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14/10/2014 | FRANCE | N°12BX00056

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 14 octobre 2014, 12BX00056


Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 2012 sous forme de télécopie, régularisée par courrier le 16 janvier 2012, présentée pour la Société Guintoli, dont le siège est Parc d'activité de Laurade à Saint Etienne-du-Grès (13103), par MeA... ;

La société Guintoli demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0902115 du 10 novembre 2011 du tribunal administratif de Bordeaux en ce qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de sa demande tendant à la condamnation de l'Etat au versement de la somme de 1 492 306,64 euros TTC au principal, en paiement des travaux

supplémentaires et des sommes déboursées au titre des sujétions imprévues dans l...

Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 2012 sous forme de télécopie, régularisée par courrier le 16 janvier 2012, présentée pour la Société Guintoli, dont le siège est Parc d'activité de Laurade à Saint Etienne-du-Grès (13103), par MeA... ;

La société Guintoli demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0902115 du 10 novembre 2011 du tribunal administratif de Bordeaux en ce qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de sa demande tendant à la condamnation de l'Etat au versement de la somme de 1 492 306,64 euros TTC au principal, en paiement des travaux supplémentaires et des sommes déboursées au titre des sujétions imprévues dans l'exécution des travaux de reconstruction de la cuirasse de protection contre les flots du phare de Cordouan ;

2°) de condamner l'Etat au paiement de la somme de 1 741 078,30 euros TTC au titre de l'ensemble des préjudices, assortie des intérêts moratoires et complémentaires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 25 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapport avec la maîtrise d'oeuvre privée ;

Vu le décret du 29 novembre 1993, relatif aux missions de maître d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

Vu le décret du 23 août 2001 ;

Vu le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 modifié ;

Vu l'arrêté du 21 décembre 1993 précisant les modalités techniques d'exécution des éléments de missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 septembre 2014 :

- le rapport de Frédérique Munoz-Pauziès, premier conseiller ;

- les observations de Me Pietra, avocat de la Société Guintoli ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

1. Considérant que, par un marché de travaux du 24 mai 2004, l'Etat a confié à la société Spie Batignolles Ouest, à laquelle s'est substituée la société Guintoli, les travaux de reconstruction de la cuirasse de protection en béton armé du phare de Cordouan, pour le prix global et forfaitaire de 3 310 000,25 euros HT soit 3 958 760,30 euros TTC, ramené par avenant n° 2 à 3 789 160,56 euros TTC ; qu'estimant que des sujétions imprévues avaient eu pour conséquences d'augmenter considérablement les quantités de matériaux à mettre en oeuvre, et qu'elle avait dû procéder à des travaux supplémentaires, la société Guintoli a remis au maître d'oeuvre un mémoire de réclamation détaillant ses demandes ; que, n'ayant pas obtenu satisfaction, elle a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 492 306,64 euros TTC au principal ; qu'elle relève appel du jugement du 10 novembre 2011 en ce que le tribunal n'a fait droit à sa demande qu'à concurrence de la somme, au principal, de 274 675,48 euros HT ; que, par la voie de l'appel incident, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande la réformation du jugement en ce qu'il a partiellement fait droit aux prétentions de la requérante ;

Sur l'invocation de fautes de l'Etat qui seraient constitutives d'un dol :

2. Considérant que lorsqu'il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, le juge administratif doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ;

3. Considérant que la société Guintoli soutient que l'Etat aurait fait preuve d'une " intention délibérément dolosive " en passant un marché à prix forfaitaire, dès lors que les nombreuses approximations et lacunes dans la conception du projet, s'agissant des données et des contraintes relatives au site des travaux, ainsi que l'insuffisance des études de conception et du programme révèleraient l'intention initiale du maître d'ouvrage de conclure un marché à prix unitaires ; que, toutefois, le dossier de consultation des entreprises, notamment le cahier des clauses administratives particulières, faisait clairement apparaître le caractère forfaitaire de la rémunération du marché ; que ce même dossier, et plus précisément le cahier des clauses techniques particulières, indiquait avec suffisamment de précision les différentes contraintes à respecter et les obligations incombant à l'entrepreneur préalablement à la réalisation de la nouvelle cuirasse, en particulier, la nécessité de procéder à la reconnaissance géométrique de la cuirasse existante en vue de procéder à la définition de la nouvelle cuirasse ; que l'entreprise signataire du marché, qui a été ainsi mise à même de mesurer les contraintes qui s'imposaient à elle et ne pouvait ignorer le mode de rémunération du marché, ne saurait être regardée comme ayant été induite en erreur par l'Etat ; que, par suite, et en tout état de cause, l'invocation de fautes de l'Etat qui seraient constitutives d'un dol ne peut qu'être écartée ;

