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30/12/2010 | FRANCE | N°10BX00299

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 30 décembre 2010, 10BX00299


Vu, I, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 5 février 2010 sous le n° 10BX00299, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ; le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande à la cour d'annuler le jugement n° 0904187 en date du 30 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 30 juillet 2009 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination et lui a fait injonction de délivrer à M. Thomas A un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans le délai de deux

mois à compter de la notification du jugement ;

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Vu, I, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 5 février 2010 sous le n° 10BX00299, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ; le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande à la cour d'annuler le jugement n° 0904187 en date du 30 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 30 juillet 2009 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination et lui a fait injonction de délivrer à M. Thomas A un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

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Vu, II, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 mars 2010 sous le n° 10BX00626, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE qui conclut à ce que soit ordonné le sursis à exécution du jugement susvisé ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Les parties ayant été régulièrement averties de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2010 :

- le rapport de Mme Madelaigue, premier conseiller,

- les observations de M. A,

- et les conclusions de M. Normand, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée aux parties ;

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;

Considérant que, par un arrêté en date du 30 juillet 2009, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont il a la nationalité ; que par jugement en date du 30 décembre 2009, le Tribunal administratif de Toulouse a, sur la demande de M. A, annulé cet arrêté et enjoint au préfet de délivrer à M. A un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement ; que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE fait appel de ce jugement ;

Considérant que, pour annuler l'arrêté du 30 juillet 2009, les premiers juges ont relevé que M. A, entré en France avec sa grand-mère paternelle en 2004 alors qu'il n'était pas âgé de 14 ans, a été scolarisé dès le mois de septembre, a obtenu le certificat d'aptitude professionnelle de maçon le 9 juin 2007 et celui de charpentier le 7 juillet 2008, qu'il vit chez sa tutrice, bénéficie de plusieurs promesses d'embauche et que les attestations versées au dossier témoignent de réels efforts d'intégration, des résultats scolaires de l'intéressé ainsi que de la cohérence de son projet professionnel ; qu'ils ont estimé que, compte tenu de l'ensemble de ces conditions, et notamment de l'âge du requérant à la date de son entrée en France ainsi que de la durée de sa présence dans ce pays à la date de la décision attaquée, et, alors même qu'il ne serait pas dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a porté une atteinte excessive au droit de M. A au respect de sa vie privée et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que si l'intégration d'un étranger dans la société française, résultant notamment de ce que celui-ci a développé un parcours scolaire et un projet professionnel sérieux, peut être de nature à faire obstacle à ce qu'un titre de séjour puisse lui être refusé ou à ce qu'une mesure d'éloignement puisse être prise à son encontre, sans qu'il soit porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée, le parcours scolaire et le développement du projet professionnel ne constituent qu'un des éléments à prendre en compte pour l'appréciation du caractère excessif de cette atteinte ; qu'il ressort des pièces du dossier que si M. A est entré en France à l'âge de 13 ans et 7 mois, il est aujourd'hui célibataire et sans enfant et il n'établit pas qu'il ne conserverait plus d'attache familiale dans son pays d'origine où se trouve d'ailleurs vraisemblablement sa mère ; que sa grand-mère, également en situation irrégulière en France, n'a pas vocation à s'y maintenir ; que, dans ces conditions, et alors même que le parcours scolaire de M. A est sérieux et qu'il dispose de promesses d'emploi, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur ces éléments pour annuler l'arrêté contesté ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'arrêté en date du 13 février 2009, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a accordé une délégation de signature générale et permanente à Mme Françoise Souliman, secrétaire générale de la préfecture ; que cette délégation concerne notamment les décisions de refus de titre de séjour, assorties de l'obligation de quitter le territoire français ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision de refus de titre de séjour énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ne se soit pas livré à un examen particulier de l'ensemble de la situation de M. A ;

En ce qui concerne la légalité interne :

S'agissant du refus de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; que, pour l'application des dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

Considérant que M. A soutient que ses attaches familiales se trouvent en France depuis 2004, que son père est décédé et qu'il n'a plus de nouvelles de sa mère ; que, toutefois, ces allégations ne sont pas établies ; que sa grand-mère, entrée irrégulièrement en France avec lui en 2004, n'a pas vocation à s'y maintenir ; que la seule présence de sa tutrice, Mme B, désignée sept mois avant sa majorité, ne permet pas de regarder le refus de titre de séjour comme portant une atteinte excessive au respect de la vie privée et familiale de M. A ; que M. A est célibataire et sans enfant ; que, par suite, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a pu, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui refuser la délivrance d'un titre de séjour ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le refus de séjour critiqué n'est pas entaché d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision du 30 juillet 2009 faisant obligation à M. A de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale ne peut être qu'écarté ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Considérant que M. A fait valoir qu'il craint pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine où il dit avoir été enrôlé de force dans l'armée ; que, toutefois, l'intéressé n'établit pas la réalité des risques personnels et actuels qu'il allègue courir ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et dispositions précitées doit être écarté ; qu'au demeurant, tant l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, le 5 novembre 2008, que la Cour nationale du droit d'asile, le 29 avril 2009, ont estimé que les craintes que M. A avançait, à l'appui de sa demande d'asile, ne pouvaient être tenues pour fondées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. A tendant à l'annulation de l'arrêté du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE du 30 juillet 2009 et à la délivrance d'un titre de séjour ne peuvent qu'être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction ;

Sur la demande de sursis à exécution :

Considérant que, par le présent arrêt, la Cour administrative d'appel de Bordeaux a statué sur les conclusions à fin d'annulation du jugement attaqué ; que, par suite, les conclusions à fin de sursis à exécution dudit jugement sont devenues sans objet ; qu'il n'y a donc pas lieu d'y statuer ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. A la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 10BX00626.

Article 2 : Le jugement en date du 30 décembre 2009 du Tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Toulouse est rejetée.

Article 4 : Les conclusions de M. A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N°s 10BX00299 et 10BX00626


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX00299
Date de la décision : 30/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TEXIER
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : BREL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-12-30;10bx00299 ?
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