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15/12/2014 | FRANCE | N°14BX01333

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 15 décembre 2014, 14BX01333


Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2014, présentée pour M. B...C..., demeurant..., par Me D... ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401688 du 8 avril 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 3 avril 2014 du préfet de la Haute-Garonne le plaçant en rétention administrative et rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté du 20 août 2

013 du préfet du Val-de-Marne ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décision...

Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2014, présentée pour M. B...C..., demeurant..., par Me D... ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401688 du 8 avril 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 3 avril 2014 du préfet de la Haute-Garonne le plaçant en rétention administrative et rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté du 20 août 2013 du préfet du Val-de-Marne ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ainsi que le refus de séjour contenu dans l'arrêté du 20 août 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, outre les dépens de l'instance, la somme de 1 000 euros en application des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 31 décembre 2002 modifié complétant l'arrêté du 27 décembre 1983 fixant le régime des bourses accordées aux étrangers boursiers du Gouvernement français ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

1. Considérant que M.C..., ressortissant indien, a déposé le 25 septembre 2013 au greffe du tribunal administratif de Melun une requête dirigée contre l'arrêté du 20 août 2013 du préfet du Val de Marne, notifié le 26 août suivant, refusant de renouveler son titre de séjour portant la mention "étudiant" et l'obligeant à quitter le territoire français ; qu'il a été placé en rétention administrative au centre de Cornebarrieu par une décision du 3 avril 2014 du préfet de la Haute-Garonne ; qu'il fait appel du jugement du 8 avril 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse, après avoir prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions dirigées contre le placement en rétention, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement prise à son encontre par le préfet du Val de Marne ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que la circonstance qu'à la date du 8 avril 2014, à laquelle le premier juge a statué, le placement en rétention administrative de M. C...avait pris fin n'était pas de nature à priver d'objet les conclusions dirigées contre cette mesure ; qu'ainsi, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu sur cette demande ; qu'il y a lieu d'annuler dans cette mesure le jugement attaqué, de statuer par voie d'évocation sur les conclusions de la demande de première instance dirigées contre la décision de placement en rétention et par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions de la requête ;

Sur les conclusions à fin d'annulation du refus de séjour :

3. Considérant qu'en application du principe fixé au premier alinéa de l'article R. 776-16 du code de justice administrative, l'article R.776-17 du même code prévoit la transmission du dossier au tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve le lieu de rétention lorsque l'étranger est placé en rétention postérieurement à l'introduction de sa requête contre la décision portant obligation de quitter le territoire et que le tribunal saisi n'est pas celui dans le ressort duquel se trouve le lieu de rétention ou d'assignation ; que toutefois, dans cette hypothèse, l'article R.776-17 dispose que : " le tribunal initialement saisi demeure compétent pour connaître des conclusions dirigées contre la décision relative au séjour " ; que, conformément à ces dispositions, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse n'a pas statué sur les conclusions dirigées contre le refus de séjour opposé par le préfet du Val de Marne ; que si le requérant persiste en appel à demander l'annulation de cette décision, la compétence du tribunal administratif de Toulouse ne s'étendait pas aux conclusions dirigées contre cette décision dès lors que le placement en rétention était postérieur à l'introduction de la requête de M. C...devant le tribunal administratif de Melun ; qu'au surplus et en tout état de cause, en vertu du III de l'article L.512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le magistrat désigné était incompétent pour statuer sur les conclusions dirigées contre le refus de séjour ; que les conclusions d'appel présentées par M. C...ne sont, dans cette mesure, pas recevables ;

Sur les conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité du refus de séjour opposé par le préfet du Val de Marne :

4. Considérant que cette décision a été signée par M.A..., qui disposait, en sa qualité de secrétaire général de la préfecture, d'une délégation consentie par un arrêté du 4 février 2013 régulièrement publié ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de ladite décision manque en fait ;

