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07/11/2013 | FRANCE | N°12BX00156

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 07 novembre 2013, 12BX00156


Vu la requête, enregistrée le 23 janvier 2012, présentée pour M. et Mme A...B..., demeurant..., par MeC... ;

M. et Mme B...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400890 du 29 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1998 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à

la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justic...

Vu la requête, enregistrée le 23 janvier 2012, présentée pour M. et Mme A...B..., demeurant..., par MeC... ;

M. et Mme B...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400890 du 29 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1998 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2013 :

- le rapport de Mme Catherine Monbrun, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

1. Considérant que l'administration a remis en cause, en se fondant sur l'existence d'un abus de droit, l'exonération des plus-values réalisées par la SARL Le Tumulus consécutivement à la cession le 26 mai 1998 d'un fonds de commerce de restauration qu'elle exploitait en location-gérance dans la commune de Roscoff, plus-values placées sous le régime d'exonération prévu par l'article 151 septies du code général des impôts ; qu'en conséquence, M. et Mme B..., associés de cette société à responsabilité limitée ayant opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes, prévu par les dispositions de l'article 8 du code général des impôts, ont été assujettis, chacun à raison de leurs droits dans cette société, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des plus-values réalisées lors de cette cession ; qu'ils font appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté leur requête tendant à la décharge de ces impositions ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. (...) " ;

3. Considérant que si ces dispositions ont pour conséquence que toute vérification de comptabilité doit, en principe, se dérouler dans les locaux de l'entreprise vérifiée, la vérification n'est toutefois pas nécessairement entachée d'irrégularité du seul fait qu'elle ne s'est pas déroulée dans ces locaux ; qu'il en va ainsi lorsque, notamment, la comptabilité ne se trouve pas dans l'entreprise et que, d'un commun accord entre le vérificateur et les représentants de l'entreprise, les opérations de vérification se déroulent au lieu où se trouve la comptabilité, dès lors que cette circonstance ne fait, par elle-même, pas obstacle à ce que la possibilité d'engager avec le vérificateur un débat oral et contradictoire demeure offerte aux représentants de l'entreprise vérifiée ; que, dans cette hypothèse, il appartient au requérant d'apporter la preuve que l'entreprise a été privée des garanties ayant pour objet d'assurer aux contribuables la possibilité d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 6 mai 1999, MmeB..., gérante de la SARL Le Tumulus et résidant sur l'île de Saint-Martin a été destinataire d'un avis de vérification de comptabilité ; que cet avis mentionnait que le vérificateur se présenterait le 18 mai 1999 au siège social de la société, sis à Roscoff (Finistère) ; que, par télécopie du 19 mai 1999, la gérante de la société a demandé que la date de début de ce contrôle soit reportée au 8 juin 1999 et que celui-ci se déroule à Lanmeur (Finistère), au domicile de ses beaux-parents ; que, par lettre du même jour, la gérante a mandaté l'expert-comptable de la société pour la représenter durant les opérations de vérification ; qu'ainsi, les opérations de contrôle se sont poursuivies entre le vérificateur et l'expert-comptable mandaté à cet effet par la SARL Le Tumulus ; qu'en se bornant à faire valoir qu'ils n'ont pu rencontrer le service vérificateur que le 8 septembre 1999 alors que le contrôle avait pris fin le 3 septembre 1999, les requérants n'apportent pas la preuve qui leur incombe que la SARL Le Tumulus a été privée de la garantie d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'en se bornant à soutenir que l'examen de documents comptables hors de leur contrôle correspond à un emport irrégulier de documents, les requérants n'établissent pas qu'il y aurait eu un tel emport ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification (...) " ;

7. Considérant que l'avis de vérification adressé à la SARL Le Tumulus mentionne que le contrôle portera sur la période du 1er mars 1995 au 26 mai 1998 ; que la notification de redressement du 6 octobre 1999 mentionne une période identique ; que si les requérants font valoir que la vérification de comptabilité aurait été étendue à la période postérieure au 26 mai 1998, il résulte de l'instruction qu'aucune rectification n'a été notifiée au titre de la période postérieure au 26 mai 1998 ; qu'ainsi, ce moyen doit être écarté ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 201 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Dans le cas de cession ou de cessation, en totalité ou en partie, d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière, ou d'une exploitation agricole dont les résultats sont imposés d'après le régime du bénéfice réel, l'impôt sur le revenu dû en raison des bénéfices réalisés dans cette entreprise ou exploitation et qui n'ont pas encore été imposés est immédiatement établi. Les contribuables doivent, dans un délai de soixante jours déterminé comme il est indiqué ci-après, aviser l'administration de la cession ou de la cessation et lui faire connaître la date à laquelle elle a été ou sera effective, ainsi que, s'il y a lieu, les nom, prénoms, et adresse du cessionnaire. (...) " ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la date de cession du fonds de commerce dont elle était propriétaire à Roscoff, la SARL Le Tumulus avait cédé les parts qu'elle possédait dans le capital de la SARL L'Acropole ; qu'ainsi, la vente du fonds situé à Roscoff mettait fin à l'exercice de toute activité ; que la SARL Le Tumulus ne saurait donc soutenir qu'elle n'avait, au jour de cette cession, aucun autre obligation déclarative que celle résultant de la clôture d'exercice à l'échéance du 28 février 1999 ; qu'ainsi, l'administration était en droit de la mettre en demeure de déposer une déclaration de cessation d'activité et de tirer les conséquences du non-respect de cette mise en demeure, la société ayant déposé sa déclaration le 3 mai 1999 ;

