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17/03/2014 | FRANCE | N°13BX01884

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 17 mars 2014, 13BX01884


Vu I°), sous le n° 13BX01884, la requête enregistrée le 9 juillet 2013, présentée pour la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe, dont le siège social est situé Petit Pérou à Abymes (97139), représentée par son président, par Me Deraine ;

La caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1200488,1200559 du 20 juin 2013 du tribunal administratif de Basse-Terre qui a annulé les décisions du 20 avril 2012 par lesquelles le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a annul

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Vu I°), sous le n° 13BX01884, la requête enregistrée le 9 juillet 2013, présentée pour la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe, dont le siège social est situé Petit Pérou à Abymes (97139), représentée par son président, par Me Deraine ;

La caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1200488,1200559 du 20 juin 2013 du tribunal administratif de Basse-Terre qui a annulé les décisions du 20 avril 2012 par lesquelles le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a annulé la décision du 21 octobre 2011 de l'inspecteur du travail refusant de lui délivrer l'autorisation de licencier pour faute M. A...E...et a accordé l'autorisation de le licencier ;

2°) de mettre à la charge de M. E...une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu II°), sous le n° 13BX01885, la requête enregistrée le 9 juillet 2013, présentée pour la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe, par Me Deraine ;

La caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 1200488-1200559 du 20 juin 2013 du tribunal administratif de Basse-Terre sur le fondement des dispositions des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative ;

2°) de mettre à la charge de M. E...une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 février 2014 :

- le rapport de M. Joecklé, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;

- les observations de Me Deraine, avocat de la caisse régionale du crédit agricole mutuel de la Guadeloupe ;

1. Considérant qu'à la demande M. A...E..., assistant de clientèle auprès de la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe et exerçant les mandats de membre suppléant du comité d'entreprise, membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, représentant du comité d'entreprise dans le cadre des dispositions de l'article L. 2323-62 du code du travail, conseiller prud'homal et représentant du personnel au sein de la commission paritaire d'établissement, le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé les décisions du 20 avril 2012 du ministre du travail, de l'emploi et de la santé qui ont, d'une part, annulé la décision de l'inspecteur du travail du 21 octobre 2011 refusant de délivrer l'autorisation de le licencier pour faute et, d'autre part, accordé l'autorisation de licenciement ; que, dans l'instance enregistrée sous le n° 13BX01884, la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe fait appel de ce jugement ; que, dans l'instance enregistrée sous le n° 13BX01885, la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe demande à la cour d'ordonner, en application des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à l'exécution de ce même jugement ; qu'il y a lieu de joindre ces deux requêtes pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

3. Considérant que pour annuler les décisions contestées du ministre chargé du travail, les premiers juges ont relevé que les témoignages sur lesquels s'était fondé le ministre émanent pour deux d'entre eux des deux clients du crédit agricole à l'encontre desquels M. E...s'est emporté, et pour les trois autres de trois employés, en lien de subordination avec l'employeur ; qu'ils ont estimé que si l'ensemble de ces témoignages faisait effectivement apparaître que M. E... s'est comporté de façon excessive, en haussant très fortement le ton vis-à-vis des deux clients et en tentant de les faire sortir, il apparaissait toutefois que ces deux derniers avaient pénétré à l'intérieur des locaux abritant le siège du crédit agricole où ils avaient rendez-vous avec le directeur adjoint en dehors des horaires d'ouverture sans respecter la consigne qui leur avait été donnée de rester à l'extérieur et d'appeler par téléphone la secrétaire de direction qui devait les prendre en charge ; qu'ils en ont déduit qu'eu égard à ce non-respect, l'attitude de M. E..., certes fautive sur la forme, et non rattachable à ses mandats de représentation du personnel, si elle était de nature à justifier une sanction disciplinaire, n'était, en revanche, pas de nature à justifier le licenciement de l'intéressé ;

