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01/09/2011 | FRANCE | N°10BX02051

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 01 septembre 2011, 10BX02051


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 août 2010, présentée pour M. et Mme Edouard A, demeurant ..., par Me Goulard ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900369 du 10 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tendant notamment à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige et des pénalités

y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 6 000 euros e...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 août 2010, présentée pour M. et Mme Edouard A, demeurant ..., par Me Goulard ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900369 du 10 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tendant notamment à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2011 :

- le rapport de M. Mauny, premier conseiller ;

- les observations de Me Goulard pour M. et Mme A ;

- et les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;

La parole ayant été rendue aux parties ;

Considérant que M. et Mme Edouard A relèvent appel du jugement du 10 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tendant à la décharge en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2003 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable à l'époque des faits : Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) b. (...) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (...). L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque l'administration use de la faculté qu'elles lui confèrent dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors qu'elle établit que ces actes ont un caractère fictif, ou que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ; que ni les requérants, ni l'administration n'ayant saisi le comité consultatif pour avis conformément aux dispositions précitées, la charge de la preuve de l'existence d'un abus de droit appartient à l'administration ;

Considérant que M. et Mme A étaient propriétaires des actions de la SA Angoulême distribution (Angdis), exploitant un supermarché, et des titres de la SCI Madeleine, propriétaire des murs où l'activité est exercée ; qu'ils ont donné à chacun de leurs trois enfants, le 4 octobre 2003, la nue-propriété de 152 parts de la SCI de la Madeleine, puis le 7 octobre 2003, la pleine-propriété de 3 130 actions et la nue-propriété de 12 031 actions de la SA Angdis ; que le 23 et le 24 octobre 2003, M. et Mme A et leurs enfants ont apporté l'ensemble des titres à neuf sociétés civiles, cogérées par M. et Mme A, ayant pour objet la gestion du patrimoine familial et constituées à cette fin le 4 octobre 2003 ; que les parts des sociétés civiles reçues en échange ont fait l'objet d'un démembrement de propriété par report du démembrement appliqué aux titres apportés ; que le 31 octobre 2003, les parts de la société civile de la Madeleine ont été acquises par la SA Angdis dont la totalité des actions a également été cédée, à cette même date, à la SA Boujusi ; que l'administration, au regard des clauses des actes de donation, du mode de fonctionnement des sociétés civiles auxquelles les titres donnés ont été apportés, du délai réduit entre les dates des cessions et apports susmentionnés, et de l'avance sur distribution consentie aux époux donateurs, a considéré que les actes de donation en nue-propriété des titres susmentionnés revêtaient un but exclusivement fiscal, car ayant été établis pour éluder l'impôt en évitant la taxation entre les mains des requérants de la plus-value réalisée à l'occasion de la cession des titres à la SA Angdis ; qu'elle a mis en oeuvre la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales pour écarter les actes de donation partage des 4 et 7 octobre 2003, regardés comme fictifs ;

Considérant, d'une part, que le service a relevé que les actes de donation-partage des 4 et 7 octobre 2003 imposaient aux donataires l'obligation d'apporter les parts et actions à neuf sociétés civiles financières créées à cette seule fin par les donateurs et leurs trois enfants, ce qu'ils ont fait dès le 23 octobre 2003, et que les donataires ne pouvaient pas aliéner ou nantir les titres donnés, pendant la vie des donateurs, sous peine de révocation de la donation ; que les statuts des sociétés civiles prévoyaient en outre que M. et Mme A en étaient cogérants, qu'ils n'étaient révocables qu'à l'unanimité et disposaient de pouvoirs étendus de décision, notamment s'agissant de la distribution des bénéfices, et que les parts des sociétés civiles ne pouvaient être cédées qu'après l'accord de l'ensemble des associés ; que si M. et Mme A soutiennent que les restrictions apportées à la disposition des titres donnés à leurs enfants résultaient de leur volonté de s'assurer une source préservée et pérenne de revenus, en intervenant activement dans la gestion de ce patrimoine familial dès lors que leurs enfants ne disposaient ni de l'expérience ni des connaissances nécessaires en la matière, ils ne contredisent cependant pas utilement le service qui a relevé que les parts de la SCI Madeleine puis les actions de la SA Angdis ont été vendues dès le 31 octobre 2003, les actions de la SA Angdis étant finalement acquises par la SA Boujusi pour un montant total de 13 643 920 euros ; qu'ainsi, au regard des restrictions apportées à l'exercice du droit de propriété des donataires et de la portée relative de la donation réalisée dans de telles conditions, et au délai très bref entre les opérations de donation, d'apport, puis de cession, des titres en cause, le service a établi que l'intérêt d'une bonne gestion patrimoniale invoquée par les requérants n'avait pu motiver la donation litigieuse ;

Considérant, d'autre part, que le service a relevé que les requérants ont bénéficié de virements de sept des neuf sociétés civiles susmentionnées au cours de l'année 2004, excédant de 505 848 euros le montant des revenus des placements effectués par lesdites sociétés, dont une distribution de dividendes par six des sociétés, excédant de 149 102,78 euros leurs capacités de distribution ; que si les requérants font valoir que les excédents de distribution retenus par le service sont erronés dès lors qu'il n'aurait pas été tenu compte de l'accroissement de la valeur vénale de bons de capitalisation et de plus-values latentes sur portefeuille au titre desquels ils pouvaient encore prétendre à une distribution, ils n'apportent toutefois pas de précision sur ces éléments, alors qu'ils ont fait valoir par ailleurs que le caractère excédentaire de ces acomptes au regard des capacités de distribution de la société s'expliquerait par la baisse de rendement des placements effectués ; que s'ils font valoir en outre que les montants en cause ont fait l'objet d'une inscription, au titre d'avances, au débit d'un compte courant d'associé ouvert à leur nom dans les sociétés civiles et de leur remboursement en 2006, ils ne justifient pas d'une telle inscription et en tout état de cause ne contestent pas, ce faisant, leur appréhension des sommes litigieuses ; qu'eu égard aux éléments qu'il a relevés, le service doit donc être regardé comme ayant établi que M. et Mme A se sont réappropriés les droits sur les sociétés et ne s'en sont pas réellement dessaisis ;

Considérant qu'eu égard à l'absence d'intérêt des donations partages en litige pour une bonne gestion patrimoniale, et à la réappropriation d'une partie des sommes en cause par M. et Mme A eu égard aux conditions des distributions sus-décrites, l'administration établit que les donations en nue-propriété effectuées par M. et Mme A n'ont pas été effectuées dans une intention libérale mais afin d'atténuer la charge fiscale qu'ils auraient normalement dû supporter s'ils n'avaient pas passé ces actes ; qu'ainsi, l'administration était fondée à taxer les plus-values réalisées sur la cession de ces titres, après avoir écarté les actes des 4 et 7 octobre 2003 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. et Mme A la somme qu'ils réclament sur le fondement dudit article ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

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N° 10BX02051


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX02051
Date de la décision : 01/09/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : GOULARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-09-01;10bx02051 ?
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