La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/12/2013 | FRANCE | N°12BX00076

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 12 décembre 2013, 12BX00076


Vu, enregistrés le 12 janvier 2012 et le 7 février 2012, la requête introductive d'instance et le mémoire complémentaire, présentés pour M. et Mme A...C...demeurant..., par Me Fernandez-Begault, avocat ;

M. et Mme C...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000064 du 17 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 août 2009 par lequel le maire de la commune de l'Isle-Jourdain a procédé à l'alignement individuel du terrain appartenant à M. D...au droit de l'impasse du Couchan

t, ainsi que de la décision du 16 décembre 2009 rejetant leur recours gracieux...

Vu, enregistrés le 12 janvier 2012 et le 7 février 2012, la requête introductive d'instance et le mémoire complémentaire, présentés pour M. et Mme A...C...demeurant..., par Me Fernandez-Begault, avocat ;

M. et Mme C...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000064 du 17 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 août 2009 par lequel le maire de la commune de l'Isle-Jourdain a procédé à l'alignement individuel du terrain appartenant à M. D...au droit de l'impasse du Couchant, ainsi que de la décision du 16 décembre 2009 rejetant leur recours gracieux ;

2°) d'annuler chacune de ces deux décisions ;

3°) de mettre à la charge de la commune de l'Isle-Jourdain une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la voirie routière ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 2013 :

- le rapport de Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;

- et les observations de Me Fernandez, avocat de M. et MmeC... ;

1. Considérant que, par arrêté du 21 août 2009, le maire de l'Isle-Jourdain a déterminé l'alignement individuel de la propriété de M. B...D...au droit de l'impasse du Couchant ; que M. et Mme C...ont saisi le tribunal administratif de Pau, en leur qualité de propriétaires riverains de ladite voie, d'une requête en annulation de cet arrêté ainsi que de la décision du maire de l'Isle-Jourdain du 16 décembre 2009 ayant rejeté leur recours gracieux ; qu'ils relèvent appel du jugement n° 1000064 du 17 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il est précisé, dans le jugement attaqué : " que l'arrêté contesté, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde, est suffisamment motivé au sens des exigences de la loi susvisée du 11 juillet 1979 (...) " ; que ce faisant, les premiers juges ont répondu au moyen tenant à l'insuffisance de motivation en droit de l'arrêté attaqué et, plus particulièrement, à la branche de ce moyen tenant à l'absence de référence, dans cet arrêté, à l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme ; que les époux C...ne sont par suite pas fondés à soutenir que le tribunal administratif de Pau aurait omis de répondre à l'un de leurs moyens ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que, pour écarter le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté d'alignement en litige, le tribunal administratif de Pau a constaté, comme il vient d'être dit, que cet acte était suffisamment motivé au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 dès lors qu'il énonçait les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; que les premiers juges ont par ailleurs indiqué, dans le cadre de l'examen du moyen tiré de l'erreur de qualification juridique de l'impasse du Couchant, qu'il n'était pas utilement contesté qu'elle faisait partie du domaine de la commune ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutiennent les épouxC..., le tribunal administratif n'a pas omis de se prononcer sur la propriété de cette voie ; qu'enfin, le tribunal administratif, après avoir fait expressément référence à l'ensemble des motifs de son jugement, a indiqué qu'il ne lui avait pas semblé utile de procéder à la mesure d'instruction complémentaire sollicitée par les requérants ; qu'il a, ainsi, suffisamment motivé son jugement sur ce point ; qu'il résulte de ce qui précède que les époux C...ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué du 17 novembre 2011 serait insuffisamment motivé ;

4. Considérant enfin que le juge administratif n'est tenu de saisir le juge judiciaire d'une question préjudicielle relative à l'existence d'un droit de propriété que si, d'une part la réponse à donner à cette question est nécessaire au jugement de la requête et, d'autre part, cette question se heurte à une contestation sérieuse ; que les épouxC..., qui ne remettaient en cause que la domanialité publique de cette voie, n'ont pas contesté, devant les premiers juges, la propriété de la commune sur l'impasse du Couchant, et produisent un acte de propriété qui ne fait état ni de leur propriété sur l'impasse qui jouxte leur bien, ni d'une servitude d'accès sur une autre propriété ; que, dans ces conditions, les premiers juges ont pu admettre la propriété de la commune sur l'impasse du Couchant sans entacher le jugement attaqué d'une quelconque irrégularité à cet égard ;

Sur les conclusions en annulation :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 112-1 du code de la voirie routière : " L'alignement est la détermination par l'autorité administrative de la limite du domaine public routier au droit des propriétés riveraines. Il est fixé soit par un plan d'alignement, soit par un alignement individuel. (...) L'alignement individuel est délivré au propriétaire conformément au plan d'alignement s'il en existe un. En l'absence d'un tel plan, il constate la limite de la voie publique au droit de la propriété riveraine. " ; qu'aux termes de l'article L. 112-4 du même code : " L'alignement individuel ne peut être refusé au propriétaire qui en fait la demande. " ;