4. Considérant toutefois, qu'il ressort des pièces versées au dossier, notamment des témoignages concordants et des images de la vidéo-surveillance, que, le 21 mars 2011 vers 16 heures 55, M.E..., qui n'avait aucune autorité ou mission d'aucune sorte pour exercer la police des lieux, a tenté d'empêcher deux clients d'affaires présents dans le hall de l'établissement de se rendre au rendez-vous qu'ils avaient avec le directeur adjoint de la banque, qui étaient au surplus pris en charge par un cadre de la banque dès leur arrivée et n'avaient donc pas méconnu une consigne, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ; que M. E...a invectivé violemment ces deux clients et a tenté de les expulser par des gestes inadéquats, notamment en posant la sacoche personnelle de l'un deux à l'extérieur de l'établissement après s'en être emparé ; que l'un de ces clients, craignant pour sa sécurité, a préféré quitter les lieux ; que M.E..., qui avait déjà fait l'objet en 2009 d'un blâme pour des faits de violence commis sur la personne de la directrice des ressources humaines, a de surcroît adopté une attitude provocatrice en demandant à l'un de ces clients de signaler à sa hiérarchie qu'il était bien l'auteur de cet incident ; que la matérialité de ces faits, qui sont sans relation avec sa qualité de salarié protégé alors même que M. E...finissait de participer à une réunion relative au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, est établie ; qu'un tel comportement à l'égard de deux clients portant atteinte à l'image de l'établissement bancaire et troublant son fonctionnement normal constitue une faute suffisamment grave pour justifier le licenciement de M. E...; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Basse-Terre s'est fondé sur le motif tiré de ce que l'attitude de M. E...n'était pas de nature à justifier le licenciement de l'intéressé pour annuler les décisions contestées du ministre chargé du travail ;

5. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. E...devant le tribunal administratif de Basse-Terre ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe :

6. Considérant qu'en application du 2° de l'article premier du décret du 27 juillet 2005, les directeurs adjoints des ministères peuvent signer, au nom du ministre et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité ; qu'ainsi M. B...C..., dont le décret de nomination du 6 octobre 2011 en qualité de directeur adjoint au directeur général du travail a été publié au Journal officiel de la République française le 7 octobre 2011, avait du fait de cette nomination compétence pour signer les décisions contestées au nom du ministre sans qu'il soit besoin de faire mention de cette délégation dans le corps de ces décisions ;

7. Considérant que les décisions contestées du ministre accordant l'autorisation de licencier M. E...énoncent les motifs de fait et de droit sur lesquels elles se fondent ; qu'en estimant que la faute reprochée à M. E...était d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement compte tenu des règles applicables à son contrat de travail, aux antécédents et aux exigences propres à l'exécution normale de ses mandats, le ministre du travail, qui n'avait pas à répondre à l'ensemble des arguments avancés par M.E..., a suffisamment motivé ses décisions ;

8. Considérant que les conditions de notification et de diffusion des décisions contestées sont, en tout état de cause, dépourvues d'incidence sur leur légalité ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2422-1 du code du travail : " Le ministre chargé du travail peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet. Ce recours est introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur. Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur ce recours vaut décision de rejet. " ;

10. Considérant que le recours hiérarchique formé par la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe a été reçu le 22 décembre 2011 dans les services du ministre du travail ; qu'il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre de l'instruction de ce recours hiérarchique, M. E...a été reçu le 21 mars 2012 par le directeur des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) de la Guadeloupe et que les décisions contestées ont été prises le 20 avril 2012 après instruction des pièces produites par les parties et des rapports établis par les services de la Direccte, soit à l'intérieur du délai de quatre mois dont disposait le ministre du travail pour se prononcer ; qu'à l'appui de son moyen tiré de ce que le délai de deux mois dont disposerait l'administration pour mener l'enquête contradictoire n'aurait pas été respecté, M. E...ne peut utilement se prévaloir des termes de la circulaire DRT n° 2003-16 du 3 octobre 2003 relative au traitement des recours hiérarchiques formés contre les décisions des inspecteurs et des directeurs du travail en matière de salariés protégés et d'élections professionnelles, qui ne présente pas un caractère impératif ;

11. Considérant que le recours hiérarchique formé par la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe était daté du 17 décembre 2011 et non, comme le prétend M. E..., du 22 décembre 2011 ; que, comme il a été dit ci-dessus au point 10, ce recours a été reçu le 22 décembre 2011 dans les services du ministre du travail ; que, par suite, le moyen tiré d'une falsification de la date du dépôt de ce recours doit être écarté ;

12. Considérant que si M. E...soutient qu'il n'a pas reçu communication du rapport de la direction du travail concernant le recours hiérarchique formé par son employeur et de tous les actes et documents relatifs au traitement de ce recours, il n'invoque la méconnaissance d'aucune disposition législative ou réglementaire faisant obligation au ministre du travail de lui communiquer ces documents ;

13. Considérant que M. E...soutient que le texte des deux décisions contestées qui lui ont été notifiées a été modifié ; que la circonstance qu'à la suite d'une erreur de plume quant à la date de la décision de l'inspecteur du travail annulée par le ministre chargé du travail une rectification a été faite et notifiée aux parties le 11 mai 2012 par courrier et le 14 mai suivant par messagerie est sans incidence sur la légalité de la décision ministérielle ;

14. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre chargé du travail se serait prononcé en s'abstenant de procéder au contrôle du respect par l'employeur de la régularité de la procédure de licenciement, qu'il s'agisse de la procédure de droit commun ou de la procédure conventionnelle ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1332-2 du code du travail : " Lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié (...). / Au cours de l'entretien, l'employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié. La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé. " ; qu'à l'appui de son moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 1332-2 du code du travail, M. E... se prévaut d'une attestation de son conseiller, M.F..., selon laquelle, au cours de cet entretien qui s'est tenu le 1er juin 2011, le directeur général adjoint de la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe se serait contenté de faire allusion à son soi-disant caractère agressif et contestataire sans aller dans le détail des faits qui lui étaient reprochés ; que, toutefois, une telle attestation, qui au demeurant est dépourvue de valeur probante en l'absence de toute mention d'un document officiel permettant de justifier de l'identité de son auteur, ne suffit pas à établir que le représentant de son employeur ne lui a pas indiqué le motif de la sanction envisagée alors qu'il ressort des termes de la lettre du 15 mai 2012 lui notifiant son licenciement qu'au cours de cet entretien M. E...n'a fourni aucune explication sur le comportement qui lui était reproché ; que si le requérant fait également valoir que le délai d'un mois était expiré à la date de la décision contestée compte tenu du fait que l'entretien préalable s'est tenu le 1er juin 2011, ce moyen est inopérant à l'encontre de la décision du ministre du travail dès lors que la sanction prévue par les dispositions précitées de l'article L. 1332-2 du code du travail ne se rapporte pas à l'autorisation administrative de licenciement mais à la sanction prononcée par l'employeur ;

16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1332-4 du code du travail : " Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales. " ; que l'employeur ne peut pas fonder une demande d'autorisation de licenciement sur des faits prescrits en application de cette disposition, sauf si ces faits procèdent d'un comportement fautif de même nature que celui dont relèvent les faits non prescrits donnant lieu à l'engagement des poursuites disciplinaires ; que la convocation de M. E...à l'entretien préalable à raison des faits survenus le 21 mars 2011 ayant été notifiée par lettre recommandée du 19 mai 2011, présentée au domicile de l'intéressé le 21 mai 2011 ainsi qu'il ressort des mentions figurant sur l'accusé de réception, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 1332-4 du code du travail ne peut qu'être écarté ;

17. Considérant que la soumission de toute procédure de licenciement au conseil de discipline constitue une obligation conventionnelle conformément aux articles 12 et 13 de la convention collective nationale du crédit agricole ; que les faits reprochés à M. E...constituent des fautes professionnelles et ne se rattachent pas à l'exercice de ses mandats ; que, par suite, le moyen tiré d'une prétendue incompétence matérielle de cette instance doit être écarté ;

18. Considérant que si M. E...soutient que son employeur aurait abusivement multiplié les convocations devant le conseil de discipline, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a été convoqué par lettre du 15 juin 2011, reçue le 17 juin suivant, pour un conseil de discipline prévu le 30 juin 2011 ; qu'en raison de la production d'un certificat médical attestant de l'hospitalisation de l'intéressé le 30 juin 2011, un conseil de discipline a été convoqué, par lettre du 29 juin 2011, pour le 13 juillet 2011 ; que l'hospitalisation de M. E...ayant été prolongée avec une sortie prévue le 15 juillet 2011, le conseil de discipline a été reporté au 28 juillet 2011, date à laquelle il s'est prononcé favorablement sur le licenciement de M. E... ; qu'ainsi, les différentes convocations adressées à M. E...ont toutes été motivées d'une part, par son hospitalisation et, d'autre part, par le respect des dispositions conventionnelles ; que, par suite, M. E...ne peut sérieusement soutenir que les dispositions de l'article L. 1332-2 du code du travail auraient été méconnues en raison du dépassement du délai d'un mois entre sa première convocation, le 17 juin 2011, devant le conseil de discipline et l'avis émis par celui-ci lors de sa réunion du 28 juillet 2011 ;

19. Considérant que le requérant n'établit pas que le dossier soumis au conseil de discipline, composé d'un dossier explicatif des motifs de la sanction envisagée et de treize pièces, aurait était incomplet au regard des exigences de la convention collective nationale du crédit agricole du 4 novembre 1987, et de nature à ne pas informer suffisamment l'ensemble de ses membres sur les motifs de la procédure le concernant ;

20. Considérant que si M. E...soutient que son employeur a porté atteinte " au secret de l'instruction du dossier de l'intéressé " en communiquant son dossier à M. D...qui ne serait selon lui ni salarié du crédit agricole, ni membre du conseil de discipline, la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe soutient sans être sérieusement contredite que M. D...avait été désigné par l'intéressé lui-même pour l'assister devant le conseil de discipline et que si le contrat de travail de M.D..., salarié du crédit agricole, était suspendu compte tenu du congé sabbatique pris par l'intéressé, cette suspension n'entraînait pas celle de son mandat ; que, par suite, le moyen tiré de l'atteinte porté au " secret de l'instruction " doit être écarté ;

