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30/07/2013 | FRANCE | N°13BX00576

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 30 juillet 2013, 13BX00576


Vu la requête, enregistrée le 21 février 2013 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 25 février suivant, présentée pour Mme D...B...épouse C...domiciliée..., par Me A...;

Mme B...épouse C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203717 du 24 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 25 septembre 2012 du préfet de la Gironde lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui enjoignant de quitter le territoire français dans le délai de

deux mois et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Gironde de lui d...

Vu la requête, enregistrée le 21 février 2013 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 25 février suivant, présentée pour Mme D...B...épouse C...domiciliée..., par Me A...;

Mme B...épouse C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203717 du 24 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 25 septembre 2012 du préfet de la Gironde lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui enjoignant de quitter le territoire français dans le délai de deux mois et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trente jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juillet 2013 :

- le rapport de M. Jean-Louis Joecklé, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme D...B...épouseC..., ressortissante chinoise, entrée en France selon ses dires en janvier 2004 pour y demander l'asile politique, s'est vue refuser le statut de réfugié par une décision du 30 septembre 2004 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, confirmée le 5 janvier 2005 par la Commission des recours des réfugiés ; que le préfet de police de Paris a refusé de lui délivrer, le 27 janvier 2005 et le 25 septembre 2006, un titre de séjour ; que l'intéressée est entrée de nouveau en France dans des conditions régulières, le 3 juillet 2009, et a obtenu, en qualité d'épouse d'un ressortissant français, successivement trois titres de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dont le dernier arrivait à expiration le 10 juin 2012 ; qu'elle a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour ; que, par un arrêté du 25 septembre 2012, le préfet de la Gironde a refusé de faire droit à cette demande et a fait obligation à Mme B...épouse C...de quitter le territoire national dans le délai d'un mois ; que Mme B...épouse C...relève appel du jugement du 24 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de cet arrêté du 25 septembre 2012 du préfet de la Gironde et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

2. Considérant que la demande de Mme B...épouse C...devant le tribunal administratif de Bordeaux ne contenait que des moyens de légalité interne ; que le moyen de légalité externe tiré de l'absence de motivation sérieuse de l'arrêté contesté du préfet de la Gironde, qui n'est pas d'ordre public et n'a été soulevé que dans la requête d'appel, repose sur une cause juridique distincte et constitue, dès lors, une demande nouvelle irrecevable ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 314-9 du même code : " La carte de résident peut être accordée : 3° A l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition qu'il séjourne régulièrement en France, que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ;

