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08/03/2012 | FRANCE | N°11BX01460

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 08 mars 2012, 11BX01460


Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2011, présentée pour Mlle Carline A, demeurant ..., par Me Kerhousse ;

Mlle Carline A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100025 du 24 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2010 par lequel le préfet de la Guyane a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé Haïti comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'en

joindre au préfet de la Guyane de lui délivrer dans un délai de deux mois un titre de séjour ...

Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2011, présentée pour Mlle Carline A, demeurant ..., par Me Kerhousse ;

Mlle Carline A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100025 du 24 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2010 par lequel le préfet de la Guyane a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé Haïti comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer dans un délai de deux mois un titre de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ainsi qu'un récépissé de demande carte dans l'attente de la remise du titre ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 février 2012 :

- le rapport de Mme Madelaigue ;

- et les conclusions de M. Normand, rapporteur public ;

Considérant que Mlle A, de nationalité haïtienne, relève appel du jugement du 24 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guyane en date du 18 octobre 2010 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par Mlle A, le préfet de la Guyane s'est fondé sur la circonstance, d'une part, qu'elle n'établissait pas que M. Christian B, titulaire d'une carte de résident de dix ans était son père et, d'autre part, qu'elle était célibataire et sans enfant ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. (...) " ; que celui-ci dispose que : " Tout acte d'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. " ; que ces dispositions posent une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère ; qu'il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non-conforme à la réalité des actes en question ;

Considérant que le préfet de la Guyane faisait valoir en première instance que l'acte de naissance transmis n'a pas été authentifié par l'ambassade de France en Haïti auprès de la direction des archives nationales d'Haïti ; qu'il a fourni un bordereau d'envoi de cette ambassade indiquant que les douze extraits d'archives examinés, dont l'un concernait Mme A, ne répondent pas aux critères des archives nationales d'Haïti ; que ce bordereau était accompagné de l'acte de naissance " archives nationales " 079443 X daté du 12 mars 2009 faisant état d'une précédente expédition du 21 janvier 2008 ; que, toutefois, Mlle A a transmis son acte de naissance d'origine établi lors de la déclaration de naissance faite par son père le 26 novembre 1999, sur lequel l'administration ne s'est pas prononcée, ainsi que les extraits d'acte de naissance " archives nationales " n° 022048 V daté du 15 octobre 2007 et n° 052927 V daté du 21 janvier 2008 qui corroborent le fait que Mlle A est née à Aquin le 10 juin 1984 de mère, identifiée comme étant Mme Nélia C, aujourd'hui décédée, et de père, identifié comme étant M. Christian B ; que figure également au dossier un jugement du tribunal civil de Port-au-Prince qui autorise le directeur général des archives à recevoir et conserver au rang des minutes l'acte de naissance de Mlle A Carline ; qu'il s'ensuit que le préfet de la Guyane, qui n'a pas produit d'observation en défense dans la présente instance, ne pouvait, sur le fondement du seul bordereau transmis par l'ambassade de France, relatif à l'extrait d'acte de naissance " archives nationales " 079443 X daté du 12 mars 2009, rejeter la demande de titre de séjour formée par Mlle A ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des récépissés de demande de titre de Mlle A ainsi que des certificats de scolarité qu'elle produit, qu'elle est entrée sur le territoire en 2001 ; qu'à l'exception d'une cousine, il n'est fait état d'aucun autre membre de sa famille en Haïti dès lors que son père vit en France depuis 1982 de manière régulière et que sa mère est décédée ; que les pièces produites au dossier démontrent le caractère sérieux des études de Mlle A qui a obtenu un brevet d'études professionnelles, le Baccalauréat professionnel mention " comptabilité " et prépare un BTS d'assistante de direction ; que la requérante fait preuve d'une volonté d'insertion en France et a exercé une activité salariée lorsqu'elle y a été autorisée par les titres de séjour provisoires qui lui ont été délivrés ; que, par suite, et eu égard aux conditions et à la durée du séjour de Mlle A en France, en refusant de lui délivrer un titre de séjour le préfet de la Guyane a commis une erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a portée sur les conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

Considérant que la présente décision implique nécessairement, eu égard à ses motifs et en l'absence de changement de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, la délivrance à Mlle A d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il y a lieu, dès lors, pour la cour, d'enjoindre au préfet de la Guyane de procéder à cette délivrance dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'en revanche, il n'est pas nécessaire, dans les circonstances de l'espèce, de soumettre cette injonction à une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée " ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'État, le versement à Mlle A d'une somme de 1.000 euros en application de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cayenne du 24 mars 2011 et l'arrêté du 18 octobre 2010 du préfet de la Guyane sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Guyane de délivrer à Mlle A un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mlle A la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlle A est rejeté.

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N° 11BX01460


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX01460
Date de la décision : 08/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : KERHOUSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-03-08;11bx01460 ?
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