21. Considérant que l'assistance d'un avocat n'étant pas prévue par l'article 13 de la convention collective nationale du crédit agricole régissant la procédure applicable devant le conseil de discipline, M. E...ne saurait utilement se prévaloir d'une atteinte portée aux droits de la défense résultant du refus de la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe de laisser son avocat l'assister devant le conseil de discipline ;

22. Considérant que le procès-verbal de ce conseil de discipline est signé par les membres présents le composant ; que la circonstance que ce procès-verbal soit également signé par le directeur général adjoint de la caisse régionale est sans incidence sur sa régularité ; qu'il n'est pas établi que les membres du conseil de discipline auraient fait preuve d'un manque d'objectivité et de neutralité à l'égard du requérant ; que les termes de ce procès-verbal révèlent une délibération collective ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'avis du conseil de discipline serait entaché d'irrégularité ;

23. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.E..., la convocation des membres du comité d'entreprise à la réunion du 12 août 2011 précisait clairement que son ordre du jour portait sur l'examen du projet de licenciement pour comportement fautif de l'intéressé ; qu'il n'est pas établi qu'une confusion du dossier du salarié protégé transmis au comité d'entreprise aurait été opérée avec celui remis au conseil de discipline ; que la note d'information soumise au comité d'entreprise évoquait très précisément les faits reprochés à l'intéressé et les mandats détenus par lui ;

24. Considérant que M. E...soutient que conformément au code du travail, au règlement intérieur et à l'article 12 de la convention collective nationale, la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe disposait jusqu'à la fin du mois de juillet 2011 pour terminer sa procédure interne et que ce délai n'ayant pas été respecté, elle n'avait plus autorité pour saisir l'inspecteur du travail afin que sa décision relance un nouveau délai d'un mois, de sorte que le comité d'entreprise du 12 août 2011 se serait tenu hors délai ; que cependant la tenue du conseil de discipline le 28 juillet 2011 ayant interrompu la prescription du délai d'un mois, le moyen tiré de la convocation tardive du comité d'entreprise doit être écarté ;

25. Considérant que si M. E...soutient que son mandat de représentant syndical de l'union générale des travailleurs de la Guadeloupe aurait été dissimulé aux membres du comité d'entreprise, il ressort des pièces du dossier et notamment de la lettre du 19 février 2008 du secrétaire général de ce syndicat que l'intéressé ne bénéficiait plus depuis cette date du mandat de délégué syndical suppléant au sein du crédit agricole mutuel de la Guadeloupe ;

26. Considérant que ni le défaut de validité de la convocation compte tenu de l'absence de qualité suffisante de ses deux signataires, ni le caractère tendancieux de certaines informations contenues dans la note de présentation transmise aux membres du comité d'entreprise, ni la falsification du procès-verbal du comité d'entreprise allégués par M. E...ne sont établis par les pièces du dossier ;

27. Considérant que si M. E...fait valoir l'absence d'avis véritablement émis par le comité d'entreprise, il ressort cependant des termes du procès-verbal qu'un vote est intervenu et qu'à l'issue du scrutin, deux votes défavorables au licenciement et un vote favorable ont été émis, les trois autres membres s'étant abstenus ;

28. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. E...aurait fait l'objet d'une discrimination et d'un harcèlement moral au travail ;

29. Considérant que la mesure de licenciement pour faute grave est sans lien avec les fonctions représentatives exercées par M. E...;

30. Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

31. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé les décisions du ministre du travail, de l'emploi et de la santé l'autorisant à licencier M. E...;

Sur la demande de sursis à exécution du jugement :

32. Considérant que la cour statue par le présent arrêt sur les conclusions de la requête n°13BX01884 présentée par la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe tendant à l'annulation du jugement du 20 juin 2013 du tribunal administratif de Basse-Terre ; que, par suite, les conclusions de la requête n°13BX01885 qui tendent à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

33. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. E...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E...la somme que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement n°s 1200488, 1200559 du 20 juin 2013 du tribunal administratif de Basse-Terre est annulé.

Article 2 : Les demandes de M. E...présentées devant le tribunal administratif de Basse-Terre sont rejetées.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution contenues dans la requête n° 13BX01885.

Article 4 : Les conclusions présentées par la caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Guadeloupe et par M. E...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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Nos 13BX01884 - 13BX01885


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX01884
Date de la décision : 17/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Jean-Louis JOECKLÉ
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : SELARL JEAN-MARC DERAINE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-03-17;13bx01884 ?
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