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08/04/2014 | FRANCE | N°13BX02803

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 08 avril 2014, 13BX02803


Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 2013, présentée pour Mme B...D...A..., demeurant..., par Me C...;

Mme A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 13001388 du 27 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 décembre 2012 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrê

té du 26 décembre 2012 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Lot-et-Garonne de procéder à un...

Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 2013, présentée pour Mme B...D...A..., demeurant..., par Me C...;

Mme A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 13001388 du 27 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 décembre 2012 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 décembre 2012 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Lot-et-Garonne de procéder à un nouvel examen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne publiée au journal officiel de l'Union européenne le 14 décembre 2007 ;

Vu la directive 2008/115/CE du parlement européen et du conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats-membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2014 :

- le rapport de M. Jean-Pierre Valeins, président assesseur ;

1. Considérant que MmeA..., de nationalité sénégalaise, relève appel du jugement du 27 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 décembre 2012 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de renouveler sa carte de séjour temporaire au titre de la vie privée et familiale, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

Sur l'ensemble de l'arrêté préfectoral :

2. Considérant que l'arrêté attaqué vise l'ensemble des textes applicables et rappelle avec précision les conditions de l'entrée et du séjour en France de MmeA..., notamment le fait qu'elle était mariée avec un français lequel avait déposé le 19 juillet 2012 une requête en divorce et qu'une ordonnance de non conciliation du 16 novembre 2012 constatait la rupture de la vie commune ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué est suffisamment motivé au regard des exigences de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

Sur le refus de renouvellement du titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage (...) " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du même code: " Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement (...) " ;

4. Considérant qu'il est constant qu'à la date du 26 décembre 2012, à laquelle a été prise la décision contestée, MmeA..., séparée de son mari, ne remplissait pas la condition de communauté de vie entre époux lui ouvrant droit au renouvellement de sa carte de séjour en qualité de conjointe de ressortissant français ; que si elle soutient que la vie commune a été rompue à son initiative en raison des violences qu'elle a subies, cette seule circonstance n'est pas de nature à la faire bénéficier de plein droit du renouvellement de son titre de séjour ; qu'il ressort des pièces du dossier que MmeA..., qui est entrée en France à l'âge de vingt-deux ans, n'était présente sur le territoire français que depuis deux ans à la date de l'arrêté attaqué et n'était pas dépourvue de toute attache dans son pays d'origine ; que le divorce a été demandé par son époux en juillet 2012 ; que lors de la médiation pénale du mois d'octobre 2012, Mme A...dont la plainte a été classée sans suite, a renoncé aux poursuites pénales à la fois pour les faits de violence reconnus par son époux mais également pour les faits qu'il n'a pas reconnus et qu'elle lui reprochait dans sa plainte ; que dès lors, compte tenu tant de la situation de Mme A...en France au regard de son droit au séjour que des circonstances de la rupture de sa vie avec son époux, en refusant un titre de séjour à MmeA..., le préfet de Lot-et-Garonne n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-12 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui accordent à l'administration un pouvoir d'appréciation pour renouveler le titre de séjour dans le cas de rupture de la communauté de vie du fait de violences de la part du conjoint français ; que pour contester cette décision, dont la légalité s'apprécie à la date à laquelle elle a été signée, Mme A...ne peut utilement faire valoir que le divorce a été prononcé aux torts exclusifs de son époux le 20 décembre 2013, soit postérieurement à la signature de l'arrêté attaqué ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que MmeA..., qui n'a fondé sa demande ni sur les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni sur celles de l'article L. 313-14 du même code, ne peut utilement invoquer ces dispositions ; qu'elle ne peut pas davantage se prévaloir de la circulaire du 28 novembre 2012, qui est dépourvue de caractère réglementaire ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui "; que, pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

7. Considérant que Mme A...soutient qu'elle vit en France de manière continue depuis décembre 2010, qu'elle occupe un emploi stable depuis 3 ans dans lequel elle s'est particulièrement investie, qu'elle est à jour de ses obligations fiscales, qu'elle a quitté de longue date le Sénégal dont elle a la nationalité, qu'elle est parfaitement intégrée et justifie d'une bonne connaissance des valeurs de la République, ayant suivi une formation civique, qu'elle ne constitue pas une menace pour l'ordre public et que sa soeur vit à Paris ; que, toutefois, ainsi qu'il a déjà été dit au point 4, Mme A...est entrée en France récemment à l'âge de vingt deux ans , elle a toujours vécu au Sénégal où résident ses parents et à la date de la décision attaquée, elle était séparée de son mari ; que, dans ces conditions, la décision par laquelle le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de renouveler le titre de séjour accordé à Mme A...en qualité de conjointe de Français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'en conséquence, elle n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, ce refus n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

8. Considérant que Mme A...soutient que le préfet aurait dû solliciter ses observations avant de prendre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français et se prévaut à l'appui de ce moyen de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et du principe général des droits de la défense, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne ;

9. Considérant qu'en vertu de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tout étranger qui sollicite un titre de séjour doit se présenter personnellement en préfecture, et qu'aux termes de l'article R. 311-13 du même code : " En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français." ; qu'ainsi Mme A...ne pouvait ignorer que si la demande de renouvellement de titre de séjour qu'elle avait présentée, en invoquant les circonstances de fait qui la justifiaient selon elle, n'était pas accueillie, elle était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne [C-383/13 PPU du 10 septembre 2013] une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué, que Mme A...aurait eu de nouveaux éléments à faire valoir qui auraient conduit le préfet à prendre une décision différente ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en prenant à son encontre une mesure d'éloignement sans la mettre en mesure de présenter ses observations, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement et également méconnu les dispositions de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;

10. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment de la motivation de la décision attaquée que le préfet se serait cru tenu d'obliger la requérante à quitter le territoire français, et n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de MmeA... avant de prendre cette décision ;

11. Considérant que Mme A...ne peut utilement invoquer la circonstance que la décision attaquée l'aurait empêchée de présenter ses observations devant le tribunal de grande instance d'Agen qui devait se prononcer sur sa demande de divorce dès lors qu'une telle procédure n'exige pas la comparution personnelle des parties qui peuvent se faire représenter par un avocat ; que dès lors, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire dont elle a fait l'objet méconnaît son droit au procès équitable garanti par les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales selon lesquelles " tout accusé a droit notamment à (...) se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix (...) " ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

14. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A...n'appelle aucune mesure d'exécution ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

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No 13BX02803


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX02803
Date de la décision : 08/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre VALEINS
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : LAMPE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-04-08;13bx02803 ?
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