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28/06/2010 | FRANCE | N°09BX02839

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 28 juin 2010, 09BX02839


Vu la requête, enregistrée en télécopie le 9 décembre et en original le 11 décembre 2009, présentée pour M. Suad X, demeurant ... ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 11 juin 2009 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 février 2009 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 25 févr

ier 2009 et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 80 ...

Vu la requête, enregistrée en télécopie le 9 décembre et en original le 11 décembre 2009, présentée pour M. Suad X, demeurant ... ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 11 juin 2009 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 février 2009 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 25 février 2009 et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision portant obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi contenues dans l'arrêté en litige et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en application des dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son avocate la somme de 1 794 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ainsi que la somme de 8,84 euros correspondant à l'avance du droit de plaidoirie, en application de l'article 43 de la loi du 10 juillet 1991 ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle de Limoges, en date du 23 novembre 2009, admettant M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mai 2010 :

- le rapport de Mme Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Dupuy, rapporteur public ;

Considérant que M. X, ressortissant serbo-monténégrin, est entré irrégulièrement en France, le 17 avril 2005 selon ses dires ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 20 juin 2006, puis par la Commission des recours des réfugiés le 30 octobre 2006 ; que sa demande de réexamen a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 1er février 2007, puis par la Commission des recours des réfugiés le 2 avril 2007 ; qu'en conséquence, il a fait l'objet, par arrêté en date du 16 mai 2007, d'un refus de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par courrier en date du 7 novembre 2008, reçu le 12 novembre 2008 par les services de la préfecture, M. X a demandé au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour en invoquant une promesse d'embauche ; que, par un arrêté en date du 25 février 2009, cette autorité a opposé un refus à cette demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à cette obligation ; que M. X fait appel du jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 11 juin 2009 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 février 2009 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que la décision portant refus de titre de séjour vise les textes applicables, précise l'identité du requérant, la date et les conditions de son entrée en France, la date et le fondement de sa demande de titre de séjour, la procédure suivie devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Commission des recours des réfugiés, fait état de la promesse d'embauche produite par M. X en qualité d'opérateur de station de lavage, rappelle la situation familiale de M. X et la situation de sa compagne, et indique enfin qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. / La carte porte la mention salarié lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention travailleur temporaire lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois. Si la rupture du contrat de travail du fait de l'employeur intervient dans les trois mois précédant le renouvellement de la carte portant la mention salarié , une nouvelle carte lui est délivrée pour une durée d'un an (...) ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ; que l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour compétences et talents sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ;

Considérant qu'il est constant que M. X, qui est entré en France de manière irrégulière, ne produit pas un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; que par suite, c'est par une exacte application des dispositions combinées des articles L. 311-7 et L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et sans avoir, dès lors que l'intéressé ne remplissait pas les conditions fixées par ces textes, à consulter le directeur départemental du travail et de l'emploi, que le préfet de la Haute-Vienne a refusé à M. X qui, en tout état de cause, ne produisait pas un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail, la délivrance d'une carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle ; que si M. X, en soutenant qu'il n'avait pas à être muni d'un tel visa dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour qu'il a sollicitée , entend invoquer le bénéfice des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de ces dispositions ; que par suite, et comme l'a déjà relevé à juste titre le tribunal administratif, il ne peut utilement invoquer la méconnaissance de ces dispositions à l'encontre du refus de titre de séjour du 25 février 2009 ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui , et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est entré clandestinement en France en avril 2005, à l'âge de 21 ans ; qu'il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire après les rejets, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis la Commission des recours des réfugiés, de sa demande d'asile ; qu'il a été placé sous contrôle judiciaire avec interdiction de quitter le territoire français à compter du 1er juin 2007, ce qui rendait impossible l'exécution de toute mesure d'éloignement prise à son encontre ; que, s'il invoque la présence en France de ses parents et de son frère, qui bénéficient du statut de réfugiés politiques, ainsi que la présence d'autres membres de sa famille, il est constant que sa compagne, Mme Y, ressortissante de même nationalité que lui, avec laquelle il a eu trois enfants nés respectivement en 2003, 2005 et 2008, est également en situation irrégulière et a fait l'objet d'un refus de séjour assorti d'une invitation à quitter le territoire français ; que dans ces conditions, et eu égard notamment à la durée et aux conditions du séjour en France de l'intéressé, ainsi qu'à la possibilité pour le couple de reconstituer une vie familiale normale avec leurs trois enfants dans leur pays d'origine où ceux-ci pourront poursuivre ou entamer leur scolarité, le préfet de la Haute-Vienne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive au regard des buts en vue desquels la décision a été opposée et n'a méconnu ni les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en dernier lieu, que l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant stipule : 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ; que, comme cela vient d'être dit, en l'absence de tout élément s'opposant à ce que la cellule familiale se reconstitue dans le pays d'origine du requérant et de sa compagne, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être accueilli ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, que les conclusions dirigées contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été rejetées pour les motifs ci-dessus exposés, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de séjour doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007, applicable en l'espèce, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ; que le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision doit, dès lors être écarté comme inopérant ;

Considérant, en dernier lieu, que pour les motifs précédemment indiqués, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que la décision fixant le pays à destination duquel M. X pourrait être reconduit d'office à défaut de se conformer à l'obligation de quitter le territoire français vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et notamment son article 3 ; qu'elle mentionne la nationalité serbo-monténégrine du requérant ; qu'elle indique que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que le moyen tiré de son insuffisante motivation doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; qu'en se bornant à faire état des difficultés existant en Serbie-Monténégro, M. X, dont les demandes d'asile ont d'ailleurs été rejetées à deux reprises par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Commission des recours des réfugiés, n'établit pas qu'il serait exposé, en cas de retour dans ce pays, à des menaces de traitements contraires aux stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut en tout état de cause qu'être écarté pour les motifs précédemment indiqués ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Vienne de délivrer au requérant un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour, doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

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No 09BX02839


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX02839
Date de la décision : 28/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : PREGUIMBEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-06-28;09bx02839 ?
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