La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/07/2012 | FRANCE | N°11BX02025

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 10 juillet 2012, 11BX02025


Vu la requête enregistrée le 8 août 2011, présentée pour M. Michel A, élisant domicile au cabinet de son avocat, Me Richard, 21 rue Alphonse de Saintonge à La Rochelle (17000) ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902054 en date du 1er juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2005 et des pénalités y afférentes ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et pénalités c

ontestées ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'ar...

Vu la requête enregistrée le 8 août 2011, présentée pour M. Michel A, élisant domicile au cabinet de son avocat, Me Richard, 21 rue Alphonse de Saintonge à La Rochelle (17000) ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902054 en date du 1er juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2005 et des pénalités y afférentes ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2012 :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Marie-Pierre Dupuy, rapporteur public ;

Considérant que M. A est associé et gérant de la SCI Kevin et de l'EURL Casa Puerto Viejo, dont les sièges sociaux sont à Biarritz où il est domicilié, ainsi que des sociétés Kevin Immo et Aquitania Restauracion, dont les sièges sociaux sont en Espagne ; qu'il détient la totalité du capital de ces trois dernières sociétés ; que, la société Kevin Immo possédant 98% des parts de la SCI Kevin et M. A 1% de ces parts, ce dernier détient, directement ou indirectement, 99% des parts de cette SCI ; qu'à la suite d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. A qui a porté sur les années 2004 et 2005, le service des impôts, se fondant sur le défaut de déclaration de l'ouverture du compte bancaire détenu en Espagne par la société Kevin Immo, a imposé le contribuable, sur le fondement de l'article 1649 A du code général des impôts, au titre de l'année 2005, à raison de la somme de 48 000 euros ayant transité depuis le compte de la société Kevin Immo vers celui, ouvert en France, de la SCI Kevin ; que ce rappel d'impôt a été assorti des majorations prévues à l'article 1758 alinéa 1 du code général des impôts ; que M. A fait appel du jugement en date du 1er juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / (...) L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil. " ; qu'aux termes de l'article L. 47 B du même livre : " Au cours d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle, l'administration peut examiner les opérations figurant sur des comptes financiers utilisés à la fois à titre privé et professionnel et demander au contribuable tous éclaircissements ou justifications sur ces opérations sans que cet examen et ces demandes constituent le début d'une procédure de vérification de comptabilité. / Au cours d'une procédure de vérification de comptabilité, l'administration peut procéder aux mêmes examens et demandes, sans que ceux-ci constituent le début d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle./ L'administration peut tenir compte, dans chacune de ces procédures, des constatations résultant de l'examen des comptes ou des réponses aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, et faites dans le cadre de l'autre procédure conformément aux seules règles applicables à cette dernière " ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 47 B du livre des procédures fiscales que l'examen, à l'occasion d'une vérification de comptabilité, d'un compte bancaire retraçant à la fois des opérations professionnelles et des opérations à caractère privé, ne suffit pas, à lui seul, à caractériser un début d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ; que, par suite, le seul fait que, préalablement à l'engagement de l'examen de la situation fiscale personnelle de M. A, le service a, au cours de la vérification de comptabilité de la SCI Kevin, examiné le compte bancaire de cette société, lequel retraçait à la fois des opérations privées et des opérations professionnelles, n'a pas constitué le début d'un examen de la situation fiscale personnelle de M. A qui aurait eu lieu avant l'envoi, le 22 mars 2007, de l'avis prévu à l'article L. 47 précité dudit livre ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales dans sa rédaction en vigueur en l'espèce : " I. Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou de la taxe sur la valeur ajoutée en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts, elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des impôts, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 76 B du même livre : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ;

Considérant que l'administration a sollicité la mise en oeuvre de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales à l'encontre de trois contribuables présumés exercer en France une activité professionnelle sans souscrire les déclarations fiscales relatives à cette activité et sans passer les écritures comptables afférentes ; que, par une ordonnance du 6 décembre 2005, le vice-président du tribunal de grande instance de Pau a fait droit à cette demande ; que la visite qui a eu lieu le 8 décembre 2005 au domicile de l'une des trois personnes dont il s'agit a permis à l'administration de saisir des factures et des documents concernant de nombreux clients, parmi lesquels se trouvait la société Kevin Immo, en vue d'établir les faits reprochés à cette personne ; que ce n'est donc qu'accessoirement que cette opération a révélé des faits de nature à affecter la situation fiscale de M. A ; que le service était en droit d'utiliser les documents ainsi saisis pour établir l'imposition de M. A dans le cadre d'une procédure distincte ; que les extraits des comptes bancaires de la société Kevin Immo saisis par l'administration le 8 décembre 2005 ont été communiqués sur sa demande à M. A le 10 octobre 2007, puis joints en annexe à la proposition de rectification adressée à ce dernier le 11 février 2008 ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'administration n'a pas régulièrement opposé au contribuable les documents relatifs à la société Kevin Immo doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'elle a procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu, l'administration des impôts ne peut plus procéder à des rectifications pour la même période et pour le même impôt, à moins que le contribuable ne lui ait fourni des éléments incomplets ou inexacts ou que l'administration n'ait dressé un procès-verbal de flagrance fiscale dans les conditions prévues à l'article L. 16-0 BA, au titre d'une période postérieure (...) " ;

