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22/12/2014 | FRANCE | N°13BX01676

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 22 décembre 2014, 13BX01676


Vu la requête enregistrée le 19 juin 2013, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me D...;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200163 du 11 avril 2013 du tribunal administratif de Fort-de-France qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur du secrétariat général du siège du groupe " la Poste " du 21 décembre 2011 l'excluant de ses fonctions pour une durée de dix-huit mois dont six mois avec sursis ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre à La Poste de le réintégrer dans son serv

ice ;

4°) de mettre à la charge de la Poste les frais d'avocats et d'huissier, ainsi qu'une ...

Vu la requête enregistrée le 19 juin 2013, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me D...;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200163 du 11 avril 2013 du tribunal administratif de Fort-de-France qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur du secrétariat général du siège du groupe " la Poste " du 21 décembre 2011 l'excluant de ses fonctions pour une durée de dix-huit mois dont six mois avec sursis ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre à La Poste de le réintégrer dans son service ;

4°) de mettre à la charge de la Poste les frais d'avocats et d'huissier, ainsi qu'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée ;

Vu le décret n° 82-447 du 28 mai 1982 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2014 :

- le rapport de M. Philippe Delvolvé, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que par une décision du 21 décembre 2011 du directeur du secrétariat général du siège du groupe " La Poste ", M.B..., qui exerce les fonctions de chef d'équipe " courrier colis " à Fort-de-France, a fait l'objet d'une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de ses fonctions pour une durée de dix-huit mois dont six mois avec sursis ; qu'il fait appel du jugement n° 1200163 du 11 avril 2013 du tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que si M. B...soutient que le tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier en relevant que la sanction dont il a fait l'objet n'a pas été prise pour des motifs liés à son action syndicale, et n'a pas pris en considération certains témoignages ou courriers qu'il avait apportés, un tel moyen, qui a trait au bien-fondé du jugement, n'affecte pas sa régularité ;

3. Considérant que le requérant reproche également aux premiers juges de ne pas avoir usé de leurs pouvoirs d'instruction pour demander la production de certaines pièces de son dossier disciplinaire qu'il estime falsifiées ; que, toutefois, le tribunal administratif, qui a estimé que les faits allégués étaient sa incidence sur la régularité de la procédure suivie, a pu sans entacher son jugement d'irrégularité, ne pas procéder à une mesure d'instruction supplémentaire ;

Au fond :

4. Considérant que M. B...conteste la régularité du dossier soumis au conseil de discipline aux motifs, d'une part, que ses réponses à des " enquêtes administratives " n'y figuraient pas, d'autre part, que le timbre du service et la signature du chef de service, auteur des enquêtes, n'ont été apposés sur certaines fiches d'enquête qu'après qu'il les ait retournées à leur auteur en relevant qu'elles n'étaient " pas conformes aux règles administratives " ; que, selon lui, ces " faux ", réalisés pour les besoins de la procédure disciplinaire, entacheraient cette procédure d'irrégularité ; que pour écarter un tel motif, le tribunal administratif a relevé que ces allégations étaient sans incidence sur la régularité de la procédure qui a été suivie dès lors, d'une part, qu'il n'était pas contesté que, le 19 août 2009, avant la tenue le 16 septembre 2009 du conseil de discipline, l'intéressé a pu consulter son dossier, et dès lors, d'autre part, qu'il ressortait de l'examen du procès-verbal de séance que M. B...a porté les faits qu'il invoque à la connaissance de l'instance disciplinaire et qu'il s'en est expliqué, mettant ainsi le conseil de discipline en mesure d'émettre son avis en toute connaissance de cause ; qu'il y a lieu, par adoption de ces motifs retenus à juste titre par le tribunal administratif, d'écarter ce moyen repris de façon identique devant la cour ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. / Premier groupe : / - l'avertissement ; / - le blâme. / Deuxième groupe : / - la radiation du tableau d'avancement ; / - l'abaissement d'échelon ; / - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; / - le déplacement d'office. / Troisième groupe : / - la rétrogradation ; / - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. / Quatrième groupe : / - la mise à la retraite d'office ; / - la révocation. (...) La radiation du tableau d'avancement peut également être prononcée à titre de sanction complémentaire d'une des sanctions des deuxième et troisième groupes. / L'exclusion temporaire de fonctions, qui est privative de toute rémunération, peut être assortie d'un sursis total ou partiel. Celui-ci ne peut avoir pour effet, dans le cas de l'exclusion temporaire de fonctions du troisième groupe, de ramener la durée de cette exclusion à moins de un mois. (...) " ; qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si celle qui a été retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ; que M. B...soutient que c'est à tort que le tribunal a retenu la gravité des fautes qui lui sont imputées sans relever le lien existant entre ses activités syndicales et la décision contestée ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'au cours de l'année 2008, M. B..., fonctionnaire de la Poste chargé des fonctions de chef d'équipe " courrier-colis " à Fort-de-France, en service de " demi-nuit ", a refusé à plusieurs reprises d'exécuter les instructions de sa hiérarchie et s'est abstenu de répondre à des enquêtes administratives ou des demandes de renseignements que lui adressait sa hiérarchie ; que ce comportement a donné lieu à onze demandes d'explications et observations écrites ainsi qu'à quatorze rapports d'incidents et témoignages ; que M. B...a également pris l'initiative d'un arrêt de travail de l'équipe de " demi-nuit " qu'il était chargé d'encadrer, le 10 décembre 2008 vers 19 heures, et a permis à une personne étrangère au service, présentée comme étant le secrétaire général de la centrale démocratique martiniquaise des travailleurs Poste Martinique (CDMT), de pénétrer sans autorisation dans les locaux de la Poste, nécessitant l'intervention du directeur d'établissement afin d'assurer la continuité du service et la reprise du travail par les agents ; que M. B...s'est montré agressif à de nombreuses occasions tant à l'encontre de ses supérieurs hiérarchiques que de ses homologues et de ses subordonnés ; que le 16 décembre 2008, un agent de l'équipe de M. B... a été victime d'un malaise et a dû faire l'objet de soins médicaux en raison du comportement adopté par celui-ci à son égard ; que cet agent a déposé, le 18 décembre 2008, une plainte à l'encontre du requérant pour harcèlement moral ; que M. B... s'est également abstenu de participer à des réunions d'encadrement en janvier 2008 ; qu'il soutient que ses absences sont justifiées dès lors que le moment où elles devaient se dérouler était incompatible avec sa santé et portait atteinte à son droit au repos dans la mesure où elles devaient se tenir tôt le matin, en dehors de ses heures normales de travail qui se déroulaient notamment en première partie de nuit ; que l'intéressé ne justifie cependant pas que ces réunions, dont la fréquence était faible et auxquelles il était tenu de participer, aurait pu avoir un quelconque effet sur sa santé s'il y avait participé ; que l'ensemble de ces faits, qui sont établis par les pièces du dossier, et dont la réalité n'est pas remise en cause en appel par des témoignages apportés à l'instance, révèlent des manquements graves à des obligations professionnelles, la contestation et la remise en cause systématique de l'autorité hiérarchique et des comportements violents et agressifs dans l'exercice de ses fonctions par M.B... ; qu'ils présentent donc un caractère fautif de nature à justifier une sanction disciplinaire ;