Sur les travaux dont la société Guintoli demande le paiement :

En ce qui concerne le coffrage perdu :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans le but d'empêcher que les efforts supportés par la cuirasse neuve ne se répercutent sur l'ancienne cuirasse, le marché prévoyait la pose d'un placage de polystyrène haute densité de 50 mm d'épaisseur sur l'ancienne cuirasse, assurant la fonction de coffrage perdu des voiles, et qui se serait progressivement détruit sous l'effet des flots ; que cette solution élaborée par le maître d'oeuvre s'étant révélée peu fiable, la société Guintoli, dans un premier temps, a proposé la mise en place d'un système de coffrage intérieur démontable et maintenu écarté des maçonneries existantes par des tuyaux remplis d'eau, qui n'a pas donné les résultats escomptés, puis, dans un second temps, a mis en oeuvre une autre solution technique consistant en la pose d'entrecroises en bois fixées sur les maçonneries existantes et supportant les plaques de coffrage ; que ces travaux ayant été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, c'est à bon droit que les premiers juges ont condamné l'Etat à verser à la société Guintoli la somme de 71 700 euros HT ; que la société n'est pas fondée à demander que cette somme soit actualisée en application de l'article 3-3.4 du cahier des clauses administratives particulières du marché en cause, dès lors que ces travaux n'étaient pas au nombre de ceux qui avaient fait l'objet d'une fixation de leur prix par le marché ;

En ce qui concerne l'adaptation du mode de mise en oeuvre du béton :

5. Considérant que le marché en cause prévoyait pour la mise en oeuvre du béton l'installation d'une benne manutentionnée par grue sur ponton pour les murs, et d'une bétonnière automobile sur roues, utilisable à marée basse, pour les semelles ; que, si la société Guintoli soutient que 27 jours consécutifs d'intempéries en début de chantier l'ont obligée à utiliser une méthode de mise en oeuvre du béton par pompage, pour un surcoût total de 98 400 euros HT, il ne résulte pas de l'instruction que les intempéries, dont l'existence n'est au demeurant pas établie, auraient eu un caractère exceptionnel et imprévisible ; que, si la société Guintoli fait également valoir l'augmentation de la quantité de béton utilisée pour la réalisation des semelles et des murs, cette augmentation fait l'objet d'un autre poste de réclamation examiné aux points 10 et 11 du présent arrêt ;

En ce qui concerne la réalisation des micro-pieux destinés à arrimer la cuirasse au sol :

6. Considérant que le marché de travaux prévoyait la réalisation de 132 micro-pieux, dont 36 de 200 mm et 96 de 89 mm, nécessitant 20 250 kg d'armatures passives en acier, 30 000 litres de coulis de scellement et 25 jours de travail ; que la société fait valoir que, du fait de l'état du sous-sol, constaté lors des essais qu'elle a réalisés deux mois après le démarrage des travaux conformément aux prévisions contractuelles, et des contraintes spécifiques au chantier, liées aux marées et aux faibles coefficients de marée rencontrés, elle a été obligée de mettre en oeuvre 84 pieux de 200 mm de diamètre nécessitant 582 m de forage, 48 pieux de diamètre 150 mm nécessitant 280 m de forage et 26 360 kg d'armatures passives en acier, 113 698 litres de coulis de scellement sur-dosé en ciment, et que le délai de réalisation des micro-pieux est passé de 25 à 55 jours ouvrés ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, ni que l'état du sous-sol et les contraintes liées aux marées auraient revêtu un caractère exceptionnel et imprévisible, ni encore que ces travaux auraient été rendus nécessaires par des insuffisances fautives dans la conception de l'ouvrage ;