10. Considérant, en cinquième lieu, que le moyen tiré du défaut de motivation des avis d'impositions relatifs aux contributions sociales, lesquels ne sont que des documents d'information, ne peut être utilement soulevé afin de contester la régularité de l'imposition en cause ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

11. Considérant, d'une part, qu'aux termes des dispositions de l'article 151 septies du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " Les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale par des contribuables dont les recettes n'excèdent pas le double de la limite du forfait ou de l'évaluation administrative sont exonérées, à condition que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans, et que le bien n'entre pas dans le champ d'application de l'article 69 " ; qu'aux termes de l'article 202 bis du même code : " En cas de cession ou de cessation de l'entreprise, les plus-values mentionnées à l'article 151 septies du présent code ne sont exonérées que si les recettes de l'année de réalisation, ramenées le cas échéant à douze mois, et celles de l'année précédente ne dépassent pas le double des limites de l'évaluation administrative ou du forfait " ;

12. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses :(...)b) ou qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; (...). L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel. Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif ou que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ; que l'administration peut faire usage des pouvoirs qu'elle tient de ces dispositions lorsqu'elle entend remettre en cause les conséquences fiscales d'une opération se traduisant par l'exonération d'une plus-value dans les conditions prévues par les articles 151 septies et 202 bis du code général des impôts ; que lorsque le comité consultatif pour la répression des abus de droit, saisi à la demande du contribuable, confirme, comme en l'espèce, le bien-fondé de la mise en oeuvre à son encontre de cette procédure, c'est au contribuable qu'il incombe, en vertu desdites dispositions, d'apporter la preuve inverse ;

13. Considérant que l'administration fiscale a estimé que l'avenant du 1er octobre 1996 au contrat de location-gérance établi le 10 novembre 1994 avec la SNC Lydire n'avait eu d'autre motif que de permettre à la SARL Le Tumulus d'être exonérée de droits sur la plus-value réalisée à l'occasion de la vente de son fonds de commerce, dès lors que cet avenant a réduit le chiffre d'affaires provenant de la location-gérance en-deçà du seuil d'exonération fixé par les dispositions des articles 151 septies et 202 bis du code général des impôts ; qu'ayant écarté cet avenant, l'administration fiscale a, en conséquence, soumis à taxation les plus-values réalisées suite à la cession du fonds de commerce ; que les impositions litigieuses ayant été établies conformément à l'avis de la commission de répression des abus de droit, il revient aux requérants de démontrer que l'avenant du 1er octobre 1996 n'avait pas pour seul but d'éluder l'impôt ;

14. Considérant que pour apporter la preuve qui leur incombe, M. et Mme B...soutiennent qu'il n'est pas établi que le loyer aurait été anormalement bas par comparaison avec des locations-gérances semblables ; qu'ils font également valoir que la baisse du loyer stipulée par l'avenant du 1er octobre 1996 répond à un contexte économique difficile résultant d'une concurrence accrue et d'une baisse de fréquentation du port de Roscoff ; qu'ainsi, la baisse consentie par l'avenant litigieux répondait à la volonté de ne pas alourdir les difficultés de la SNC Lydire dans un contexte de réduction d'activité afin de lui permettre d'acheter le fonds de commerce en fin de contrat ;

15. Considérant, toutefois, que préalablement à l'avenant litigieux, le montant du loyer mensuel s'élevait à 28 000 francs (4 268,57 euros) ; qu'en suite de l'avenant du 1er octobre 1996, le montant versé mensuellement par le locataire restait fixé à 28 000 francs, somme affectée formellement pour 5 000 francs (762,25 euros) au paiement du loyer et pour 23 000 francs (3 506,33 euros) à un compte de " crédit-vendeur " ; que ce crédit devait venir en déduction du paiement du prix de vente dans le cas où le locataire achèterait le fonds de commerce, mais resterait acquis à la SARL Le Tumulus dans le cas inverse ; que compte tenu de ces modalités, et alors que l'administration soutient sans être contredite que l'achat du fonds par le locataire était envisagé dès novembre 1994 et que les difficultés économiques rencontrées par la SNC Lydire ne sont pas justifiées, M. et Mme B...n'apportent pas la preuve qui leur incombe de ce que cet avenant procédait d'un motif autre que celui de leur permettre de se soustraire à l'imposition de la plus-value réalisée à l'occasion de la cession du fonds de commerce et de bénéficier ainsi d'une application des dispositions combinées des articles 151 septies et 202 bis du code général des impôts ; que c'est dès lors à bon droit que le service a, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, restitué son véritable caractère à l'opération litigieuse en écartant l'avenant du 1er octobre 1996 et ce, sans qu'y fasse obstacle l'absence de remise en cause du loyer consenti à la SNC Lydire suite à cet avenant;

16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions litigieuses ; que les disposions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. et Mme B...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

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N° 12BX00156


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX00156
Date de la décision : 07/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-005-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: Mme Catherine MONBRUN
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : GUILLERAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-11-07;12bx00156 ?
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