4. Considérant que la requérante soutient que l'absence de cohabitation entre les époux n'est pas à elle seule de nature à faire regarder la communauté de vie comme ayant cessé dès lors qu'elle doit exercer son activité professionnelle à Paris alors que son mari est employé à Bordeaux ; que s'il est vrai que le fait que les époux ne vivent pas sous le même toit n'est pas, par lui-même, de nature démontrer l'absence de communauté de vie, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de l'enquête menée par la police en mai 2012, que les époux, qui se sont rencontrés par l'intermédiaire d'une agence matrimoniale, n'ont jamais vécu ensemble, que le mari de la requérante ignore le passé de celle-ci et ne connaît pas sa famille, n'est jamais allé chez elle à Paris, ne sait pas exactement où elle travaille et ce qu'elle gagne, ne l'appelle pas régulièrement au téléphone ; que l'appartement situé à Bordeaux où vit le mari de la requérante ne comporte aucun effet personnel appartenant à celle-ci ; que la belle-mère de Mme B...a déclaré ne pas l'avoir rencontrée depuis le mariage ; que ni les billets de train pour des trajets entre Paris et Bordeaux, qui ne sont pour la plupart pas nominatifs, ni l'attestation de l'époux de la requérante, rédigée postérieurement à la décision attaquée et dans des termes très généraux, ne suffisent à infirmer les conclusions du rapport d'enquête de police produit en première instance par le préfet de la Gironde, que l'appelante a pu utilement discuter dans le cadre de la procédure contradictoire suivie tant devant le tribunal que devant la cour, et dont il ressort une absence de communauté de vie entre les époux ; qu'en l'absence d'une telle communauté, le préfet, qui a rejeté la demande en relevant que l'intéressée n'entrait dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a pu légalement lui refuser la délivrance d'un titre de séjour, que ce soit sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 dudit code ou sur celui du 3° de l'article L. 314-9 ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne à droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique et au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que Mme B...épouse C...fait valoir, à l'appui de sa requête, que le rejet de sa demande de titre de séjour porte atteinte à sa vie privée et familiale ; qu'elle se prévaut de son séjour en France depuis 2009, des liens sociaux qu'elle y entretient, de ses efforts d'intégration et de ce qu'elle exerce une activité professionnelle ; que, cependant, l'intéressée est sans enfant en France ; que la communauté de vie avec son époux n'est pas établie ; que, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, elle ne conteste pas les dires du préfet selon lesquels son fils âgé de 22 ans, ses parents et ses deux frères et soeurs vivent en Chine, pays où elle a elle-même vécu jusqu'à l'âge de 38 ans ; que, dans ces conditions, et compte tenu de l'absence de communauté de vie avec son époux de nationalité française, le préfet n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde et des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international" ; que le refus de séjour contesté n'a ni pour objet ni pour effet de porter atteinte au droit de propriété de la requérante sur la moitié des parts sociales de la société qu'elle dirige, ni de l'en priver d'un exercice effectif dès lors qu'elle conserve la possibilité d'en tirer les fruits, voire d'exercer ses droits sociaux ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, en tout état de cause, être écarté ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail (...) 2° A l'étranger qui vient exercer une profession commerciale, industrielle ou artisanale, à condition notamment qu'il justifie d'une activité économiquement viable et compatible avec la sécurité, la salubrité et la tranquillité publiques et qu'il respecte les obligations imposées aux nationaux pour l'exercice de la profession envisagée. Elle porte la mention de la profession que le titulaire entend exercer. Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent 2°... " ; qu'aux termes de l'article R. 313-16-1 du même code : " L'étranger qui envisage de créer une activité ou une entreprise doit présenter à l'appui de sa demande les justificatifs permettant d'évaluer la viabilité économique du projet. L'étranger qui envisage de participer à une activité ou une entreprise existante doit présenter les justificatifs permettant de s'assurer de son effectivité et d'apprécier la capacité de cette activité ou de cette société à lui procurer des ressources au moins équivalentes au salaire minimum de croissance correspondant à un emploi à temps plein. Dans tous les cas, l'étranger doit justifier qu'il respecte la réglementation en vigueur dans le domaine d'activité en cause. Un arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé des finances fixe la liste des pièces justificatives que l'étranger doit produire. " ;

9. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante bénéficie d'un contrat de travail visé par l'autorité administrative au sens de l'article L. 341-2 du code du travail, repris désormais à l'article L. 5221-2 du même code ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

10. Considérant que si Mme B...épouse C...soutient qu'elle est associée et gérante de la SARL Trèfle109, dont le siège est situé à Paris, depuis le mois d'août 2012, il ne ressort pas des pièces du dossier que les revenus que lui procure cette activité soient au moins équivalents au salaire minimum de croissance correspondant à un emploi à temps plein ; qu'ainsi, à défaut de justifier du caractère économiquement viable de son activité, la requérante ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 313-10-2° et R. 313-16-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de la Gironde ait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de la requérante ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

12. Considérant que la décision de refus de séjour n'étant pas entachée d'illégalité, la requérante n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) 7° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française " ;

14. Considérant que, comme il vient d'être dit au point 4, la communauté de vie entre Mme B...et son époux de nationalité française n'est pas établie ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision obligeant l'intéressée à quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des dispositions précitées du 7° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...épouse C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté contesté ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

16. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme B...épouseC..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que demande Mme B...épouse C...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...épouse C...est rejetée.

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N°13BX00576


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX00576
Date de la décision : 30/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Jean-Louis JOECKLÉ
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : BONTÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-07-30;13bx00576 ?
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