En ce qui concerne le béton et les aciers d'armature de la structure :

7. Considérant que les résultats de la reconnaissance géométrique du soubassement, effectuée par la société Guintoli en application de l'article 4-1.2 du cahier des clauses techniques particulières, ont contraint l'entreprise à reconsidérer la conception de la nouvelle cuirasse et à adopter une forme extérieure complexe comportant notamment 4 courbures différentes au lieu d'une seule, ce qui a entraîné une augmentation de 21 % du volume de béton initialement prévu et de 18 % du poids d'aciers d'armatures, qui n'était pas, contrairement à ce que soutient le ministre, raisonnablement prévisible lors de la conclusion du marché ; qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par le ministre, que ces travaux supplémentaires étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont condamné l'Etat à indemniser la société Guintoli de ce chef de préjudice ;

8. Considérant que le tribunal n'a indemnisé le préjudice résultant de l'augmentation de la quantité de béton qu'à concurrence de la somme de 164 458,54 euros HT, sans prendre en compte les sommes, pourtant non contestées, de 2 060,54 euros HT, correspondant aux éprouvettes de contrôle, et de 1 484,58 euros HT, correspondant à la démolition des parties en saillie de l'ancienne cuirasse ; qu'il y a lieu dès lors d'attribuer ces sommes à la requérante, actualisées en application de l'article 3-3.4 du cahier des clauses administratives particulières du marché en cause ;

9. Considérant que la société Guintoli est fondée à demander que le prix des aciers supplémentaires mis en oeuvre soit actualisé en application des articles 3-3.1 et suivants du cahier des cahiers des clauses administratives particulières ;

En ce qui concerne les travaux supplémentaires demandés en cours d'exécution du marché :

10. Considérant, d'une part, que la société requérante soutient sans être contredite que les travaux relatifs à la fourniture et l'installation d'un joint périphérique entre la nouvelle cuirasse et l'ancienne, pour un prix de 17 690 euros HT, de clouage de facettes instables de l'ancienne cuirasse, pour un montant de 1 290 euros HT, et de sciage et démolition de l'about de la facette de rive de l'ancienne cuirasse, pour une somme de 7 835 euros HT, lui ont été payés sans tenir compte de l'actualisation des prix prévue à l'article 3-3-4 du cahier des clauses administratives particulières ; que, toutefois, ces travaux n'étaient pas au nombre de ceux qui avaient fait l'objet d'une fixation de leur prix par le marché, la requérante n'est pas fondée à demander une telle actualisation des prix en application du contrat ; qu'elle a droit cependant aux intérêts de ces sommes ;

11. Considérant, d'autre part, que l'avenant n° 2 du 16 février 2005 modifiant certaines quantités du décompte du prix global forfaitaire et ce prix, ramène le prix du marché de 3 958 760,30 euros TTC à 3 789 160,56 euros TTC et prévoit dans son article 1.5.2 : " Dans les zones présentant des vides ou cavités, il sera mis en oeuvre un béton autoplaçant armé d'un ferraillage et fixé par ancrages ou d'un ragréage en fonction des vides à combler (...) " ; que c'est par suite à bon droit que les premiers juges ont estimé que les travaux de remplissage de cavités du soubassement du phare par béton auto-plaçant étaient prévus par le marché et ne pouvaient dès lors être regardés comme des travaux supplémentaires ;

En ce qui concerne les intempéries des mois d'avril et mai 2005 :

12. Considérant que la société Guintoli fait valoir que le montage des installations de chantiers à proximité du phare, qui devait selon le planning contractuel durer 44 jours, en a demandé 64, du fait, d'une part, des faibles coefficients de marées du 15 au 19 avril 2005, ne permettant pas de découvrir le plateau rocheux et de réaliser les ancrages de l'estacade, et d'autre part, de la présence de fortes houles pendant 27 journées, entre le 22 avril et le 26 mai, ayant rendu impossibles les transferts maritimes de personnels, matériels et matériaux ; que, toutefois, la société requérante n'établit ni la réalité de ces phénomènes naturels, ni leur caractère exceptionnel et imprévisible pour un chantier implanté en pleine mer à quatre miles des côtes charentaises ;

