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15/12/2014 | FRANCE | N°12BX02503

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 15 décembre 2014, 12BX02503


Vu la requête, enregistrée le 17 septembre 2012 sous forme de télécopie et régularisée le 24 septembre 2012, présentée pour l'Eurl B...Assistance, dont le siège est rue Martin Hoarau ZA à Le Port (97420), et la société B...Transport Marchandise (ATM), dont le siège est également rue Martin Hoarau à Le Port (97420), représentée par son gérant en exercice, par Me A... ;

L'Eurl B...Assistance et la société B...Transport Marchandise (ATM) demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0900848 du 24 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Saint-Deni

s de la Réunion a rejeté leur demande tendant, d'une part, à ce que soit ordonné a...

Vu la requête, enregistrée le 17 septembre 2012 sous forme de télécopie et régularisée le 24 septembre 2012, présentée pour l'Eurl B...Assistance, dont le siège est rue Martin Hoarau ZA à Le Port (97420), et la société B...Transport Marchandise (ATM), dont le siège est également rue Martin Hoarau à Le Port (97420), représentée par son gérant en exercice, par Me A... ;

L'Eurl B...Assistance et la société B...Transport Marchandise (ATM) demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0900848 du 24 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté leur demande tendant, d'une part, à ce que soit ordonné au parquet de Saint-Denis la communication de la procédure pénale, d'autre part, à la décharge, au moins partielle, des amendes fiscales qui leur ont été infligées au titre de l'année 2004 sur le fondement de l'article 1756 quater du code général des impôts et subsidiairement d'ordonner un partage des sommes à payer au prorata des fautes commises ;

2°) de prononcer la décharge des amendes en cause pour des montants respectifs de 301 813 euros pour la société B...Transport Marchandise (ATM) et 739 688 euros pour l'Eurl B...Assistance, subsidiairement de prononcer la décharge partielle des amendes pour sept matériels livrés, encore plus subsidiairement, d'ordonner un partage de l'amende au prorata des fautes commises par les requérantes ;

3°) d'ordonner au parquet de Saint-Denis de communiquer les pièces de la procédure pénale concernant M. C...B... ;

4°) de leur accorder le sursis de paiement ;

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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 novembre 2014 :

- le rapport de M. Bertrand Riou, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

1. Considérant qu'à la suite de vérifications de comptabilité, l'administration a infligé à la société B...Transport Marchandise (ATM) et à l'Eurl B...Assistance des amendes sur le fondement de l'article 1756 quater du code général des impôts ; que, par un jugement du 24 mai 2012, le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté la demande de ces sociétés tendant à la décharge de ces amendes ; que les deux sociétés ont relevé appel de ce jugement par une même requête ;

2. Considérant que le tribunal administratif de Saint-Denis a été saisi d'une demande commune émanant de l'Eurl B...Assistance tendant à la décharge de l'amende fiscale qui lui a été infligée pour un montant de 739 688 euros et de la société B...Transport Marchandise (ATM) tendant à la décharge de l'amende mise à sa charge pour un montant de 301 813 euros ; que, quels que fussent en l'espèce les liens de fait et de droit entre ces entreprises et ces amendes, le tribunal devait statuer par deux décisions séparées à l'égard des deux contribuables distincts que sont, d'une part, l'Eurl B...Assistance, d'autre part, la société B...Transport Marchandise (ATM) ; que c'est en méconnaissance de cette règle d'ordre public que le tribunal administratif a statué par un seul jugement sans inviter les sociétés à présenter des demandes distinctes ; que, dès lors, son jugement doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu, pour la cour, dans les circonstances de l'affaire, de statuer par voie d'évocation sur les conclusions présentées devant le tribunal administratif par l'Eurl B...Assistance et la société B...Transport Marchandise (ATM) ; que les deux sociétés ont produit devant la cour le 24 juin 2014 des requêtes distinctes ; qu'il sera statué par le présent arrêt sur les conclusions de la société B...Transport Marchandise (ATM), les conclusions de l'Eurl B...Assistance donnant lieu à un arrêt distinct après que les mémoires et pièces concernant cette société auront été enregistrés par le greffe de la cour sous un autre numéro ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1756 quater du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition 2004 en litige : " Lorsqu'il est établi qu'une personne a fourni volontairement de fausses informations ou n'a pas respecté les engagements qu'elle avait pris envers l'administration permettant d'obtenir pour autrui les avantages fiscaux prévus par les article 199 undecies A, 199 undecies B (...) elle est redevable d'une amende égale au montant de l'avantage fiscal indûment obtenu, sans préjudice des sanctions de droit commun.(...) " ; qu'aux termes de l'article 199 undecies B du même code dans sa rédaction applicable à l'espèce : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...), dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. (...) La réduction d'impôt est de 50 % du montant hors taxes des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une subvention publique. (...) Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 ou un groupement mentionné aux articles 239 quater ou 239 quater C, dont les parts sont détenues directement, ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement. La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) " ;