Considérant que si, afin de compléter la motivation de la première proposition de rectification adressée le 8 août 2007 au contribuable en indiquant plus précisément l'origine des documents utilisés pour procéder au redressement, le service a adressé à M. A une nouvelle proposition de rectification le 11 février 2008, ce seul envoi, dès lors que cette seconde proposition annule et remplace la précédente et ne fait que confirmer les redressements précédemment notifiés, ne saurait suffire à caractériser la méconnaissance par le service des dispositions précitées de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. A a rencontré la vérificatrice à trois reprises, les 26 avril, 15 mai et 30 mai 2007 ; qu'au cours de ces entretiens, le contribuable a produit des relevés bancaires et a apporté des réponses à la demande d'information qui lui avait été adressée le 10 avril 2007 ; que la vérificatrice a, par courrier, sollicité la production des relevés bancaires manquants ; qu'il résulte des termes mêmes des propositions de rectification que, lors de l'entretien du 15 mai 2007, le contribuable et la vérificatrice ont analysé ensemble les mouvements financiers des ses comptes, que, lors de l'entretien du 30 mai 2007, M. A a présenté des explications concernant trois crédits bancaires et que la vérificatrice lui a restitué les relevés de comptes financiers ; qu'il y est également précisé qu'au cours de ces entretiens, divers points relatifs à la situation fiscale et personnelle du contribuable ont été évoqués ; que, dans ces conditions, le requérant n'établit pas qu'il aurait été privé d'un débat oral et contradictoire ; que la circonstance qu'il se soit écoulé plus de huit mois entre le dernier entretien, le 30 mai 2007, et la proposition de rectification définitive du 11 février 2008 est sans incidence sur la régularité de la procédure, dès lors qu'il résulte de ce qui vient d'être dit qu'un débat contradictoire a eu lieu et que la nouvelle proposition de rectification n'a modifié ni les redressements déjà notifiés ni leur fondement légal ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 1649 A du code général des impôts : " Les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger " ; que le troisième alinéa du même article dispose : " Les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés dans les conditions prévues au deuxième alinéa constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A avait la signature sur le compte bancaire, ouvert en Espagne, de la société Kevin Immo, dont il a déjà été dit qu'il possédait 100% du capital, ainsi que sur celui de la SCI Kevin dont il détenait directement ou indirectement 99% des parts ; qu'il a effectué en février et mars 2005 huit dépôts en espèces d'un montant total de 49 000 euros sur le compte de la société Kevin Immo et que, le 8 avril 2005, une somme de 48 000 euros a été transférée de ce compte vers celui de la SCI Kevin, cette somme ayant servi au financement de l'achat par la SCI de l'appartement appartenant à l'intéressé ; que M. A n'a pas déclaré le compte ouvert à l'étranger de la société Kevin Immo, alors qu'il l'utilisait pour ses propres opérations ; qu'il n'a ainsi pas respecté les obligations découlant du deuxième alinéa précité de l'article 1649 A du code général des impôts ; que, dans ces conditions, en application du troisième alinéa, également précité, du même article, la somme de 48 000 euros transférée le 8 avril 2005 en France a été à bon droit considérée par le service comme constituant, à défaut de toute preuve contraire apportée par le contribuable, un revenu imposable ; que le requérant, qui n'apporte pas davantage devant le juge de l'impôt la preuve contraire, ne saurait utilement soutenir que certaines conditions d'application de l'article 1649 quater A du code général des impôts ne sont pas réunies alors qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que le redressement est fondé sur l'article 1649 A du même code ;

Considérant que l'imposition litigieuse ayant été établie au titre de l'année 2005, le moyen tiré de ce que l'année 2004 était prescrite lorsqu'a été notifiée la proposition de rectification du 11 février 2008 est, en tout état de cause, inopérant ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'en vertu du premier alinéa de l'article 1758 du code général des impôts, en cas d'application des dispositions prévues au troisième alinéa de l'article 1649 A, le montant des droits est assorti d'une majoration de 40 % ; que, compte tenu de ce que l'imposition litigieuse a été établie à bon droit sur le fondement du troisième alinéa de l'article 1649 A, ainsi qu'il vient d'être dit, elle a été à juste titre assortie de la majoration prévue par l'article 1758 précité ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, ne saurait être condamné à verser à M. A la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

''

''

''

''

5

No 11BX02025


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX02025
Date de la décision : 10/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-07-10;11bx02025 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award