9. Considérant que M. B...soutient que ces fautes doivent être minimisés dès lors que la sanction serait principalement motivée par ses activités syndicales, au regard du climat social existant au sein de La Poste ainsi que des bons résultats de son service en 2008 ; que cependant, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'a eu de cesse de s'opposer à sa hiérarchie systématiquement et de perturber le bon fonctionnement de la plateforme de préparation et de distribution du courrier de Dillon où il était affecté, alors même que son service aurait obtenu de bons résultats en 2008 ; que M. B...ne pouvait ignorer, alors qu'il avait déjà fait l'objet d'une sanction pour un fait similaire, qu'il était interdit, en l'absence d'autorisation, de faire entrer M.C..., personne étrangère au service, sur son lieu de travail ; qu'il n'établit pas qu'il aurait été victime d'un harcèlement en raison de son activité syndicale ou qu'il n'aurait pas bénéficié dans l'exercice de ses fonctions de conditions d'hygiène et de sécurité convenables ; que la circonstance que les dirigeants de La Poste n'auraient pas mis en place les dispositions prévues par la législation lors du vol à main armée subi le 26 juin 2008 à la sortie de son travail, est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse dès lors, qu'elle est sans rapport avec les griefs qui lui sont reprochés ; que si M. B...soutient que son dossier renfermait des éléments relatifs à son appartenance syndicale, il ressort de l'examen des pièces en cause qu'il s'agit de copies de courriers qui avaient été adressés au requérant par sa hiérarchie, faisant état de divers manquements que M. B... justifiait lui-même par des motifs syndicaux ; qu'eu égard à la gravité des fautes ainsi commises, le directeur du secrétariat général du siège du groupe La Poste n'a pas, en prononçant la sanction d'exclusion de fonctions pour une durée de dix-huit mois, dont six mois avec sursis, entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par La Poste, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 décembre 2011 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut, qu'en infligeant à M. B...la sanction litigieuse, La Poste n'a commis aucune faute ; que, par suite, et en tout état de cause, le requérant n'est pas fondé à demander que La Poste soit condamnée à lui payer une indemnité en réparation du préjudice moral et financier qu'il estime avoir subi ;

Sur l'application des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de La Poste qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu non plus, de condamner La Poste à rembourser au requérant des frais qui seraient compris dans les dépens, et dont il ne précise pas le montant ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...une somme de 1 500 euros à verser à La Poste au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : M. B...versera la somme de 1 500 euros à La Poste au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 13BX01676 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX01676
Date de la décision : 22/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Philippe DELVOLVÉ
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : MONOTUKA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-12-22;13bx01676 ?
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