5. Considérant que, pour refuser à M. C...le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant, le préfet s'est fondé, d'une part, sur la circonstance que l'attestation d'admission au programme "Customised On-Project Learning Program" de l'European Training et Education Center (ETEC) pour la période du 4 mars 2013 au 3 mars 2014 correspondait à une formation dispensée par une société de conseil non habilitée à délivrer un diplôme, d'autre part, sur l'insuffisance des ressources de l'intéressé ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L.313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I- La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant". (...) II- (...) Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application des dispositions du présent article, en particulier en ce qui concerne les ressources exigées, les conditions d'inscription dans un établissement d'enseignement (...) " ; qu'en vertu de l'article R.313-7 du même code pris pour l'application de ces dispositions, l'étranger doit présenter : " 1° La justification qu'il dispose de moyens d'existence, correspondant au moins au montant de l'allocation d'entretien mensuelle de base versée, au titre de l'année universitaire écoulée, aux boursiers du Gouvernement français ; 2° Un certificat d'immatriculation, d'inscription ou de préinscription dans un établissement public ou privé d'enseignement ou de formation initiale, ou une attestation d'inscription ou de préinscription dans un organisme de formation professionnelle au sens du titre II du livre IX du code du travail, ou bien une attestation justifiant qu'il est bénéficiaire d'un programme de coopération de l'Union européenne dans les domaines de l'éducation, de la formation et de la jeunesse. " ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 31 décembre 2002 modifiant et complétant l'arrêté du 27 décembre 1983 fixant le régime des bourses accordées aux étrangers boursiers du Gouvernement français : " Le montant de l'allocation d'entretien prévu à l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 1983 susvisé est fixé à 615 euros par mois " ;

7. Considérant que si M.C..., qui ne conteste pas que l'attestation d'admission au programme de l'ETEC correspondait à une formation dispensée par une société de conseil non habilitée à délivrer un diplôme, se prévaut, pour justifier d'une inscription dans un établissement entrant dans le champ d'application du 2° de l'article R.313-7 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une simple fiche d'inscription à l'Institut Supérieur Privé Européen de Management (ISPEM) en vue de l'obtention d'un master de management, ce document, d'ailleurs non daté, ne vaut pas inscription ou préinscription dans cet établissement ;

8. Considérant qu'en admettant que le préfet, qui n'a pas tenu compte de la somme de 180 000 roupies versée à M. C...par ses parents, aurait inexactement apprécié ses moyens d'existence, il résulte de l'instruction qu'il aurait pris la même décision en se fondant sur le seul motif tiré du défaut de justification d'une inscription dans un établissement entrant dans le champ d'application du 2° de l'article R.313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant que, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité du refus de séjour doit être écarté ;

En ce qui concerne l'atteinte à la vie privée et familiale :

10. Considérant que si M. C...réside en France depuis le 11 décembre 2008 et y a noué des relations, il n'établit ni même n'allègue être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans et où résident à tout le moins son épouse et sa fille ; que, dans ces conditions, la mesure d'éloignement n'a pas porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement prise à son encontre par le préfet du Val de Marne ;

Sur les conclusions dirigées contre le placement en rétention :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L.551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L.561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire (...) n'a pas été accordé " ; que selon l'article L.561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L.551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L.511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. " ;

13. Considérant que, le 3 avril 2014, lors de son audition par l'officier de police judiciaire, M.C..., qui avait fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 20 août 2013, a déclaré "à Paris, j'habitais avec un ami (...) à Toulouse, je suis domicilié... ; que dans les circonstances de l'espèce, le préfet a pu, sans erreur de droit ni erreur d'appréciation, estimer que M.C..., alors même qu'il disposait d'un passeport en cours de validité, ne présentait pas des garanties de représentation suffisantes propres à prévenir le risque de fuite et le placer en rétention administrative :

14. Considérant qu'il en résulte que la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à l'annulation de la décision du 3 avril 2014 ordonnant son placement en rétention doit être rejetée ;

Sur les dépens et les frais de procès non compris dans les dépens :

15. Considérant que M. C...n'ayant pas demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle, les conclusions de la requête tendant à ce que l'Etat verse à son avocat la somme de 1 000 euros en application du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, en tout état de cause être accueillies ; qu'aucun dépens n'ayant été exposé au cours de l'instance, les conclusions présentées à ce titre ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : L'article 2 du jugement du 8 avril 2014 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : La demande de M. C...tendant à l'annulation de la décision du 3 avril 2014 ordonnant son placement en rétention et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.

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No 14BX01333


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX01333
Date de la décision : 15/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Thérèse LACAU
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : AMALRIC-ZERMATI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-12-15;14bx01333 ?
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