombre maximal d'animaux d'une ou plusieurs espèces pour lesquelles un prélèvement maximal autorisé n'a pas été fixé par arrêté ministériel, qu'un chasseur est autorisé à prélever pendant une période déterminée, sur un territoire donné » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de rapports établis par la direction départementale de l'agriculture et de la forêt et par l'office départemental de la chasse et de la faune sauvage, que la population de lagopèdes alpins tend à diminuer dans l'ensemble du massif pyrénéen, en raison notamment de la fréquentation touristique de celui-ci et de l'évolution générale du climat ; qu'il n'est pas contesté que l'indice de reproduction de cette espèce, dans le département de la Haute-Garonne, est inférieur à un, seuil en deçà duquel la direction départementale de l'agriculture et de la forêt avait préconisé la suspension de la chasse ; que, dans ces conditions, nonobstant la circonstance que les personnes pratiquant la chasse au lagopède alpin sont peu nombreuses et que, partant, l'impact des prélèvements occasionnés par cette chasse demeure relativement limité, les premiers juges ont à bon droit estimé, alors que l'administration n'a pas communiqué les résultats des opérations d'échantillonnage réalisées au cours de l'été 2004, que la mesure litigieuse, divisible des autres dispositions de l'arrêté contesté, était de nature à porter atteinte aux exigences de la conservation de l'espèce en cause, et méconnaissait dès lors les objectifs définis par la directive européenne du 2 avril 1979 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a prononcé l'annulation partielle de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 30 septembre 2004 ;

D É C I D E :

Article 1er : L'intervention de la fédération départementale des chasseurs de la Haute-Garonne est admise.

Article 2 : Le recours du MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE est rejeté.

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N° 07BX00152


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 07BX00152
Date de la décision : 08/07/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: M. David ZUPAN
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : RUFFIE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-07-08;07bx00152 ?
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