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19/03/2013 | FRANCE | N°12BX01455

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 19 mars 2013, 12BX01455


Vu la requête enregistrée le 12 juin 2012 présentée pour Mme C...A...demeurant chez ...par Me Thalamas ;

Mme A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103548 en date du 3 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté en date du 20 mai 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français en fixant comme pays de renvoi celui dont elle a la nationalité, d'autre part, de la

décision en date du 11 juillet 2011 par laquelle le préfet de la Haute-Garon...

Vu la requête enregistrée le 12 juin 2012 présentée pour Mme C...A...demeurant chez ...par Me Thalamas ;

Mme A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103548 en date du 3 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté en date du 20 mai 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français en fixant comme pays de renvoi celui dont elle a la nationalité, d'autre part, de la décision en date du 11 juillet 2011 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a rejeté son recours gracieux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 mai 2011 et la décision du 11 juillet 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire, mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, toujours sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat à verser à son conseil la somme de 2 000 euros au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale signée à New York le 26 janvier 1990, relative aux droits de l'enfant, publiée par décret du 8 octobre 1990 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 février 2013:

- le rapport de Mme Florence-Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme C...A..., née en 1969, ressortissante angolaise, est entrée en France irrégulièrement, en février 2002 selon ses dires ; qu'après le rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, successivement le 28 octobre 2003 et le 16 juillet 2004, elle s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français malgré deux arrêtés de refus de séjour assortis d'invitation à quitter le territoire français, pris à son encontre le 6 août 2004 et le 30 juin 2006 ; que, le 22 juillet 2009, elle a sollicité le réexamen de sa situation en se prévalant de sa présence en France depuis dix ans et de sa vie privée et familiale formée avec M.B..., ressortissant de la République Démocratique du Congo (RDC), et leurs trois enfants nés en France ; que, toutefois, par un arrêté en date du 20 mai 2011, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé comme pays de renvoi celui dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il établira être légalement admissible ; que Mme A...fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 3 février 2012 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ainsi de la décision du 11 juillet 2011 de rejet de son recours gracieux formé contre cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...). " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeA..., de nationalité angolaise, vit sur le territoire français depuis 2002 et y a développé une relation stable avec son compagnon, M.B..., ressortissant de la République Démocratique du Congo, avec qui elle a eu trois enfants, tous nés en France, en avril 2004, janvier 2007 et septembre 2009, lesquels ne connaissent que la langue française et n'ont aucun lien avec l'Angola ou le Congo, pays d'origine de leurs parents ; que la famille, dont les deux enfants aînés sont parfaitement scolarisés, ainsi qu'il résulte des attestations produites par des enseignants et la directrice de l'école, qui témoignent de l'investissement personnel des parents, est en voie d'intégration dans la société française ; que si Mme A...s'est maintenu irrégulièrement en France depuis 2004, son concubin, dont les nombreuses pièces produites au dossier montrent qu'il est présent en France depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée, a tenté à de multiples reprises de régulariser leur situation, éventualité que le préfet avait d'ailleurs acceptée par un courrier du 29 octobre 2009, adressé à chacun des concubins, en raison de la situation particulière de ce couple ; que cette régularisation n'avait alors pu aboutir en raison de l'absence de validation du contrat de travail à durée indéterminé à temps complet de M. B...par les services compétents du ministère du travail ; que, dans ces conditions, eu égard à l'ancienneté, la stabilité et l'intensité des relations personnelles et familiales de Mme A...en France, et des difficultés qu'elle aurait avec son compagnon de reconstituer leur cellule familiale dans l'un ou l'autre de leurs pays d'origine, l'arrêté attaqué a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; qu'il a ainsi méconnu tant les dispositions de l'article L. 313-11,7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens relatifs à la régularité du jugement ainsi que les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 20 mai 2011, ainsi que de la décision du 11 juillet 2011 de rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que l'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Haute-Garonne délivre à Mme A...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ; qu'il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet :

6. Considérant que Mme A...bénéficie de l'aide juridictionnelle totale ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions susmentionnées et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Thalamas, avocat de MmeA..., de la somme de 1 000 euros au titre desdites dispositions, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 3 février 2012 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de la Haute-Garonne en date du 20 mai 2011 et sa décision en date du 11 juillet 2011 sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de délivrer à Mme A...un titre de séjour, mention " " vie privée et familiale " familiale ", dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Thalamas la somme de 1 000 euros au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle dont Mme A...a été reconnue bénéficiaire.

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No 12BX01455


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX01455
Date de la décision : 19/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS THALAMAS MAYLIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-03-19;12bx01455 ?
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