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11/12/2014 | FRANCE | N°13BX02066

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 11 décembre 2014, 13BX02066


Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2013, présentée pour la SOCPE de Breuillebault, dont le siège est Bâtiment A 11, 12 rue de Caulet Zone Aéroparc Saint-Martin à Toulouse (31300), par Cabinet CGR Legal ;

La SOCPE de Breuillebault demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200555 du 16 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 septembre 2011 par laquelle le préfet de la région Centre lui a refusé le permis de construire deux éoliennes et un poste de livraison sur

le territoire de la commune de Fontenay, ensemble le rejet de son recours gr...

Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2013, présentée pour la SOCPE de Breuillebault, dont le siège est Bâtiment A 11, 12 rue de Caulet Zone Aéroparc Saint-Martin à Toulouse (31300), par Cabinet CGR Legal ;

La SOCPE de Breuillebault demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200555 du 16 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 septembre 2011 par laquelle le préfet de la région Centre lui a refusé le permis de construire deux éoliennes et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Fontenay, ensemble le rejet de son recours gracieux ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la région Centre de lui délivrer le permis de construire dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut de procéder au réexamen de sa demande de permis de construire ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2014 :

- le rapport de M. Olivier Gosselin, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;

- et les observations de Me Cambus, avocat de la SOCPE de Breuillebault ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 3 décembre 2014, présentée pour la SOCPE de Breuillebault par Me Cambus ;

1. Considérant que, par un arrêté du 28 septembre 2011, le préfet de la région Centre a refusé de délivrer à la société d'exploitation du parc éolien (SOCPE) de Breuillebault un permis de construire deux éoliennes et un poste de livraison sur des terrains situés aux lieudits " Pièces de Breuillebault " et " Les Après ", sur le territoire de la commune de Fontenay ; que le recours gracieux de la SOCPE de Breuillebault a été rejeté le 7 février 2012 par le préfet de la région Centre ; que la société SOCPE de Breuillebault relève appel du jugement n° 1200555 du 16 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions ;

2. Considérant que la SOCPE de Breuillebault soutient que le préfet de la région Centre n'a pas exercé sa compétence en se bornant à reprendre les avis négatifs de l'architecte des bâtiments de France et du directeur régional des affaires culturelles ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le préfet a consulté l'ensemble des administrations et des collectivités territoriales concernées et que, outre ces avis, le directeur régional de l'environnement a également donné un avis défavorable en soulignant que le parc éolien était envisagé dans une zone où plusieurs parcs existaient déjà, ce qui créait une saturation du paysage, et qu'il serait visible du château de Bouges et en co-visibilité avec l'église de Vatan, tandis que le chef du service départemental de l'architecture motivait son avis défavorable par l'atteinte portée à l'intérêt des lieux environnants et l'insuffisance de l'étude des co-visibilités entre parcs éoliens existants ou à construire ; qu'enfin, la commission départementale de la nature, des paysages et des sites a également donné un avis défavorable au projet ; que la seule circonstance que le préfet ait repris la teneur de ces avis n'est pas de nature à démontrer qu'il n'aurait pas apprécié l'ensemble des caractéristiques de la demande de la société requérante et qu'il se serait estimé lié par les avis pour refuser le permis de construire ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ; que pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel au sens de cet article, il appartient au juge administratif d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site ;

4. Considérant que le projet en litige prévoit l'installation de deux éoliennes dans un parc de cinq aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Fontenay ; que les éoliennes seront installées sur des terrains agricoles de la champagne berrichonne formant une vaste zone de plaine dépourvue de boisements, dont l'altitude varie entre cent cinquante et cent soixante- dix mètres ; qu'alentour le paysage environnant, également dépourvu de boisements, présente des reliefs particulièrement peu marqués, en légère descente vers l'ouest, le village de Bouges-le-Château étant à cent trente mètres d'altitude, tandis que le Sud-Est de la zone s'élève à cent quatre vingt mètres en se dirigeant vers Ménétréols-sous-Vatan ; que si la SOCPE de Breuillebault soutient que le paysage environnant ne présente aucun caractère ou intérêt particuliers, il ressort des pièces du dossier que, même s'il s'agit d'une zone de cultures céréalières caractéristique de la " Champagne berrichonne " traversée par quelques lignes électriques de desserte locale et par l'autoroute A20, non visible à l'Est de la zone considérée, les lieux environnants présentent un paysage champêtre ouvert comportant au sud et à l'ouest des monuments historiques ayant une vue directe sur les éoliennes, et au nord l'église de Vatan, également monument historique, qui depuis l'autoroute A20, est en co-visibilité avec le parc éolien ; que ce paysage, même s'il ne fait, en tant que tel, l'objet d'aucune protection particulière, se situe dans un secteur rendu sensible par la présence de ces monuments protégés au titre des monuments historiques dans un rayon de 5 kilomètres, notamment le château de Bouges-le-Château et les églises de Vatan et de Fontenay, qui ne peuvent être regardées seulement comme des monuments d'intérêt local ; que les lieux environnants présentaient ainsi un intérêt particulier justifiant l'application de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

