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10/04/2012 | FRANCE | N°11BX00651

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 10 avril 2012, 11BX00651


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 10 mars 2011, présentée pour la SARL 3AS, dont le siège est 80 chemin de l'Eglise de Lalande à Toulouse (31200), par la SCP Darnet-Gendre, avocats ;

La SARL 3AS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 060954 du 7 janvier 2011 en tant que le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser la somme de 145 822,62 euros en réparation des désordres affectant les sols souples du groupe scolaire "La Maourine" sur le fondement de la garantie de parfait achèvement ;

2°) de réduire la condamnati

on prononcée, en se fondant sur la présomption de responsabilité relevant des pri...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 10 mars 2011, présentée pour la SARL 3AS, dont le siège est 80 chemin de l'Eglise de Lalande à Toulouse (31200), par la SCP Darnet-Gendre, avocats ;

La SARL 3AS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 060954 du 7 janvier 2011 en tant que le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser la somme de 145 822,62 euros en réparation des désordres affectant les sols souples du groupe scolaire "La Maourine" sur le fondement de la garantie de parfait achèvement ;

2°) de réduire la condamnation prononcée, en se fondant sur la présomption de responsabilité relevant des principes dont s'inspire l'article 1792 du code civil, à proportion des surfaces affectées par les désordres représentant 760 m2 et non 1 480 m2 ;

3°) de limiter sa condamnation, ainsi que celle de la Société Nouvelle Thomas et Danizan, en fonction de leur part de responsabilité dans l'origine des désordres constatés ;

4°) de condamner la commune de Toulouse ou toutes autres parties succombantes aux entiers dépens ;

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mars 2012 :

- le rapport de M. Didier Péano, président-assesseur ;

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

- et les observations de Me Magrini, avocat de la Société Nouvelle Thomas et Danizan, celles de Me Sanson, avocat de la commune de Toulouse et celles de Me Darnet, avocat de la SARL 3AS ;

Considérant que, par acte d'engagement notifié le 14 janvier 2002, la commune de Toulouse, maître d'ouvrage, a confié à un groupement d'entreprises conjointes, dont la SARL société nouvelle Thomas et Danizan (SNTD) était mandataire commun, la construction du groupe scolaire " La Maourine ", comprenant une école maternelle de plain-pied, une école primaire de type R+1 et une infirmerie, situé avenue Bourgès Maunoury, sur le territoire de cette commune ; que pour la réalisation des travaux du lot n° 1 "gros oeuvre", la Société Nouvelle Thomas et Danizan a confié à la société Fluid Chapes, sous-traitant agréé par la commune, l'exécution de la chape anhydrite nécessaire à l'installation de planchers chauffants ; que les travaux de revêtement de sols souples sur cette chape ont été attribués à la SARL 3AS, cotraitante du marché groupé et titulaire du lot n° 9 "revêtement de sol en grès céramé collés" (sols souples) ;

Considérant qu'à la suite du séchage de la chape coulée le 9 décembre 2002, la commune s'est plaint de ce que le béton se rétractait plus fortement au dessus de chaque plot du plancher chauffant, montrant ainsi en creux les "spectres" de ces plots ; que malgré des ponçages ponctuels et un ragréage général de la chape, réalisés par la SARL 3AS, les désordres affectant les sols souples et se traduisant notamment par des gondolements et boursouflures desdits sols en divers endroits du groupe scolaire, ont persisté ; que la réception des travaux a été prononcée le 16 juin 2003 avec des réserves concernant le lot n°9 devant être levées avant le 4 juillet 2003 par la SARL 3AS, mise en demeure, en vain, par la commune de procéder aux travaux de reprise ; qu'à la suite du dépôt, le 4 novembre 2005, du rapport de l'expert désigné par ordonnance du 15 septembre 2003, la commune a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande en faisant valoir tout à la fois que les désordres engageaient la responsabilité de la SARL 3AS, tenue d'assurer le parfait achèvement des travaux, et que ces désordres rendaient l'ouvrage impropre à sa destination donnant lieu à la garantie décennale des constructeurs, la Société Nouvelle Thomas et Danizan étant tenue à cette garantie, également subsidiairement due par la SARL 3AS ; que par jugement du 7 janvier 2011, le tribunal administratif a considéré que la commune était fondée à rechercher la responsabilité de la SARL 3AS à raison des désordres affectant les sols souples du groupe scolaire "La Maourine" au titre de la garantie de parfait achèvement et que les désordres n'étant pas imputables à la Société Nouvelle Thomas et Danizan, qui n'est pas intervenue dans la réalisation du ragréage à l'origine des désordres constatés, la commune n'était pas fondée à rechercher la responsabilité de cette société en raison de ces désordres au titre de la garantie décennale des constructeurs ; que la SARL 3AS relève appel du jugement qui, au titre de la garantie de parfait achèvement, l'a condamnée à verser à la commune de Toulouse la somme de 145 822,62 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2006 et de la capitalisation des intérêts à compter du 10 mars 2007 et a mis les dépens, comprenant les frais et honoraires de l'expert, liquidés et taxés à la somme de 11 585,15 euros toutes taxes comprises à sa charge ; que la commune de Toulouse demande à la cour de réformer le jugement en retenant, à titre principal, que les désordres affectant les revêtements de sols souples du groupe scolaire " La Maourine " relèvent de la responsabilité décennale de la SARL 3AS, ou à titre subsidiaire, qu'elle est fondée à rechercher la responsabilité de la SARL 3AS à raison de ces désordres au titre de la garantie de parfait achèvement ;