6. Considérant, en premier lieu, que le tribunal administratif de Pau a considéré que la circonstance que le maire de l'Isle-Jourdain aurait, pour édicter l'arrêté en litige, pris en considération l'étude de bornage réalisée à la demande de M. D...par un géomètre expert est, à la supposer même établie, sans incidence sur la légalité dudit arrêté dès lors que la délimitation à laquelle il a été procédé, à la suite de la réunion de terrain préalable à son édiction, n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties riveraines ou de tiers intéressés et n'est pas contestée par M. et Mme C...; qu'il résulte de cette formulation que le tribunal administratif a, contrairement à ce que soutiennent les requérants, pris en considération la circonstance que la demande d'alignement en litige a été examinée au regard, notamment, du plan de bornage établi par un cabinet de géomètres experts mandaté par M. D...; qu'il a par ailleurs pu, à bon droit, juger que cette circonstance était sans influence sur la légalité de l'arrêté d'alignement en litige dès lors que cet acte avait été adopté à la suite d'une visite sur les lieux n'ayant donné lieu à aucune contestation de la part des riverains ou des tiers intéressés et que M. et Mme C...ne contestaient en tout état de cause pas le plan de bornage ainsi établi par la SCP Saint-Supery-Jean-Perez ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que si M. et Mme C...contestent devant la cour la propriété de la commune sur l'impasse du Couchant, ils ne font état d'aucun élément sérieux à l'appui de cette affirmation dès lors, d'une part, que le titre de propriété en date du 15 octobre 1957 qu'ils produisent, relatif à l'acquisition des parcelles cadastrées H 592, 601, 602, 603, 604, 605 et 606, par les parents de MmeC..., mentionne l'impasse en litige comme étant située à l'extérieur du fonds cédé ; que d'autre part, la circonstance, à la supposer établie, qu'ils auraient entrepris, depuis 1957, divers travaux d'entretien de l'impasse, ainsi que l'aménagement d'un trottoir au droit de leur propriété, ne permet pas de retenir une possible acquisition de cette voie par le jeu de la prescription trentenaire dès lors que les intéressés ne se prévalent en tout état de cause pas d'une possession exclusive, continue, paisible et non-équivoque pendant trente ans, que cette impasse dessert à tout le moins deux autres propriétés et que la commune de l'Isle-Jourdain a notamment, comme l'ont constaté les premiers juges, fait procéder en 2000 et 2001 à son aménagement et à la mise en place d'un dispositif d'écoulement des eaux pluviales ; que, dans ces conditions, l'impasse en litige doit être regardée sans difficulté sérieuse comme appartenant à la commune ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 141-1 du code de la voirie routière, les voies communales font partie du domaine public communal ; qu'aux termes de l'article L. 141-3 du même code : " Le classement et le déclassement des voies communales sont prononcés par le conseil municipal (...) Les délibérations prévues à l'alinéa précédent sont dispensées d'enquête publique préalable sauf lorsque le classement ou le déclassement envisagé a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par la voie (...) " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'impasse du Couchant ait été formellement classée dans la voirie communale de la commune de l'Isle-Jourdain ;

9. Considérant toutefois qu'aux termes de l'article 9 de l'ordonnance n° 59-115 du 7 janvier 1959 susvisée : " deviennent voies communales les voies qui, conformément à la législation en vigueur à la date de la présente ordonnance, appartiennent aux catégories ci-après : 1°) les voies urbaines (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, sans que soit nécessaire l'intervention de décisions expresses de classement, font partie de la voirie urbaine et appartiennent au domaine public communal, les voies, propriétés de la commune, situées dans une agglomération qui étaient, antérieurement à l'intervention de l'ordonnance du 7 janvier 1959, affectées à l'usage du public ; qu'elles continuent d'appartenir au domaine public communal tant qu'une décision portant désaffectation n'est pas intervenue ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'impasse du Couchant est située dans la partie agglomérée de la commune de l'Isle-Jourdain et permettait déjà, lors de l'intervention de l'ordonnance du 7 janvier 1959, la desserte des quelques parcelles qui la bordent, à partir de l'avenue de Lombez, devenue la rue Charles Bacqué ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'elle était, préalablement à l'intervention de l'ordonnance de 1959, fermée à la circulation générale des véhicules et des piétons ; qu'ainsi, et alors même qu'elle se termine en impasse, cette voie, qui n'est pas fermée, devait être regardée comme affectée, à cette date, à l'usage du public et constitue par suite une voie urbaine faisant partie du domaine public communal ; que le moyen tiré de l'erreur de qualification juridique de l'impasse du Couchant doit, en conséquence, être écarté ; que la circonstance qu'elle soit aujourd'hui l'objet d'une réglementation interdisant son accès aux véhicules " sauf riverains ", eu égard à son étroitesse empêchant le croisement de véhicules, est sans effet sur cette appréciation ;

11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin, d'une part, de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la commune de l'Isle-Jourdain et, d'autre part, de soumettre une question préjudicielle au juge judiciaire, M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 août 2009 par lequel le maire de la commune de l'Isle-Jourdain a procédé à l'alignement individuel du terrain appartenant à M. D...au droit de l'impasse du Couchant, ainsi que de la décision du 16 décembre 2009 ayant rejeté leur recours gracieux ;

Sur les conclusions de la commune de l'Isle-Jourdain tendant à ce qu'une amende soit infligée à M. et Mme C...:

12. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros. " ; que la faculté prévue par cette disposition constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de la commune de l'Isle-Jourdain tendant à ce que M. et Mme C...soient condamnés à une telle amende ne sont pas recevables ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de l'Isle-Jourdain, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. et Mme C...la somme qu'ils demandent au titre des frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens ; qu'il convient, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions présentées au même titre par la commune de l'Isle-Jourdain ;

DECIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de l'Isle-Jourdain au titre de l'article L.761-1 et R. 741-12 du code de justice administrative sont rejetées.

''

''

''

''

3

No 12BX00076


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12BX00076
Date de la décision : 12/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Voirie - Composition et consistance - Notion de voie publique.

Voirie - Régime juridique de la voirie - Alignements - Arrêtés individuels d'alignement.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : FERNANDEZ BEGAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-12-12;12bx00076 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award