Sur l'application de l'article 15.3 du cahier des clauses administratives générales :

13. Considérant qu'aux termes de l'article 15 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché en cause : " 15.3. Si l'augmentation de la masse des travaux est supérieure à l'augmentation limite définie à l'alinéa suivant, l'entrepreneur a droit à être indemnisé en fin de compte du préjudice qu'il a éventuellement subi du fait de cette augmentation au-delà de l'augmentation limite. / L'augmentation limite est fixée : / - pour un marché à prix forfaitaires, au vingtième de la masse initiale (...) 15.4 Lorsque la masse des travaux exécutés atteint la masse initiale, l'entrepreneur doit arrêter les travaux s'il n'a pas reçu un ordre de service lui notifiant la décision de les poursuivre prise par la personne responsable du marché. Cette décision n'est valable que si elle indique le montant limite jusqu'auquel les travaux pourront être poursuivis, le dépassement éventuel de ce montant limite devant donner lieu à la même procédure et entraîner les mêmes conséquences que celles qui sont définies ci-après pour le dépassement de la masse initiale. / L'entrepreneur est tenu d'aviser le maître d'oeuvre, un mois au moins à l'avance de la date probable à laquelle la masse des travaux atteindra la masse initiale. L'ordre de poursuivre les travaux au-delà de la masse initiale, s'il est donné, doit être notifié dix jours au moins avant cette date. / A défaut d'ordre de poursuivre, les travaux qui sont exécutés au-delà de la masse initiale ne sont pas payés et les mesures conservatoires à prendre, décidées par le maître d'oeuvre, sont à la charge du maître de l'ouvrage sauf si l'entrepreneur n'a pas adressé l'avis prévu ci-dessus. " ;

14. Considérant que la société soutient qu'elle a subi un préjudice, dont elle demande réparation à concurrence de la somme de 89 011,39 euros HT avant actualisation, du fait de l'augmentation de la masse des travaux, et produit un tableau faisant apparaître une différence entre les travaux initialement prévus au contrat et ceux qu'elle prétend avoir effectivement réalisés, pour une somme de 791 287,21 euros HT ;

15. Considérant, toutefois, que la société ne conteste pas le motif retenu par les premiers juges pour écarter ces prétentions, tiré de ce qu'elle n'a pas mis en oeuvre la procédure prévue au 4 de l'article 15 du cahier des clauses administratives générales ; qu'il n'appartient pas à la cour d'examiner d'office si cette fin de non-recevoir a été soulevée à bon droit ;

Sur le point de départ du délai faisant courir le droit à l'actualisation des prix :

16. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 23 août 2001, pris pour l'application de l'article 17 du code des marchés publics : " Lorsqu'un marché est conclu à prix ferme pour des fournitures ou services autres que courants ou pour des travaux, il doit prévoir : - que ce prix sera actualisé si un délai supérieur à trois mois s'écoule entre la date d'établissement du prix figurant dans le marché et la date d'effet de l'acte portant commencement d'exécution des prestations ; / - que l'actualisation se fera aux conditions économiques correspondant à une date antérieure de trois mois à la date d'effet de l'acte portant commencement d'exécution des prestations ; / - les modalités de cette actualisation.(...) / Le prix ainsi actualisé reste ferme pendant toute la période d'exécution des prestations et constitue le prix de règlement (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il y a lieu de procéder à l'actualisation du prix si un délai supérieur à trois mois s'écoule entre la date d'établissement du prix figurant dans le marché et la date d'effet de l'acte portant commencement d'exécution des prestations, soit la notification du marché, si celle-ci est la date retenue pour le commencement de l'exécution des prestations, ou tout autre date convenue par les parties pour ce commencement ;

