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26/03/2009 | FRANCE | N°08BX01863

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 26 mars 2009, 08BX01863


Vu la déclaration d'appel et la requête, enregistrées les 22 juillet et 4 septembre 2008, présentées pour M. Abdulah X, demeurant à l'Accueil social du grand ramier, 10 avenue du grand ramier à TOULOUSE (31400), par Me Amari de Beaufort ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801595 et 0801596 du 19 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 février 2008 du préfet de la Haute-Garonne portant refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et

fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir...

Vu la déclaration d'appel et la requête, enregistrées les 22 juillet et 4 septembre 2008, présentées pour M. Abdulah X, demeurant à l'Accueil social du grand ramier, 10 avenue du grand ramier à TOULOUSE (31400), par Me Amari de Beaufort ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801595 et 0801596 du 19 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 février 2008 du préfet de la Haute-Garonne portant refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour et de réexaminer sa situation ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son avocat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2009 :

- le rapport de Mme Jayat, président assesseur,

- les observations de Me Boyancé, pour M. X,

- et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;

Considérant que M. X, de nationalité libyenne, est entré en France le 29 septembre 2005 sous couvert d'un visa d'une durée de quatre-vingt-dix jours portant la mention « voyage d'affaires » ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile par décision du 28 février 2006, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 4 janvier 2008 ; que, par arrêté du 12 février 2008, le préfet de la Haute-Garonne lui a opposé un refus de titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que M. X fait appel du jugement du 19 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 février 2008 ;

Sur la recevabilité du mémoire en défense :

Considérant que, par arrêté du 4 juillet 2008 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de la Haute-Garonne a donné délégation à M. Patrick Crézé, secrétaire général, et en cas d'absence ou d'empêchement de celui-ci, à M. Bruno André, sous-préfet chargé de mission, à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département à l'exception des arrêtés de conflit ; que, par suite, le moyen tiré de ce que M. André, signataire du mémoire en défense enregistré le 23 janvier 2009, présenté pour le préfet de la Haute-Garonne, ne justifie pas d'une délégation de signature régulièrement publiée manque en fait ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le demandeur n'a pas invoqué devant les premiers juges, à l'encontre de la mesure d'obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'absence de réponse à ce moyen n'entache donc pas le jugement d'irrégularité ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 : « Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales ... » ;

Considérant que M. X n'a demandé qu'un titre de séjour en qualité de réfugié ; que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que, dans ce cas, sa décision n'est pas au nombre des décisions devant être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi du 11 juillet 1979 et n'a, dès lors, pas à être précédée de la procédure prévue par l'article 24 précité de la loi du 12 avril 2000 ; que, par suite, en admettant que le préfet, en rejetant la demande d'admission au séjour de M. X « à quelque titre que ce soit », ait entendu refuser à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour à un autre titre que celui de réfugié, sa décision sur ce point n'était pas soumise à l'obligation préalable prévue par ces dispositions ;

Considérant que si M. X a déposé sa demande de reconnaissance du statut de réfugié auprès de la préfecture de la Drôme, il n'en résulte pas nécessairement que le préfet de la Haute-Garonne, compétent à la date de la décision contestée, aurait pris sa décision sans avoir connaissance de la situation de l'intéressé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; que l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ... » ;

Considérant que, jusqu'à son entrée en France au mois de septembre 2005, à l'âge de 25 ans, M. X a vécu en Libye où il ne soutient pas être dépourvu d'attaches familiales ; que, s'il allègue une hostilité de la part de sa famille et de sa belle-famille à la suite de son mariage contre le gré des parents de son épouse, le certificat médical produit en première instance, établi le 20 mai 2008 par un praticien de Toulouse, relatant les troubles psychologiques dont souffre son épouse ne contient pas d'indication de nature à étayer ses affirmations ; que celle-ci, de nationalité libyenne, entrée en France au même moment que lui, fait également l'objet d'une décision portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; qu'à la date de la décision contestée, il est constant que l'épouse du requérant n'avait pas déposé de demande de titre de séjour en tant qu'étranger malade ; que si les intéressés peuvent engager, s'ils s'y croient fondés, une action en contestation du refus allégué des services de la préfecture de la Haute-Garonne d'enregistrer la demande qu'elle aurait présentée à ce titre au mois de mai 2008 ou de lui délivrer un dossier à cette fin, ce refus, postérieur à l'arrêté contesté, ne peut avoir aucune influence sur la légalité de cet arrêté ; qu'alors même que M. X et son épouse parlent français, en l'absence de circonstances faisant obstacle à la poursuite de la vie familiale de l'intéressé hors de France, eu égard au caractère récent de son entrée en France et du fait qu'il n'a été autorisé à séjourner en France que pour permettre l'examen de sa demande d'asile, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, cette décision ne méconnaît ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de la mesure d'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que, comme il a été dit, les moyens invoqués à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour doivent être écartés ; que M. X n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la mesure d'obligation de quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;

Considérant que les documents produits ne permettent pas d'estimer qu'à la date de l'arrêté contesté, l'état de santé de l'épouse du requérant, dont celui-ci admet qu'il n'a été porté à la connaissance du préfet que postérieurement audit arrêté, était tel qu'un défaut de traitement aurait pu entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle ne pouvait bénéficier d'un traitement approprié en Libye ; que, par suite, le préfet n'était pas tenu de consulter préalablement le médecin inspecteur de santé publique ;

Considérant que, compte tenu de la situation susrappelée de M. X, l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle est intervenue ; que cette mesure ne méconnaît donc pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant qu'ainsi qu'il a dit ci-dessus, M. X n'apporte pas d'éléments de nature à établir l'hostilité de sa famille et de sa belle-famille envers lui et son épouse ; que les risques de persécutions qu'encourrait son épouse de la part des membres de sa propre famille ne peuvent être regardés comme établis ; que, si le requérant fait par ailleurs état de risques pour sa sécurité en raison de son activité en faveur de la cause berbère, les documents qu'il produit, se présentant comme une attestation du 7 septembre 2004 du comité général populaire de la justice et de la sécurité publique de Zwara, certifiant qu'il avait été interpellé « pour accusation d'atteinte à l'ordre public » et comme un engagement signé par lui le 9 juillet 2005 devant le bureau de la communication des comités révolutionnaires de cesser toutes activités relatives à la question amazighienne, d'ailleurs déjà produits devant l'OFPRA et la Cour nationale du droit d'asile, qui ne sont accompagnés d'aucun autre document, ne présentent pas de garanties suffisantes d'authenticité et ne suffisent pas à établir la réalité de l'engagement de l'intéressé ni l'existence des risques qu'il allègue ; que les documents généraux également versés au dossier concernant les discriminations à l'encontre des berbères en Libye ne sont pas de nature à établir l'existence de risques personnels encourus par l'intéressé ; que, par suite, la décision contestée ne peut être regardée comme prise en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Garonne de délivrer un titre de séjour à M. X et de réexaminer sa situation ne peuvent être accueillies ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au titre des frais d'instance non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

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N° 08BX01863


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 08BX01863
Date de la décision : 26/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BRUNET
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : AMARI DE BEAUFORT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-03-26;08bx01863 ?
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