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02/02/2015 | FRANCE | N°13BX01497

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 02 février 2015, 13BX01497


Vu la requête enregistrée le 4 juin 2013 présentée pour M. A...C...demeurant ...par Me D...;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200316, 1200435 du 2 avril 2013 du tribunal administratif de Fort-de-France qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2011 par laquelle l'inspecteur du travail de Martinique a autorisé son licenciement, ainsi que des décisions implicite et expresse du 20 février 2012 par lesquelles le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a rejeté son recours hiérarchique ;

2°) d'ann

uler ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros...

Vu la requête enregistrée le 4 juin 2013 présentée pour M. A...C...demeurant ...par Me D...;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200316, 1200435 du 2 avril 2013 du tribunal administratif de Fort-de-France qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2011 par laquelle l'inspecteur du travail de Martinique a autorisé son licenciement, ainsi que des décisions implicite et expresse du 20 février 2012 par lesquelles le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a rejeté son recours hiérarchique ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure civile ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2014 :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que M. C...a été recruté par la société Clean Garden, spécialisée dans l'entretien des espaces verts, par contrat à durée indéterminée du 2 juin 2007 en qualité d'agent d'entretien polyvalent ; qu'il avait la qualité de délégué syndical et de représentant syndical auprès du comité d'entreprise ; qu'à la suite d'une altercation avec un autre salarié de l'entreprise, le 13 mai 2011, une procédure de licenciement a été mise en oeuvre à son encontre ; que par une décision du 4 juillet 2011, l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement ; que par une décision implicite, suivie d'une décision expresse du 20 février 2012, le ministre du travail a rejeté le recours hiérarchique formé par l'intéressé le 3 octobre 2011 à l'encontre de la décision de l'inspecteur du travail ; que M. C...fait appel du jugement du tribunal administratif de Fort-de-France du 2 avril 2013, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces trois décisions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'en vertu des articles R. 2421-4 et R. 2421-11 du code du travail applicables respectivement au délégué syndical et au membre du comité d'entreprise, " l'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat. " ;

3. Considérant que le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément aux dispositions mentionnées ci-dessus impose à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé fondée sur un motif disciplinaire, d'informer le salarié concerné des agissements qui lui sont reprochés et de l'identité des personnes qui en ont témoigné ; qu'il implique, en outre, que le salarié protégé soit mis à même de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, sans que la circonstance que le salarié est susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces puisse exonérer l'inspecteur du travail de cette obligation ; qu'enfin, la communication de l'ensemble de ces pièces doit intervenir avant que l'inspecteur du travail ne statue sur la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur, dans des conditions et des délais permettant au salarié de présenter utilement sa défense ; que c'est seulement lorsque l'accès à certains de ces éléments serait de nature à porter gravement préjudice à leurs auteurs que l'inspecteur du travail doit se limiter à informer le salarié protégé, de façon suffisamment circonstanciée, de leur teneur ;

4. Considérant que le tribunal administratif a relevé qu'il ressortait des pièces du dossier que l'inspectrice du travail avait procédé à une enquête contradictoire le 14 juin 2011, date à laquelle l'ensemble des éléments du dossier ont été exposés à M.C... ; qu'en se bornant à faire valoir " qu'aucune attestation versée par l'employeur ne lui a été communiquée " et " que les auditions de personnes indiquées n'ont pas été portées à sa connaissance ", M. C... ne conteste pas utilement le motif retenu par les premiers juges ;

5. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

6. Considérant que M. C...conteste la matérialité des faits, au motif que les témoignages seraient contradictoires, ainsi que le lien de causalité entre son comportement, le 13 mai 2011, et la blessure qu'a subie un autre salarié ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier, et notamment d'un certificat médical établi le jour des faits par un praticien du centre hospitalier universitaire, qui évoque un traumatisme sur la personne de M. B..." par choc direct ", du compte-rendu de l'enquête diligentée par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) établi le 16 mai 2011 et de l'enquête contradictoire diligentée par l'inspectrice du travail le 14 juin 2011, enquêtes qui sont toutes deux appuyées sur de nombreux témoignages qui ne sont pas contradictoires, qu'une altercation verbale a opposé, le 13 mai 2011, M. C..., alors chef d'équipe ainsi que délégué syndical et représentant syndical CGTM auprès du comité d'entreprise, à M. B..., alors chef d'une autre équipe de cette société ainsi que délégué syndical CGTM-FSM et membre du CHSCT, à propos de la distribution des équipements de protection des salariés, du respect de l'affichage syndical de la CGTM-FSM par la CGTM et de la crevaison d'un pneu du camion de l'équipe devant assurer le transport des salariés vers un chantier d'espaces verts ; que M. B...ayant tenté, en sa qualité de membre du CHSCT, de s'opposer à l'utilisation de ce véhicule par M.C..., celui-ci a conduit le véhicule en direction de M. B... et, sans tenir compte des exhortations des autres salariés présents, a délibérément heurté M. B...avec le véhicule, à plusieurs reprises, provoquant chez la victime un traumatisme au coude droit ; que d'ailleurs, le procès-verbal de la plainte qu'a déposée ce chef d'équipe ce même jour, relate de façon détaillée les circonstances dans lesquelles il a reçu ce choc ; que la matérialité des faits est ainsi établie ;

7. Considérant que les faits litigieux, qui caractérisent un comportement agressif et violent, présentaient, dans les circonstances de l'espèce, en dépit du contexte de tensions personnelles et syndicales dans lequel il a pu s'inscrire, et alors même que M. C...n'avait jamais fait l'objet d'aucun avertissement avant sa nomination en tant que délégué syndical, un caractère de gravité suffisant pour justifier son licenciement ;

8. Considérant que M. C...soutient cependant qu'il a été victime de harcèlement moral en raison de plusieurs dénonciations qu'il avait faites relativement aux conditions de sécurité dans l'entreprise au titre de ses fonctions syndicales et qu'ainsi son licenciement est en lien avec ses mandats ; que toutefois, ce moyen n'est pas autrement étayé que par la seule production d'une déclaration de " main courante " du 13 novembre 2009, dans laquelle il se plaint du comportement de la direction à son égard du fait d'avoir mis en exergue certains manquements aux règles de sécurité dans l'entreprise, et d'un procès-verbal de plainte du 16 mai 2011 mettant en cause M.B..., lequel n'est d'ailleurs pas son supérieur hiérarchique, au titre des faits litigieux sus-évoqués du 13 mai ; que le moyen tiré d'un lien avec les mandats détenus par le salarié n'est pas davantage étayé et n'est pas corroboré par les pièces du dossier ; que, par suite, aussi bien ce moyen que celui tiré d'un harcèlement moral doivent être écartés ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande dirigée contre la décision du 4 juillet 2011 de l'inspecteur du travail, que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

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No 13BX01497


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX01497
Date de la décision : 02/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Modalités de délivrance ou de refus de l'autorisation - Modalités d'instruction de la demande - Enquête contradictoire.

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation - Licenciement pour faute - Existence d'une faute d'une gravité suffisante.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : GERMANY

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-02-02;13bx01497 ?
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