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16/10/2014 | FRANCE | N°14BX00111

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 16 octobre 2014, 14BX00111


Vu la requête, enregistrée le 8 janvier 2014 présentée pour M. A...B...demeurant..., par Me C... ;

M.B..., de nationalité comorienne, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1300458,1300988 du 24 octobre 2013 du tribunal administratif de Limoges en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2013 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel

il serait renvoyé à défaut de satisfaire à cette obligation ;

2°) d'annuler l...

Vu la requête, enregistrée le 8 janvier 2014 présentée pour M. A...B...demeurant..., par Me C... ;

M.B..., de nationalité comorienne, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1300458,1300988 du 24 octobre 2013 du tribunal administratif de Limoges en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2013 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé à défaut de satisfaire à cette obligation ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 7 juin 2013 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé au besoin d'office ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous la même astreinte ;

5°) à défaut, dans l'attente de la réponse aux questions préjudicielles posées à la Cour de justice de l'Union européenne par le Tribunal administratif de Melun, de surseoir à statuer ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son avocat la somme de 2 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ainsi qu'une somme de 13 euros en application de l'article 43 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2014 :

- le rapport de M. Philippe Delvolvé, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

1. Considérant que M.B..., de nationalité comorienne, né en décembre 1964 est entré en France le 12 mars 2003 muni d'un passeport comorien revêtu d'un visa Schengen de trente jours ; que M. B...s'est maintenu irrégulièrement en France après l'expiration de son visa ; qu'il a sollicité le 15 mars 2012, par l'intermédiaire de son avocat, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de la Haute-Vienne a refusé de faire droit à sa demande par une décision implicite née le 3 décembre 2012 du silence gardé à cette demande puis par un arrêté du 7 juin 2013 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi ; que M. B...a contesté devant le tribunal administratif de Limoges la décision implicite de rejet de sa demande du 15 mars 2012 et l'arrêté du 7 juin 2013 du préfet de la Haute-Vienne ; qu'il fait appel du jugement du 24 octobre 2013 en tant que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2013 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

3. Considérant que M. B...soutient que la décision contestée est insuffisamment motivée s'agissant de l'appréciation de sa situation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, la décision contestée relève, d'une part, que M. B...est célibataire, sans enfant et qu'il ne fait pas état d'attaches familiales en France, d'autre part, qu'il a fourni un contrat de travail conclu en 2007 avec une société G2 E " Ile de France arrosage " et des bulletins de salaire établis au nom d'un dénommé MusabhB..., enfin qu'il ne justifie d'aucune considération humanitaire ni d'aucune circonstance exceptionnelle et qu'il est dans l'impossibilité d'apporter la preuve de ses années de présence en France ; que cette décision contient ainsi les considérations de fait sur lesquelles s'est fondé le préfet au regard en particulier de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prendre la décision contestée ; que cette motivation révèle que le préfet s'est livré à un examen de la situation personnelle du requérant ;

4. Considérant que M. B...qui a sollicité un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile soutient résider habituellement en France depuis le 12 mars 2003, soit depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que, toutefois, afin d'attester sa présence en France, il ne produit au titre de l'année 2004 qu'une ordonnance d'un chirurgien-dentiste ne comportant pas même de cachet de la pharmacie qui aurait délivré les médicaments prescrits, pour les années 2005, 2006 et 2007, outre une autre ordonnance du même chirurgien-dentiste non exécutée, des bulletins de salaires, un certificat de travail et un contrat de travail, toutes pièces établies au nom de M. D... B... ; que le requérant ne justifie pas qu'il répond également à ce prénom ; que de telles pièces ne peuvent donc être considérées comme le concernant ; qu'aucune pièce n'est produite en ce qui concerne l'année 2008 et que seul un bulletin d'adhésion à une organisation syndicale dont les mentions sont complétées à la main est fournie au titre de l'année 2009 ; que les attestations de proches ou de compatriotes qui sont versées au dossier sont peu circonstanciées et ne sont pas de nature à établir le caractère habituel de la présence de l'intéressé en France au cours de la période en cause, et donc pendant au moins dix ans ; que par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en application des dispositions précitées de l'article L. 313-14, le préfet de la Haute-Vienne était tenu de saisir pour avis la commission du titre de séjour et, par suite, que la décision rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que M. B...se prévaut de l'ancienneté de sa présence sur le territoire national, de l'intensité des liens personnels qu'il y a créés, de sa bonne insertion au sein de la société française en particulier par les emplois qu'il a occupés ; que, cependant, d'une part, les pièces que le requérant produit à l'appui de ses allégations sont insuffisantes pour établir sa présence continue en France depuis l'année 2003 ; que, d'autre part, M. B...qui est célibataire et sans enfant n'établit pas être dans l'impossibilité de reconstituer sa vie familiale dans son pays d'origine alors qu'il n'est pas sans attaches familiales aux Comores où il a vécu la majeure partie de sa vie ; qu'enfin le dossier ne fait pas ressortir d'intégration particulière en France ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le refus de titre de séjour attaqué n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant qu'eu égard à ce qui vient d'être dit, le moyen tiré de ce que le refus de séjour contesté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, qui n'est pas assorti d'arguments différents de ceux invoqués à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits et de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant refus de séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale doit être écarté ;

9. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

10. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ; qu'ainsi qu'il a été dit, M. B...a demandé le 15 mars 2012 un titre de séjour ; que le moyen tiré de ce que le préfet aurait dû solliciter ses observations sur la mesure accessoire, mais non obligatoire, au refus de séjour qu'est l'obligation de quitter le territoire français, qu'il s'apprêtait à prendre, et qu'à défaut le préfet a méconnu le principe général des droits de la défense, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne, ne peut pour les motifs ci-dessus rappelés, qu'être écarté ;

11. Considérant que M. B...déclare reprendre à l'encontre de la décision d'obligation de quitter le territoire les mêmes moyens que ceux invoqués à l'encontre du refus de séjour et tenant à la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ; que, pour les motifs exposés aux points 6 et 7 ci-dessus, ces moyens doivent être écartés ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

12. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire n'étant pas entachée d'illégalité, le requérant n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi ;

13. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté pour les motifs exposés précédemment aux points 9 et 10 ;

14. Considérant que la décision contestée vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et relève que M. B...n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision en litige doit être écarté ;

15. Considérant que la circonstance que M. B... a quitté son pays natal depuis plus de dix ans et qu'il s'y trouvera isolé n'est pas de nature à établir l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision fixant les Comores comme pays de renvoi ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande ;

Sur les autres conclusions :

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de M. B...aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

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N° 14BX00111


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX00111
Date de la décision : 16/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: M. AUCUN
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SELARL PREGUIMBEAU - GREZE : AEGIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-10-16;14bx00111 ?
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