5. Considérant que la proposition de rectification du 25 septembre 2006 adressée à la société B...Transport Marchandise (ATM) indique en détail les motifs pour lesquels le service estime qu'elle s'est livrée sciemment à des opérations fictives ou surfacturées la rendant passible de l'amende prévue par l'article 1756 quater précité du code général des impôts ; que le fait que cette proposition de rectification mentionne que les dispositions de l'article 1740 du code général des impôts ont remplacé celles de l'article 1756 quater à compter du 1er janvier 2006 est sans aucune incidence sur la régularité de cette proposition, qui était, conformément aux exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, suffisamment motivée pour permettre à la société de présenter utilement ses observations ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société B...Transport Marchandise (ATM) a souscrit des contrats prévoyant, dans le cadre du régime défini à l'article 199 undecies B précité du code général des impôts, que la société SGI achètera des matériels de son choix qu'elle lui donnera en location pour une durée de cinq ans, moyennant le versement d'un dépôt de garantie représentant 70% du prix facturé par le fournisseur et d'un loyer dont chaque annuité est égale au cinquième du dépôt de garantie majoré de frais de gestion ; que sept contrats ont ainsi été passés, qui prévoyaient la livraison en 2004 de quatre grues, des chariots élévateurs, un porteur " Scania " et un matériel " Simplex 10T " ; que le vérificateur a constaté lors des opérations de vérification de la comptabilité de la société B...Transport Marchandise (ATM), qui se sont déroulées du 21 juillet au 21 septembre 2006, que six de ces contrats n'avaient fait l'objet d'aucun enregistrement comptable et qu'aucun des matériels faisant l'objet de ces contrats n'avait été livré au 31 décembre 2004 ; que les chariots élévateurs et trois des quatre grues n'avaient toujours pas été livrés lors des opérations de vérification ; que le matériel " Simplex T10 " et la grue ayant fait l'objet du contrat n° 241283 n'avaient donné lieu à aucun versement de la part de la société B...Transport Marchandise (ATM) ; que, de plus, le matériel " Simplex T10 " avait fait l'objet d'un autre contrat également signé avec la société SGI et comptabilisé au titre de l'exercice clos en 2006 ; que, si la société requérante se prévaut d'une expertise ordonnée le 22 août 2007 par le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis et du jugement de cette juridiction du 7 novembre 2008, confirmé par un arrêt de la cour d'appel du 24 mai 2010, ces éléments ne sont pas de nature à établir, comme l'ont relevé les premiers juges, la réalité des locations durant l'année d'imposition ainsi que le caractère non surfacturé de certaines de celles-ci ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que l'administration a estimé que les six contrats dont il s'agit correspondaient soit à des opérations fictives, soit à des opérations surfacturées afférentes à des biens non livrés au 31 décembre 2004 ; que c'est également à juste titre que l'administration a estimé que la société B...Transport Marchandise (ATM), signataire des contrats et destinataire des matériels mentionnés dans ceux-ci, ne pouvait ignorer cette situation et les avantages fiscaux qui en résultaient, en vertu de l'article 199 undecies B précité, pour les entreprises devant fournir le matériel ;

7. Considérant que la circonstance que le gérant de la société B...Transport Marchandise (ATM) n'a souscrit aucun engagement à l'égard de l'administration fiscale, que la société n'est pas importatrice des matériels loués ou que sa situation de locataire la situerait en " fin de course " à une date où l'opération fictive était déjà réalisée ou encore que les contrats de location en cause relèvent du droit privé sont sans influence sur l'application de l'amende prévue par l'article 1756 quater du code général des impôts, dès lors que, comme il a été dit, les conditions de cette application étaient réunies, sans que la requérante puisse par ailleurs utilement soutenir, sans apporter le moindre élément, que l'administration fiscale aurait fait preuve à son égard d'un acharnement injustifié ;

8. Considérant que l'appelante ne saurait utilement se prévaloir, pour prétendre qu'elle a fait l'objet d'une double imposition, de la pénalité qui aurait été infligée, au titre des dispositions précitées de l'article 1756 quater du code général des impôts, à la société SGI et à l'entreprise Distrimat, lesquelles sont des contribuables distincts ; que si la société allègue que l'administration aurait irrégulièrement adressé une proposition de rectification aux seules fins d'échapper à la prescription ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;

9. Considérant que les dispositions précitées de l'article 1756 quater du code général des impôts prévoient une amende dont le montant varie en fonction de l'avantage fiscal indûment obtenu ; que le juge de l'impôt, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, décide, dans chaque cas, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir l'amende, soit d'en prononcer la décharge ; que les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne l'obligent pas à procéder différemment ; qu'ainsi, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article 1756 quater du code général des impôts fondant la pénalité à laquelle elle a été assujettie devraient être écartées au motif que, faute de permettre au juge de l'impôt d'en moduler le taux, elles seraient incompatibles avec les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu, dès lors que la cour est suffisamment informée par les éléments figurant au dossier, d'ordonner la communication des pièces de la procédure pénale concernant M.B..., que la société ATM n'est pas fondée à demander la décharge de l'amende en litige ;

11. Considérant que la cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions en décharge présentées par la société B...Transport Marchandise (ATM), les conclusions de celle-ci à fin de sursis de paiement sont, en tout état de cause, devenues sans objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société B...Transport Marchandise (ATM) la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion du 24 mai 2012 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la société B...Transport Marchandise (ATM) à fin de décharge de l'amende à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2004 sur le fondement de l'article 1756 quater sont rejetées, de même que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis de paiement présentées par la société B...Transport Marchandise (ATM).

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N° 12BX02503


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX02503
Date de la décision : 15/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Bertrand RIOU
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SCP BELOT CREGUT HAMEROUX ; SCP BELOT CREGUT HAMEROUX ; SCP BELOT CREGUT HAMEROUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-12-15;12bx02503 ?
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