17. Considérant qu'en application de ces dispositions, l'article 3.3.4 du cahier des clauses administratives particulières du marché prévoit l'application d'un coefficient d'actualisation des prix fermes, lorsque le mois du " début d'exécution " des travaux est postérieur de plus de trois mois au mois zéro, défini comme celui précédant la date de remise des offres, soit, en l'espèce, le mois de mai 2003 ; que la société Guintoli soutient que le " début d'exécution " au sens de ces stipulations doit être fixé à la date de commencement de l'exécution des travaux et non à la date du début de la phase de préparation ;

18. Considérant, toutefois, que la phase de préparation fait bien partie des " prestations " prévues par le contrat au sens de l'article 1er du décret du 23 août 2001 ; qu'il résulte de l'instruction que par ordre de service du 22 juillet 2004, le maître d'oeuvre a invité la requérante à " démarrer dès réception du présent ordre de service, la période de préparation prévue à l'article 3.1 de l'acte d'engagement " ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a retenu, pour le calcul du coefficient d'actualisation, le mois de juillet 2004 comme mois de " début d'exécution " des prestations prévues par le contrat ;

Sur les intérêts :

19. Considérant, en premier lieu, que la société requérante ne peut utilement reprocher aux premiers juges de ne pas avoir précisé qu'en application de l'article 3.2.7 du cahier des clauses administratives particulières, le taux des intérêts moratoires est celui de l'intérêt au taux légal majoré de quatre points, dès lors qu'en jugeant que les intérêts moratoires étaient dus, le tribunal s'est nécessairement référés aux intérêts au taux prévu par le contrat ;

20. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 5 du décret n° 2002-232 du 21 février 2002 modifié : " " III. - Le défaut d'ordonnancement ou de mandatement de tout ou partie des intérêts moratoires dans un délai de 30 jours à compter du jour suivant la date de mise en paiement du principal entraîne le versement d'intérêts moratoires complémentaires " ; qu'à défaut de mise en paiement du principal des sommes qu'elle réclame, la demande de la société tendant à ce que lui soit versés des intérêts moratoires complémentaires est prématurée ;

21. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : " Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière. " ; qu'en application de ces dispositions, c'est à bon droit que les premiers juges n'ont ordonné la capitalisation des intérêts qu'à compter du 18 mai 2009, date d'introduction de la requête devant le tribunal administratif ;

22. Considérant, enfin, que si la société fait valoir qu'elle a droit aux intérêts moratoires du fait du retard de huit mois pris par l'administration pour libérer la retenue de garantie, l'administration soutient sans être contredite que ces intérêts lui ont été versés ;

Sur la demande de dommages et intérêts en application de l'article 1153 du code civil :

23. Considérant que si la requérante se prévaut du dernier alinéa de l'article 1153 du code civil, aux termes duquel " Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ", elle n'établit ni la mauvaise foi de l'administration, ni l'existence d'un préjudice indépendant du retard mis par l'Etat à payer le principal, lequel retard est déjà réparé par l'allocation d'intérêts moratoires ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

24. Considérant qu'il n'y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement tant par la société Guintoli que par l'Etat ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme due par l'Etat à la société Guintoli au titre des travaux supplémentaires relatifs au béton et à l'armature en acier de la structure est portée de 202 975,09 à 206 520,21 euros HT. Cette somme est affectée du coefficient d'actualisation prévu aux articles 3-3.1 et suivants du cahier des clauses administratives particulières.

Article 2 : L'Etat versera à la société Guintoli les intérêts moratoires des sommes de 17 690 euros HT, 1 290 euros HT et 7 835 euros HT qui lui ont été versées au titre des travaux supplémentaires demandés en cours d'exécution du marché, à compter du 1er juin 2006 et jusqu'au 6 janvier 2007, date de paiement du principal.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 10 novembre 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Les conclusions d'appel incident du ministre, ainsi que celles qu'il a présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Guintoli est rejeté.

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N° 12BX00056


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX00056
Date de la décision : 14/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CHENEAU-SINGER.

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-10-14;12bx00056 ?
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