Sur l'appel de la SARL 3AS :

Sur la responsabilité :

Considérant que la garantie de parfait achèvement s'étend à la reprise, d'une part, des désordres ayant fait l'objet de réserves dans le procès-verbal de réception, d'autre part de ceux qui apparaissent et sont signalés dans l'année suivant la date de réception ;

Considérant qu'en première instance, la commune de Toulouse a recherché la responsabilité de la SARL 3AS à raison des désordres affectant les sols souples du groupe scolaire "La Maourine" à la fois sur le fondement de la garantie de parfait achèvement et sur celui de la garantie décennale des constructeurs ; que les désordres à raison desquels la commune a recherché la responsabilité de la SARL 3AS ont été constatés avant la réception des travaux, prononcée le 16 juin 2003 avec des réserves les concernant ; que le procès-verbal de réception dressé le 16 juin 2003 mentionne comme réserves, pour ce qui concerne le lot n° 9 dont la SARL 3AS était chargée : " le sol de la bibliothèque, de l'atelier voisin, ainsi que toute la circulation à l'étage du primaire seront refaits entièrement... Reprise du sol dans la circulation, en RDC du primaire, devant les trois collecteurs de chauffage... Reprise du sol de la salle de jeux de la maternelle, devant les deux murs rideaux, ainsi que devant le collecteur de chauffage " ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les désordres affectant les surfaces où la SARL 3AS a procédé à un ragréage doivent ainsi être regardés comme étant apparents à la date de la réception prononcée avec des réserves qui n'ont pas été levées ; que, par suite, dès lors que leur relation contractuelle n'avait pas pris fin, la commune ne pouvait rechercher pour les désordres précisément énumérés dans le procès-verbal que la responsabilité contractuelle de la SARL 3AS, sur le fondement de la garantie de parfait achèvement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les désordres affectant les sols souples du groupe scolaire "La Maourine" ont pour origine le non respect par la SARL 3AS des règles de l'art qui imposaient d'effectuer le ragréage dont elle était chargée sur des supports d'une propreté parfaite, d'arrêter le chauffage des bâtiments 48 heures avant le ragréage et de le remettre en route 48 heures après, ainsi que de recourir à un produit de ragréage compatible avec le primaire déjà utilisé ; que le non respect de ces règles est constitutif d'une faute commise par l'entreprise dans l'exécution des travaux qui lui avaient été confiés ; qu'une telle faute engage la responsabilité contractuelle de la SARL 3AS à l'égard de la commune de Toulouse, maître d'ouvrage ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont condamné la SARL 3AS à réparer lesdits désordres sur le fondement de la garantie de parfait achèvement ;

Sur le préjudice :

Considérant qu'en se basant sur un devis demandé par l'expert et fondé sur une surface à reprendre de 1 480 m2, les premiers juges ont évalué à 145 822,62 euros toutes taxes comprises, les travaux de réparation nécessaires pour remédier aux désordres affectant les sols souples du groupe scolaire "La Maourine" ;