5. Considérant qu'au soutien de son projet, la SOCPE de Breuillebault fait valoir qu'il serait implanté dans une zone favorable à l'éolien et qu'il ne porte pas atteinte à la perspective de l'allée cavalière en bordure du château de Bouges, " seule classée monument historique " ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'ensemble de ce château du XVIIIème siècle, propriété de l'Etat, et de ses abords, y compris les jardins qui ont reçu le label " Jardin remarquable ", est classé monument historique et ouvert à la visite ; que la zone comporte plusieurs parcs éoliens dans un rayon rapproché de dix kilomètres et que la perception de éoliennes est renforcée par le caractère horizontal et dégagé de la zone qui permet des vues lointaines et larges, les éoliennes étant visibles à quinze kilomètres ; que les éoliennes projetées, dont le mât s'élève à quatre-vingt dix mètres, auront une hauteur totale de cent quarante mètres en bout de pale ; que le parc éolien envisagé sera visible depuis le château de Bouges et de ses jardins au Sud ; que notamment la perspective de l'allée plantée et l'axe du RD2 seront affectés par la présence supplémentaires d'une éolienne autorisée par ce permis de construire achevant, avec celles autorisées par l'autre permis, de fermer, sur la droite, la vue depuis ce monument, le projet en litige venant s'ajouter aux parcs éoliens de Liniez, Gamesa et de Vatan, devant lequel il apparaîtra ; qu'il ressort des propres déclarations de la société Alstom, porteuse du projet devant la commission départementale de la nature, des sites et des paysages, que s'il n'y aura pas d'éoliennes dans le prolongement de l'allée, les machines se trouveront de part et d'autre de celle-ci ; que cette commission a donné également un avis défavorable ; qu'ainsi, les avis dont le préfet s'est entouré pour ce qui concerne l'impact paysager du projet soulignent tous le caractère négatif des éoliennes pour le château, même si les deux éoliennes seront peu visibles depuis l'allée cavalière du château dans sa partie Ouest ; qu'enfin, le commissaire-enquêteur, s'il a donné un avis favorable, l'a assorti de recommandations portant notamment sur la nécessité pour tout nouveau projet de s'inscrire dans un projet global limité afin d'éviter une saturation visuelle ; qu'une telle saturation, au demeurant soulignée également par le ministre dans ses observations en défense, ressort particulièrement de l'ensemble des photomontages et cartes figurant dans l'étude d'impact, qui font ressortir la prégnance des parcs éoliens dans les vastes horizons environnants ;

6. Considérant que si la SOCPE de Breuillebault soutient qu'elle envisage des mesures compensatoires, ces mesures ne sont pas détaillées dans son projet et s'agissant des plantations d'arbres à feuilles caduques qu'elle annonce sans toutefois les évoquer dans le dossier d'étude d'impact, ne sont pas de nature à diminuer de façon permanente la perception des éoliennes depuis le château de Bouges ;

7. Considérant, dans ces conditions, qu'en estimant que le projet est de nature, par sa situation et ses dimensions, à porter atteinte à l'intérêt des lieux avoisinants ainsi qu'aux perspectives monumentales, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCPE de Breuillebault n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par la SOCPE de Breuillebault, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la région Centre de lui délivrer, sous astreinte, un permis de construire ne peuvent, en tout état de cause, être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la SOCPE de Breuillebault au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCPE de Breuillebault est rejetée.

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No 13BX02066


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13BX02066
Date de la décision : 11/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-01-05 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation nationale. Diverses dispositions législatives ou réglementaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Olivier GOSSELIN
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : CABINET CGR LEGAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-12-11;13bx02066 ?
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