Considérant en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'ensemble des sols souples traités par la SARL 3AS représente 1 373 m2 et non 1 480 m2 ; que de plus, les désordres ayant fait l'objet de réserves dans le procès-verbal de réception, et ceux signalés dans l'année suivant la date de réception, au titre desquels la SARL 3AS doit à la commune la garantie de parfait achèvement n'affectent pas l'ensemble de ces sols ; que compte tenu de l'ensemble des éléments versés au dossier, et notamment du devis proposé par la SARL 3AS le 13 janvier 2005, il résulte de l'instruction que ces désordres ont affecté une surface de 760 m2 ;

Considérant en second lieu, que le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander l'indemnisation au titre de la réparation des désordres affectant l'immeuble réalisé correspond à l'ensemble des frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection ; que le remplacement du sol souple posé par la SARL 3AS nécessite non seulement la dépose du sol et du ragréage existant, ainsi que la mise en oeuvre d'un fixateur, un nouveau ragréage et la repose d'un sol identique, comme elle le soutient, mais encore d'autres travaux, notamment le déplacement du mobilier et sa réinstallation ; qu'ainsi pour critiquer le montant de ces frais, déterminé dans le devis demandé par l'expert, la SARL 3AS ne peut utilement se fonder sur une estimation basée sur le coût des travaux dont elle était contractuellement chargée ;

Considérant que compte tenu des éléments ainsi définis, il sera fait une juste appréciation du coût des travaux de réfection en réduisant le montant des travaux mentionné dans le devis demandé par l'expert, à proportion de la surface réellement affectée par les désordres couverts par la garantie de parfait achèvement ; qu'en conséquence, la SARL 3AS est fondée à demander que la somme fixée par les premiers juges au titre de la réparation de ces désordres soit ramenée de 145 822,62 euros à 74 890 euros toutes taxes comprises ; qu'il n'y a pas lieu de déduire de cette somme un quelconque pourcentage devant être laissé à la charge de la commune de Toulouse, dès lors, ainsi qu'il a été jugé en première instance, qu'elle n'inclut pas le coût de réfection de la surface endommagée en raison d'un problème d'étanchéité non imputable à la SARL 3AS ;

Sur l'appel incident de la commune :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, la réception des travaux, prononcée le 16 juin 2003, était assortie de réserves portant sur une surface évaluée à 760 m2 alors que l'ensemble des sols souples traités par la SARL 3AS représente 1 373 m2 ; que cependant il n'est pas contesté que les désordres apparus ultérieurement, affectant le restant de la surface traitée par la SARL 3AS, soit 613 m2, étaient de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ; que ces désordres qui, du fait de leur caractère évolutif, n'étaient pas connus dans toute leur ampleur à la date de réception des travaux sont de nature à engager la responsabilité de la SARL 3AS à l'égard de la commune, maître d'ouvrage, sur le fondement de la garantie décennale ; que compte tenu des éléments déjà exposés, et des conclusions du rapport de l'expert concernant l'extension à venir des désordres à l'ensemble des surfaces recouvertes de sols souples, au regard de la cause qu'il a déterminée, la commune de Toulouse est fondée à demander sur ce fondement que la SARL 3AS soit condamnée à lui verser une somme de 60 400 euros toutes taxes comprises ;

Sur le surplus des conclusions des parties :

Considérant que, dès lors qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les désordres affectant les sols souples du groupe scolaire "La Maourine" ont pour seule origine les fautes commises par la SARL 3AS dans la réalisation du ragréage dont elle était chargée, les conclusions de la SARL 3AS tendant à limiter sa condamnation en fonction de sa part de responsabilité dans l'origine des désordres constatés, ne sauraient être accueillies ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu de faire droit aux conclusions d'aucune des parties tendant au remboursement des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La somme de 145 822,62 euros que le jugement n° 060954 du 7 janvier 2011 du tribunal administratif de Toulouse a condamné la SARL 3AS à verser à la commune de Toulouse au titre de la garantie de parfait achèvement est ramenée à 74 890 euros toutes taxes comprises.

Article 2 : La SARL 3AS est condamnée à verser à la commune de Toulouse une somme de 60 400 euros toutes taxes comprises au titre de la responsabilité décennale des constructeurs.

Article 3 : Le jugement n° 060954 du 7 janvier 2011 du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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No 11BX00651


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11BX00651
Date de la décision : 10/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Rapports entre l'architecte - l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage - Responsabilité contractuelle.

Marchés et contrats administratifs - Rapports entre l'architecte - l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage - Responsabilité contractuelle - Champ d'application.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Didier PEANO
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : DARNET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-04-10;11bx00651 ?
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